Bellechasse: un congédiement inexplicable selon plusieurs

PASTORALE. Le congédiement récent d’un agent de pastorale dans Bellechasse fait énormément jaser depuis quelques jours, particulièrement chez certains enfants inscrits à la pastorale et leurs parents.

Christian Dubé a été mystérieusement remercié de ses services au cours des dernières semaines ce qui a particulièrement déçu plusieurs personnes, surtout qu’aucune explication n’a été transmise par la paroisse Saint-Benoit-de-Bellechasse qui regroupe, depuis le 1er janvier dernier, dix communautés du nord de la MRC.

Le succès des fêtes de l’Halloween à Saint-Gervais et du Mardi-Gras à Saint-Charles lui est grandement attribuable puisqu’il utilisait les mêmes méthodes pour rejoindre les gens à l’époque où il œuvrait à Québec. Son personnage de DJ Jésus et sa distribution de bonbons et de colliers sont quelques éléments qui ont continué de plaire après qu’il eût commencé son travail dans Bellechasse et plusieurs continuent de croire au bien-fondé de sa démarche.

Christian Dubé est un agent de pastorale apprécié de plusieurs

Des visions différentes?

S’interrogeant sur la situation, quelques personnes ont demandé des explications. Le même message a été acheminé à toutes celles et ceux qui ont demandé des réponses à la paroisse, message qui en a laissé plusieurs sur leur appétit. «On nous dit simplement avoir mis fin à son contrat le jeudi 24 mai dernier et ça disait que M. Dubé n’avait pas le droit d’entrer en contact avec personne. On ne se sait pas ce qu’on lui reproche. Si c’était délicat, on nous l’aurait sûrement mentionné après toutes les lettres que nous avons envoyées», ont répété certaines d’entre elles.

Le directeur administratif de la Paroisse, Simon Noël, a finalement accepté de commenter davantage. Cela n’a rien à voir avec une fraude, une accusation criminelle ou une divergence de vision de l’enseignement de la pastorale a-t-il expliqué. «Il y a des façons de travailler en équipe et c’est beaucoup plus de cet ordre. Nous ne voulons pas nuire à M. Dubé. On espère qu’il pourra exercer ses talents ailleurs que chez nous et qu’il ne commette pas les mêmes erreurs. Il y a deux côtés à une médaille et nous ne voulons pas en discuter sur la place publique.»

Il ajoute que la décision n’a pas été prise de gaieté de cœur. «C’est quelqu’un qui était apprécié, on ne le nie pas. On ne renie pas ce qu’il a fait. C’est quelqu’un qui avait de bonnes idées, mais il faut penser au bien de l’ensemble. C’est l’assemblée de Fabrique qui a pris la décision, car c’est l’employeur. Il y a un remaniement pastoral à venir dans Bellechasse-Etchemins et deux nouveaux prêtres arriveront en août et l’équipe pastorale aura à couvrir tout ce territoire.»

Certaines personnes avancent qu’un problème de vision au sein de l’équipe pastorale est possiblement en cause. «À l’intérieur de l’équipe, vous avez des gens qui pensent que la pyramide part d’en haut et descend soit Diocèse, équipe pastorale et les communautés chrétiennes. Christian voyait les choses différemment, on part des besoins des communautés, car une équipe pastorale doit être au service de sa communauté. C’est deux visions qui s’affrontent», peut-on distinguer dans les échanges.

Deux dames confirment que certaines nouveautés amenées par M. Dubé ont semblé déranger certaines personnes. «C’est certain que c’est beaucoup de travail d’organiser le Mardi Gras ou l’Halloween par exemple et des gens ne veulent pas embarquer là-dedans.»

Responsable des communications au Diocèse de Québec, Jasmin Lemieux-Lefebvre, explique que ce ne sont pas les activités impliquant M. Dubé qui sont en cause. «Pour nous l’élément le plus important est que la paroisse a fait un choix. Le chapitre est tourné autant du côté de la paroisse que chez M. Dubé. Des annonces seront bientôt faites pour le renouveau de la paroisse.»

Des enfants et leurs parents déçus

Les premiers clients de l’agent de pastorale ont inévitablement été les enfants ayant participé aux activités de la dernière année. La demi-douzaine d’entre eux présents à la rencontre était unanime sur le personnage. Angéline le trouvait gentil et accrocheur. «On aimait tous Christian et on avait envie de parler avec lui», dit-elle.

«J’aimais ça apprendre l’histoire de Jésus, mais Christian avait une façon de nous amuser et de faire en sorte que ça nous rentre dans la tête», explique Xavier qui appréciait le côté imprévisible de l’agent de pastorale. «Il y a des choses que je ne comprenais pas avant, puis avec Christian, je comprenais», résume Léa-Kym.

Jade et Maude sont deux jumelles âgées de 9 ans qui ont toujours apprécié sa façon de vulgariser et illustrer certains passages de la Bible. «Il ne nous lisait pas juste un texte, il l’expliquait et c’était plus facile à comprendre.»

Annick de Honfleur a observé que les parents avaient également du plaisir pendant les activités. «On avait envie de s’impliquer. Ca donnait une autre vision de l’Église. Il allait chercher les jeunes facilement. Il a laissé un beau message à nos enfants.»

Elle et d’autres personnes illustrent que l’agent de pastorale avait réussi à ramener des gens à l’église du village. «Il avait réussi à remplir des églises autrement qu’à Noël ou à Pâques, même de gens qui ne les fréquentaient pas.»

«Cette année, je l’ai tellement vanté, c’est incroyable ce qu’il a pu apporter. Mon enfant a des besoins spéciaux et il aimait fréquenter la catéchèse avec Christian», précise l’une d’entre elles.

Isabelle et Pascale de La Durantaye confirment le succès qu’il avait auprès des enfants. «Christian, c’est comme du bonbon. Il attire les enfants et d’instinct, ils vont vers lui. Les enfants seront déçus, car il leur avait dit qu’il serait toujours là pour les accompagner et c’est gravé dans la mémoire de plusieurs.»

D’autres ont retenu son côté imaginatif. «Il était capable avec une idée ou un thème de le décortiquer et le présenter, comme un metteur en scène avec une histoire ou un menuisier avec une planche de bois. Il a rallumé la flamme ou l’intérêt de la foi et notre rencontre prouve qu’il a touché plusieurs générations et fait que les gens s’unissent plutôt que de se disperser», explique Gilles.

Une vive déception

Annick indique comment il a réussi à motiver et inspirer plusieurs enfants, simplement en racontant son histoire personnelle alors qu’il étudiait la musique. «Il racontait qu’il n’était pas doué, mais qu’à force de persévérance, il avait finalement terminé 1er de sa classe à force de pratique. Son vécu, sa couleur, sa façon d’interpréter la Parole nous apportaient autant qu’aux enfants. Il m’a fait revivre ma catéchèse.»

Cécile est une autre des personnes qui a choisi de s’impliquer après l’arrivée de M. Dubé qui, pour elle, venait combler un besoin.  «J’ai donné beaucoup de temps de 1982 jusqu’au début de l’an 2000. L’arrivée de Christian et de sa façon de faire ont fait que j’ai choisi de revenir en catéchèse en début d’année. Je voyais là une ouverture pour les jeunes familles. Mes enfants ont pris leurs distances par rapport à la pratique du dimanche et ils ne sont pas différents des autres. Je voyais ce vent de renouveau avec des personnes qui arrivaient le sourire aux lèvres, qui participaient aux activités, c’était une bonne nouvelle.»

Les derniers événements l’ont grandement déçu ce qui l’amène à questionner quelle sera son implication à l’avenir. «J’ai mal à mon église. Mon église est faite de pharisiens et ce que Christian apportait venait défaire ça. Il a été attaqué par celle et ceux qui sont possiblement des pharisiens. Après une rencontre du comité pastorale en août 2017 et quand je suis revenue chez moi, je savais que l’année serait difficile pour lui. L’écart entre les deux visions était trop large.»

Danie de Saint-Charles a choisi de s’impliquer après avoir assisté à une activité. «Je n’ai pas d’enfants en bas âge et que je l’ai vu, je me suis décidé. J’ai été vraiment touchée et j’ai redécouvert des choses que j’avais oubliées.»

Audrey est une adolescente qui a aussi été rejointe par l’agent de pastorale. «Christian a réussi à amener beaucoup de positif et ce sera marquant pour celles et ceux qui ont été là. Il a laissé une bonne morale aux enfants. Il réussissait à obtenir le silence des enfants alors qu’ils étaient assis depuis une heure un mardi soir de 19 h à 20 h»

Lors de la récente activité de la Confirmation à Saint-Anselme, M. Dubé aurait fait l’objet d’une ovation de la part des gens présents confirme Vicky qui était présente à l’activité. Deux des mamans sur place, résidentes de La Durantaye, ont pour leur part déploré l’absence de l’agent de pastorale à une activité présentée à Saint-Charles. «Son absence a fait en sorte que l’activité a été plate, longue et pénible. L’église était pleine et des enfants pleuraient à la fin. C’était le jour et la nuit avec ce que l’on avait vécu», ont-elles raconté ajoutant avoir remarqué que les enseignements de l’agent de pastorale devenaient applicables à la vie de tous les jours.

«Ça fait 50 ans que je chemine. Je pratique quotidiennement et je venais préparer la salle alors j’avais la chance d’écouter ses enseignements. Écouter Christian expliquer aux enfants c’était quoi l’enfer, jamais on me l’avait expliqué comme ça. Jamais un homme ne m’a parlé comme ça», raconte Paul, un monsieur de 72 ans qui appréciait ses idées.

Une suite possiblement chancelante

La qualité que l’on a eue au cours de la dernière année ne pourra pas être se répéter avec les gens en place entrevoit Cécile. «Ils n’ont pas la capacité, le talent, le charisme, la formation et l’authenticité. Christian, c’est Christian. J’ai peur que les gens fuient de nouveau et laissent tomber. C’est un apôtre des temps modernes et on n’en rencontre pas souvent», selon elle.

Il y a eu 186 évaluations remplies par des parents du territoire de la paroisse et inscrits dans les catéchèses familiales en 2017 nous a-t-on indiqué. De ce nombre, 132 mentionnent expressément le nom de M. Dubé et soulignent sa capacité de rejoindre les jeunes, de les intéresser pour finalement réussir à les amener plus loin dans leurs réflexions.

Autant les enfants que les adultes que nous avons rencontrés espèrent que les choses pourront continuer dans la même voie que la dernière année disant même espérer le retour de M. Dubé. Ils déplorent que personne ne les ait consultés sur l’évolution des choses et ont surtout peur de ce qu’un recul pourrait occasionner. Certains réfléchissent à la possibilité de rencontrer leur municipalité respective pour proposer une alternative à la paroisse incluant l’agent de pastorale.