Réjean Bédard: vivre de la forêt américaine

FORÊT. La forêt américaine n’a plus de secrets pour Réjean Bédard de Saint-Cyprien qui, pendant plus de 30 ans, a opéré une entreprise spécialisée dans l’exploitation forestière avec son épouse Marjolaine Goupil.

De toujours, l’actuel maire de Saint-Cyprien a vécu de la forêt. Tout comme son père avant, c’est à l’âge de 19 ans qu’il a commencé à travailler comme bûcheron. Avec son cousin André, il a fondé Les Entreprises forestières Ré-An en 1986. Rapidement, la petite entreprise commençait à travailler au sud de la frontière.

«Quand le taux de change a commencé à fluctuer un peu trop à notre goût, Marjolaine et moi avons décidé de former une compagnie américaine et de transférer l’ensemble de nos activités là-bas, puis de vendre les équipements de Ré-An à cette dernière. On achetait tous nos équipements là-bas et on se finançait de l’autre côté aussi, comme de vrais Américains», souligne M. Bédard qui a racheté les parts de son cousin dans Ré-An en 1989.

L’entreprise, Réjean Bédard Inc., a longtemps œuvré du côté de Jackman, dans le Maine. Pendant de nombreuses années, la coupe forestière était la principale activité de M. Bédard qui en 1999 s’est également lancé dans le transport du bois.

Pendant plusieurs années, il a aussi œuvré dans le secteur de Berlin et de Gorham au New Hampshire, où il a abattu 16 000 acres de forêt à contrat. «Là-bas, je construisais mes propres chemins forestiers que je gravelais par la suite. On sortait jusqu’à 125 voyages de bois par semaine à une certaine époque, ce n’était pas mal pour un petit contracteur comme moi», précise M. Bédard qui souligne qu’il était payé tant de la tonne pour bûcher et apporter le bois au moulin. «Quand tu livres rapidement, c’est payant. On s’organisait pour livrer la journée même, avant que le bois ne sèche et perde de sa valeur.»

Le bois de sciage et la coupe sélective, dans les plantations, représentaient 80 % du chiffre d’affaires de l’entreprise. «J’avais les machines pour cela et de bons opérateurs, on faisait du travail de qualité d’autant plus qu’il n’y a pas de bois marqué dans les plantations américaines. Ici, ce sont les ingénieurs forestiers du groupement qui décident quel bois prendre alors qu’aux États-Unis, ce sont les opérateurs qui décident. On avait des prescriptions à respecter et on entrait toujours dans les normes.»

Réjean Bédard était très connu aux États-Unis comme le montre cette photo extraite de la revue «Just Forrest» de Komatsu, en 2011.

Mieux connu aux États-Unis

Si les débuts en sol américain ont été difficiles, M. Bédard a su rapidement faire ses preuves et obtenir la confiance des institutions bancaires, entre autres. «Comme j’ai travaillé longtemps du côté de Jackman, les gens me reconnaissent plus facilement là-bas qu’à Sainte-Justine ou Saint-Cyprien», dira-t-il.

Son esprit entrepreneurial lui a toujours permis de passer à travers les coups durs, comme lors des meilleures années. «J’ai toujours été présent afin de voir l’évolution du travail sur le terrain. J’avais beaucoup d’ambition et j’ai saisi les occasions quand elles se sont présentées», indique M. Bédard qui a embauchait de 12 à 35 personnes, selon les années, incluant ceux qui œuvraient chez Ré-An.

La crise forestière

Comme bien des gens d’affaires et travailleurs forestiers de l’époque, Réjean Bédard a vécu durement la crise forestière qui a secoué les États-Unis et le Canada. Pendant un certain moment, il a ramené des équipements au Québec où il a décroché divers contrats pour l’Abitibi-Consolidated.

M. Bédard a vendu son entreprise américaine en décembre dernier. Il reste toutefois bien au fait de ce qui se passe dans ce secteur d’activités. Il mentionne que l’industrie du bois va beaucoup mieux depuis l’an dernier du côté américain, ce qui a des effets positifs ici.

«On a senti une belle reprise, mais on ne sait jamais pour l’avenir, car ça fonctionne par cycles. On dit que nous sommes supposés entrer dans un mauvais cycle, mais je ne crois pas que ce sera le cas pour quelques années encore. Tant que ça ira bien aux États-Unis, ce sera le cas ici. Nous sommes attachés à eux.»

Réjean Bédard achetait du côté américain tous les équipements dont il avait besoin pour ses opérations.