Deux kayakistes vantent le Rocher blanc et la rivière du Sud

PLEIN AIR. Deux jeunes amateurs de kayak ont récemment dévalé la rivière du Sud, plus précisément dans le secteur du Rocher blanc à Saint-Raphaël.

Jean-Philippe Nadeau-Langevin est résident de Québec, mais plusieurs membres de sa famille habitent dans la région. Lui et son ami, Gaël Bellighan, originaire de l’Outaouais, sont littéralement en amour avec l’endroit. «Ma famille habite à Buckland et mes parents avaient un chalet au lac Crève-Faim. Chaque fin de semaine de ma jeunesse, j’étais là. C’est tellement une belle place.»

Conscients qu’un drame s’est produit il y a quelques années à proximité, les deux jeunes hommes avaient cependant pris beaucoup de précautions avant de relever leur défi et d’ainsi repousser les limites. «Je sais que c’est délicat. Des gens y ont perdu la vie. Il est super important de ne pas oublier qu’il y a des dangers, de bien sensibiliser les gens et de laisser la rivière accessible. Il ne faut pas oublier ce qui s’est produit, mais il ne faut pas non plus interdire un si bel endroit!»

Tout en étant d’accord avec la promotion de la sécurité, le jeune kayakiste estime que l’endroit est adéquat pour certaines activités de plein air. «On remarque vite l’affichage qui a été aménagé à la suite de la noyade des deux jeunes filles. C’est bien de diffuser des messages de sécurité, mais je pense qu’il serait important d’instruire et de sensibiliser les gens à une pratique sécuritaire, au lieu d’interdire les accès.» Il ajoute tout de même comprendre les réactions qui ont suivi l’événement. «C’est normal, surtout de la façon dont c’est arrivé.»

Jean-Philippe Nadeau-Langevin et son ami, Gaël Bellighan, se sont lancés en kayak sur la rivière du Sud à la fin de l’été.

Préparation et sécurité

Même s’il est du type à ne pas avoir froid aux yeux, Nadeau-Langevin explique que chacun de ses gestes fait l’objet d’une réflexion et d’une certaine préparation. «Chaque fois que je me baigne en eaux vives, j’ai toujours une veste de flottaison. Même chose pour les moments où je plonge ou saute à un endroit.»

Selon lui, un monde idéal serait celui où on pourrait encourager et promouvoir la pratique de différentes activités, tout en faisant une promotion agressive de la sécurité. «On allait se baigner aux chutes à Armagh quand on était plus jeunes, sans veste. Aujourd’hui, je ne le ferais plus de la même façon, surtout que c’est de l’eau vive. On m’a sensibilisé. Je me suis formé pour faire ce que je fais. Il faut anticiper les dangers, connaitre l’environnement où on est et se préparer.»

Régulièrement à la recherche de défis, Jean-Philippe rappelle qu’il est prudent dans sa témérité. C’est pourquoi il prône la sensibilisation plutôt que l’interdiction à cet endroit ou ailleurs. «Nous sommes les premiers, possiblement, à avoir franchi la chute en kayak. Avant même de le faire, nous avions étudié l’endroit. Depuis trois ans, j’ai des amis qui vont l’observer. C’était la 5e fois que j’allais la voir en tant que kayakiste. J’ai attendu que les conditions soient adéquates. Si nous l’avons fait, ce jour-là, c’est que les conditions s’y prêtaient. Il y avait suffisamment d’eau, pas trop non plus. Avant de nous lancer, nous nous sommes assis près d’une heure sur la roche près de l’endroit pour observer les mouvements de l’eau, à quel endroit passer. Tout le monde devrait entreprendre ce genre de réflexions, surtout en rivière avec de l’eau vive. Nous sommes les premiers responsables de notre propre sécurité», insiste-t-il.

«Il faut remettre les rivières en valeur et le plein air est tendance. Ce qui s’est passé doit servir à sensibiliser les générations futures pour une pratique sécuritaire en eau vive», conclut-il.

Mère de Jennyfer, Nathalie Pichette a milité en faveur d’une amélioration de la sécurité au Rocher blanc après la tragédie.

Sensibilisation plutôt qu’interdiction

Mère de l’une des deux jeunes filles ayant perdu la vie au Rocher blanc en juillet 2015, Nathalie Pichette indique ne s’être jamais affichée contre la pratique d’activités à cet endroit. Elle insiste pour que le message soit orienté vers la sécurité.

«Je ne tiens pas qu’on rappelle aux jeunes ou autres qu’il y a déjà eu deux morts à cet endroit, pas du tout, mais plutôt qu’on martèle l’aspect sécuritaire. Peut-être qu’il y a de nouvelles façons de sensibiliser les gens à certains dangers. Il faut rééduquer les gens à la rivière», insiste-t-elle.

Le 15 juillet 2015, Jennyfer Pichette-Mercier, 12 ans, et Mélissa Prévost, 14 ans, se sont noyées durant une baignade alors que le débit de la rivière du Sud  était trop fort à la suite de pluies diluviennes quelques heures auparavant. Une signalisation a été installée depuis ces tristes événements. «Quelqu’un qui connait ça, quelqu’un qui est intéressé va porter attention à l’affichage, sauf que plusieurs la remarque et ne savent pas ce que c’est, pourquoi c’est là.»

Elle rappelle qu’elle est d’accord sur le principe que l’endroit serve toujours à la pratique d’activités. Selon elle, les gens doivent être sensibilisés davantage sur les dangers inhérents à un plan d’eau du genre. Elle estime qu’une rivière n’est pas un plan d’eau ordinaire comme un lac. Elle évolue régulièrement et les perceptions des gens doivent être remises à jour. «La rivière n’est plus comme elle était dans le temps. L’eau qui y circule fait que le fond est constamment en train de changer, alors c’est normal que l’on doive ajuster nos connaissances.»

Le principal élément à rappeler est la progression potentielle de la quantité d’eau d’une rivière. «Il y a une éducation à faire et à refaire constamment, sur l’augmentation possible des débits de l’eau par exemple. Pourquoi et quand cela peut se produire ou autre chose. Il fait beau un matin, sauf qu’il a plu beaucoup à Saint-Philémon la veille par exemple. L’eau risque de monter rapidement pour cette raison. Je connais des gens qui se sont fait surprendre dans le passé.»