La pénurie de médecins inquiète dans Bellechasse

SANTÉ. Le nombre de patients orphelins risque de grimper rapidement au cours des prochains mois dans Bellechasse avec l’annonce du départ prochain de la Dre Michelle Berger à Sainte-Claire et celui du Dr Jean Falardeau à Saint-Charles pour 2023.

Des élus de la région ont commencé à élever la voix sur le sujet alors qu’en janvier dernier, 3 832 citoyens du territoire de Bellechasse étaient déjà sans médecins de famille. Ce nombre pourrait grimper à plus de 10 000 au cours des 15 prochains mois, soit plus de 25 % de la population bellechassoise.

La municipalité de Saint-Lazare a d’ailleurs récemment adopté une résolution visant à demander au comité Santé de la MRC de Bellechasse de se pencher rapidement sur le sujet. « On demande qu’on puisse avoir quelques heures par semaine, peu importe la clinique, un moment où les patients orphelins pourront rencontrer un médecin », explique le maire de Saint-Lazare, Martin J. Côté. « C’est sur le principe. Ce n’est pas vrai que dans Bellechasse il faudra toujours aller à Lévis pour avoir des soins de santé, alors que l’on veut que des gens viennent s’établir chez nous, et ce n’est pas avec deux médecins annoncés cette année que l’on va régler le problème. »

Lui-même patient orphelin depuis deux ans et demi, M. Côté se sent démuni face à cette situation et souhaite une solidarité des médecins déjà en place dans la région. « Est-ce que ce sera un trois heures par semaine à la clinique de Saint-Anselme, deux heures à Saint-Damien, d’autres moments ailleurs ? L’objectif est d’éviter que les gens de Bellechasse aient à se rendre à un sans -rendez-vous à Lévis ou ailleurs. »

Après Sainte-Claire, Saint-Charles ?

Médecin responsable du GMF Bellechasse, qui comprend les cliniques de Sainte-Claire et de Saint-Charles, le Dr Jean Falardeau confirme la fermeture prochaine de la clinique de Sainte-Claire et s’interroge même sur l’avenir de celle de Saint-Charles. Avec le départ de la Dre Berger à Sainte-Claire, qui a 3 200 clients, ainsi que celui du Dr Falardeau, qui en a 4 300, la situation risque de devenir périlleuse, convient ce dernier.

« Un ou une jeune finissante ne s’en irait jamais dans une clinique seule. La concurrence est forte dans Bellechasse, notamment avec Saint-Henri et Saint-Anselme. Ils ont le choix, ils sont courtisés et vont où c’est le plus attractif. Les nouveaux médecins sont très compétents, mais travaillent en groupe et sont formés de cette façon à l’université. De nos jours, il faut être ultra-attractif avec notamment des locaux au goût du jour, ce que nous avons à Saint-Charles. Malgré tout, dans ce contexte, c’est impossible qu’il y ait de la relève à Sainte-Claire et la survie de la clinique à Saint-Charles s’annonce un peu plus ardue, mais pas impossible en raison de la qualité de la pratique implantée par les jeunes médecins. Ça sera un atout important pour l’avenir de la clinique », résume-t-il.

Annoncée il y a quelques mois, la construction d’une éventuelle clinique médicale à Saint-Raphaël n’a toujours pas débuté, ce qui laisse cette partie du territoire sans médecin depuis quelques années maintenant. Or, l’avenir d’une prochaine clinique médicale à cet endroit est aussi périlleux, selon le Dr Falardeau. « À l’heure actuelle, ils ont la pharmacie et la municipalité pour rentabiliser le bâtiment. Il n’y a rien d’impossible, mais je ne crois pas que des médecins vont aller là. Peut-être des infirmières-praticiennes, mais pas plus que ça. Tant mieux pour le secteur si je me trompe. »

Le CISSS Chaudière-Appalaches doit bientôt faire connaitre son Plan régional d’effectifs médicaux pour la prochaine année. Deux médecins devraient être annoncés pour le territoire de Bellechasse, sauf que ces derniers auront une certaine liberté sur l’endroit où s’établir. Dr Falardeau croit que la relève à Saint-Charles sera un peu plus difficile à assurer, en raison de la compétition venant des cliniques voisines de Saint-Anselme et Saint-Henri. « Quand un médecin a fait un an, il peut se diriger où il veut ensuite. Saint-Raphaël aurait dû se structurer avant, lorsque Dr Gilles Roy et Dr Pascal Bernier étaient en place. C’est lorsque les gens partent, comme à Sainte-Claire, que les milieux décident d’agir. Il est trop tard. Les pressions politiques, ça n’existe pas là-dedans. Il y a une quinzaine d’années, je rencontrais déjà des maires de Bellechasse et leur disait que la catastrophe approchait. »

D’ici à une retraite bien méritée, le Dr Jean Falardeau travaillera d’arrache-pied pour tenter de sécuriser l’avenir de la clinique de Saint-Charles avec les médecins en place, tout en reconnaissant la fragilité de la situation. « Je trouve cela extrêmement triste, car nous avons toujours eu des médecins compétents et très actifs. La nouvelle génération est aussi compétente, mais leur formation leur exige de faire les choses de façon différente et d’agir avec une plus grande prudence. Ce faisant, ils ne peuvent pas avoir de clientèle aussi importante que leurs prédécesseurs. »