Dindons sauvages : plus visibles, mais pas nécessairement plus nombreux selon le MFFP

FAUNE. Les dindons sauvages sont de plus en plus visibles sur le territoire de Chaudière-Appalaches, notamment en Bellechasse-Etchemins et dans la Beauce, mais pas nécessairement plus nombreux que par les années passées.

C’est ce que soutient le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs lorsqu’interrogé sur la problématique qui est vécue depuis le début de la période hivernale alors qu’on aperçoit de plus en plus d’attroupements de ces oiseaux sauvages à proximité des terres et bâtiments agricoles.

Conseillère en communications à la direction générale du ministère, Anik Martel soulignait, dans un échange de courriel avec le journal, que la présence de cette espèce sauvage est assez récente dans l’ensemble de Chaudière-Appalaches et que le milieu agroforestier est un endroit favorable à l’établissement du dindon sauvage.

« Si les populations de dindons ont augmenté de façon importante de 2010 à 2018-2019, celles-ci semblent s’être stabilisées et auraient même diminué légèrement depuis ce temps, notamment en raison de la chasse et des observations faites au fil des ans par les chasseurs », indique-t-elle en ajoutant que le plan de gestion du dindon sauvage 2016-2023, mis de l’avant par le ministère et révisé depuis, est favorable à l’implantation de cet oiseau sauvage et prévoit, également, une cohabitation entre cette espèce et les divers acteurs du milieu.

« La présence grandissante de ces oiseaux, surtout l’hiver, peut s’expliquer par la présence de nourriture dans les champs ou à proximité des résidences et bâtiments. (…) L’observation facilitée et la taille des groupes hivernaux peuvent entraîner une impression d’une plus forte densité de population », poursuit-elle en mentionnant qu’en dehors de la saison de la chasse, les citoyens ou producteurs agricoles incommodés par la présence des dindons sauvages sont invités à mettre en place des répulsifs visuels et sonores afin de les effaroucher et, surtout, à retirer toutes les sources de nourriture accessibles aux dindons, pour éviter de les attirer.

« Dans les régions où la population de dindon est établie depuis plus longtemps, comme l’Estrie et la Montérégie, des agriculteurs ont adapté certaines installations pour limiter l’accès aux dindons. Il faut donc réfléchir à des moyens pour limiter l’accès à cette nourriture », ajoute Mme Martel qui propose également aux personnes et producteurs concernés d’établir des ententes avec des chasseurs afin de favoriser l’accès à leurs terres et ainsi optimiser le prélèvement lors des périodes légales de chasse.

Périodes de chasse trop limitatives

Président de l’UPA de Chaudière-Appalaches, James Allen contredit les propos du ministère de la Faune selon lesquels les populations de dindons sauvages sont stables ou en légère diminution, rappelant que ce phénomène, peu présent il y a cinq ans à peine en Chaudière-Appalaches, est devenu pratiquement hors de contrôle.

« Il y a cinq ans, on en voyait quelques-uns ici et là, mais c’est devenu intolérable. C’est comme une plaie d’Égypte. Certains sont tellement peu farouches qu’ils viennent manger l’ensilage dans les bâtiments de ferme. Il y a aussi une question de sécurité et de salubrité pour notre bétail, sans oublier les dégâts à nos terres agricoles », souligne-t-il en mentionnant que l’une des solutions à ce problème reposerait, selon lui, sur l’élargissement de la période de chasse et des règles imposées aux chasseurs.

À cet effet, M. Allen précise qu’un groupe de travail réunissant des représentants du MFFP et de l’Union des producteurs agricoles étudie présentement la question. « Comme le plan de prélèvement du ministère de la Faune est réévalué aux quatre ans, on demande à nos producteurs de prendre en note tout ce qu’ils font et de prendre des photos afin de documenter une éventuelle refonte de la chasse aux dindons. Dans des zones comme la nôtre, on n’a le droit de tuer qu’un mâle à la fois et la chasse n’a lieu que sur deux fins de semaine en mai, de 5 h du matin à midi. En plus, on n’a pas le droit de chasser en automne comme c’est le cas dans d’autres régions comme l’Estrie où les chasseurs ont droit au mâle et à la femelle. C’est assez restrictif, ça revient presque à dire qu’on n’a pas le droit de les tuer », soutient-il.

De par leurs actions, même en hiver, les dindons sauvages peuvent vauser d’importants dégâts aux champs et aux récoltes.

Dommages importants à l’agriculture

Producteur agricole de Lac-Etchemin, Harold Gagnon déplore cette situation et s’inscrit en faux, lui aussi, devant les prétentions du MFFP selon qui les populations de dindons sauvages, bien que plus visibles, sont stables ou en légère diminution depuis quelques années. Une certaine journée, il dit en avoir compté 68 à proximité de sa résidence et entre 40 et 45 une autre journée, sur une des terres qu’il cultive.

« C’est difficile pour les producteurs de céréales, car ils mangent les grains qui restent et comme tu as un sol à nu, ils mangent les vers de terre qui sont en surface et détruisent la structure du sol. Les pertes de rendement sont difficiles à évaluer, mais je les situerais à plusieurs milliers de dollars par année. Cela sans oublier la présence des chevreuils », mentionne-t-il en précisant que sur une parcelle de six âcres lui appartenant, le rendement a diminué de 50 % du fait que ces deux espèces y ont trouvé domicile et nourriture en abondance.

M. Gagnon croit, lui aussi, qu’une partie de la solution passe par une certaine libéralisation de la chasse au dindon sauvage qui, si elle est de plus en plus populaire, est trop limitative.

Message à la prudence

Sur sa page Facebook, la municipalité de Sainte-Rose-de-Watford indiquait, il y a quelques jours à peine, qu’elle faisait face à une problématique d’infestation de dindons sauvages, surtout le secteur de la Station, tout en rappelant aux citoyens l’importance de faire preuve de prudence.

« Cette espèce d’oiseaux peut être dangereuse et imprévisible. Les dindons causent de nombreux dommages à vos terrains et propriétés et peuvent même causer des accidents de la route. Nous demandons à toutes les personnes qui ont des mangeoires pour oiseaux de les retirer ou de ne plus les remplir. De plus, nous vous rappelons qu’il est interdit de nourrir les dindons avec toute sorte de nourriture », indiquait la municipalité qui dit avoir lancé des démarches, auprès du ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs, afin de trouver une solution au problème.