Eau usées: des municipalités toujours sans station d’épuration

EAU. Neuf municipalités de la région déversent toujours leurs eaux usées dans le fleuve ou dans des rivières, en partie ou en totalité, et ce, avec peu de traitement au préalable.

En Chaudière-Appalaches, on remarque que Saint-Michel-de-Bellechasse, Saint-Benjamin dans Les Etchemins, Lac-Frontière et Saint-Omer dans Montmagny-L’Islet, Saint-Frédéric en Beauce, Saint-Antoine-de-Tilly et Sainte-Croix dans Lotbinière, de même que Saint-Fortunat et Saint-Adrien-d’Irlande dans la MRC des Appalaches n’ont toujours pas de réseau d’égout ou une station d’épuration adéquate.

Pourtant, toutes les municipalités de la province devaient présenter un calendrier de réalisation à cet effet d’ici le 31 décembre. Alors qu’elles sont à divers niveaux d’élaboration de leur projet, aucune d’entre elles n’est à l’étape de la réalisation des travaux. En Chaudière-Appalaches, la direction régionale du ministère de l’Environnement est bien au fait de la situation et comprend qu’une démarche du genre est coûteuse et complexe.

La protection des cours d’eau, au cœur des priorités en matière d’eaux usées.

« La mise en place d’une station d’épuration est un projet d’envergure et complexe qui peut prendre plusieurs années à se réaliser. Il comporte plusieurs étapes, notamment les demandes de subvention, les appels d’offres de services professionnels, la sélection de la solution et du site, la conception, les plans et devis, l’obtention des autorisations (ex : MELCC, CPTAQ), les appels d’offres pour la construction, la réalisation des travaux et la mise en service », explique Frédéric Fournier, porte-parole de la direction régionale.

Il ajoute que certains retards peuvent s’expliquer par la nécessité de refaire le réseau d’égout et de coordonner ces travaux avec ceux du ministère des Transports. « Pour d’autres municipalités, le manque d’expertise technique peut expliquer qu’elles progressent lentement dans leur projet d’assainissement. Ces circonstances peuvent entre autres expliquer que certaines municipalités n’en soient qu’au début de leur projet d’installation de station d’épuration. »

Même si des amendes sont prévues à la loi pour les municipalités n’étant toujours pas conformes, la direction régionale du ministère entend privilégier une autre approche, poursuit M. Fournier. « Le ministère fera un rappel aux municipalités et assurera un suivi serré de la progression de leur projet. Pour celles qui ne progresseront pas selon les échéanciers convenus, il pourrait y avoir des mesures coercitives appropriées, en fonction d’une évaluation des circonstances de chaque dossier. Le ministère préfère plutôt renforcer son accompagnement auprès de ces municipalités afin de les soutenir à travers les différentes étapes menant au processus d’autorisation. »

Saint-Michel et Saint-Benjamin en mode solution

Faisant partie des neuf municipalités de la région faisant face à des défis en matière d’eaux usées, la municipalité de Saint-Benjamin doit composer avec une réalité particulière, celle d’avoir trois secteurs habités. En plus du village, les secteurs de Cumberland et de Morisset-Station sont aussi sous sa responsabilité. C’est cette dernière portion de la localité, qui compte environ 35 résidences, qui est en cause.

La mairesse Martine Boulet indique que des études à cet effet sont débutées et des demandes de subventions déjà adressées. « Sans aide, on ne peut réaliser ça tout seul. On parle d’un projet d’environ 5 M$ pour Morisset-Station, mais c’est tout ce qui nous reste à faire. »

La municipalité de Saint-Benjamin n’a pas de réseau d’aqueduc sur son territoire, sauf que des bassins de rétention, au village, permettent le traitement des eaux usées. Le secteur de Cumberland propose des puits artésiens, des fosses septiques et des champs d’épuration.

« C’est impossible pour nous de brancher ces endroits aux égouts du village, c’est à environ 4 kilomètres du secteur de Morisset-Station. Ce sont des secteurs différents et on doit composer avec cette réalité. »

Mme Boulet est aussi consciente et approuve le fait que les ministères doivent tenter le plus possible de jumeler les travaux qui pourraient être effectués au même endroit. Des pourparlers avec le ministère des Transports sont aussi de mise, puisque ce secteur longe la route 275. « Il y a un bon bout de la route 275 qui pourrait être réalisé sans problème, ça a vraiment besoin d’une réfection. Dans le cœur de Morisset-Station, là, il faudrait idéalement faire coïncider tout ça en même temps. »

Même scénario à Saint-Michel

M. Dans Bellechasse, la localité de Saint-Michel travaille depuis quelques années à se mettre aux normes, explique le maire, Éric Tessier. À l’heure actuelle, le réseau municipal amène les eaux usées vers un dégrilleur qui sont ensuite envoyées vers le fleuve. « Nous sommes à cheval entre les phases 1 et 2 du programme Primeau, soit la réalisation des études, plans et devis, les capacités, etc., tout l’aspect des chiffres. La phase 2 est l’étape des appels d’offres, la construction et la réalisation. Il y a quelques détails techniques à régler, car on s’obstine sur la technologie. »

Le réseau est dans le périmètre urbain, soit le long de la route 132 et au nord de la route. On parle d’environ 445 résidences, mais on souhaite y ajouter 150 résidences supplémentaires dans le futur. Un dégrilleur, c’est une passoire. On ramasse des choses, mais à savoir si on respecte les normes, c’est non. Nous sommes une goutte dans l’océan, mais notre volonté de faire notre effort est là. Ça demande toutefois un investissement de 3 à 4 M$ comme projet. »

Le maire Tessier explique toutefois que des discussions sont toujours de mise avec les ministères concernés, soit Environnement et Affaires municipales. « Il est certain que comme nous sommes subventionnés, les ministères ont leur mot à dire. On se pose toutefois des questions sur certains aspects, comme des chiffres avancés et les technologies disponibles. Est-ce qu’il faut investir 200 ou 300 000 $ pour deux ou trois journées problématiques dans l’année, notre développement futur, etc. Il y a des aspects à examiner. »

M. Tessier aimerait pouvoir compter sur une technologie qui assurerait une stabilité à longue échelle. « On aimerait avoir quelque chose qui aurait une certaine pérennité et qui tiendra compte du fait que nous sommes en territoire agricole. Au bout du compte, on souhaite une usine évolutive, pour éviter d’avoir à réinvestir un autre million dans 10 ans, pour que si on doive accroitre sa capacité, que ça se fasse à moindre coût. On veut quelque chose qui soit gagnant à la fois pour la municipalité, le gouvernement, le citoyen et l’environnement. Il se fait des choses, ailleurs, qui répondent à ça. »

Éric Tessier a aussi en tête la gestion des boues émanant de cette future usine. « Il faut aussi savoir ce que l’on en fera. On les enfouit ou on les revalorise ? On essaie aussi de travailler là-dessus, pour tenir compte de la réalité des sites d’enfouissement. En résumé, on veut mieux traiter, protéger le fleuve et revaloriser autant que possible. »

Il estime que le dossier pourrait être rapidement mis de l’avant. « Si tout le monde s’assoyait à la même table et allait à la même vitesse, tous les contrats seraient accordés cette année. On espérait que la pelle mécanique soit dans le trou à la fin de cette année. »