40 ans de l’AQLPA: André Bélisle raconte sa quête environnementale

FRAMPTON. Le 23 juillet 2022, l’Association de lutte contre les pluies acides (devenue par la suite l’Association de lutte contre la pollution atmosphérique) fêtait son 40e anniversaire de fondation. Homme de tous les combats environnementaux qui ont fait de l’AQLPA une référence nord-américaine en la matière, André Bélisle lance, un an plus tard, le premier de deux ouvrages autobiographiques retraçant 40 années de lutte environnementale, dont il est l’un des principaux acteurs au Québec.

Sous le titre « Sur les ailes de l’aigle – 40 ans de lutte environnementale », cet ouvrage en deux tomes est rédigé en collaboration avec son ami et ancien journaliste Philippe Bélisle (aucun lien de parenté avec l’écologiste).

« Lors du 30e de l’AQLPA, j’avais publié un document assez complet qui relatait l’histoire de l’organisation. Plusieurs m’ont dit que c’était très aride et c’est resté en plan jusqu’au moment où Philippe, qui travaillait avec nous, a proposé de reprendre celui-ci et de produire un nouvel écrit, plus vivant et complet, des combats et dossiers que nous avons menés au fil des ans. Si je suis le personnage central du livre, on n’oublie pas toutes les personnes qui ont œuvré avec nous au sein de l’AQLPA », mentionne l’écologiste de 69 ans rencontré récemment chez lui à Frampton.

En entrée du Tome 1, lancé il y a quelques jours à Montréal et qui fera l’objet d’un autre lancement à Québec le 1er novembre prochain, André Bélisle rappelle que rien ne le destinait à devenir écologiste, lui qui au début des années 1980 était un « simple gars de chantier ».

« À la fin des années 1970 et au début des années 1980, on savait qu’il y avait des problèmes dans les lacs. J’allais pêcher aux endroits que je fréquentais dans mon enfance et on me disait qu’il n’y avait plus de poissons. Après bien des recherches, j’ai découvert un problème qu’à peu près personne ne connaissait au Québec, à part quelques chercheurs et enseignants universitaires, soit celui des pluies acides. Personne n’en parlait et mon idée était de créer un groupe d’éducation populaire dans le but de mobiliser les gens autour de cette problématique, puis de trouver des solutions à celle-ci », rappelle-t-il en mentionnant que c’est ainsi que le gars la construction est devenu écologiste.

Le duo travaille sur ce projet en continu depuis 2012, mais plus intensément au cours des six dernières années. « Tout est vérifié et contre-vérifié, tout ce qu’on y retrouve est inattaquable », précise André Bélisle en mentionnant que le tome 1, tiré à 5 000 exemplaires, sera suivi du tome 2 qui sera publié au printemps, aux Éditions Somme Toute.

Plus tranquille pour le moment

Après 20 années à Saint-Léon, l’AQLPA est un peu moins présente depuis quelques années, surtout depuis la pandémie qui a forcé le déménagement du bureau de l’organisme dans la résidence du couple dans le rang 7, à Frampton.

« On tient le fort, mais après 40 ans, je suis prêt à laisser la place à d’autres, car je vogue allègrement vers mes 70 ans. C’est assez tranquille et nous sommes en phase de questionnement pour l’avenir. On souhaite avoir de la relève », indique M. Bélisle.

Devoir de mémoire

André Bélisle rappelle que tout comme avec son rapport du 30e anniversaire, ce nouvel ouvrage se veut un devoir de mémoire qui était plus que nécessaire.

« Nous formions une belle équipe qui a travaillé fort pendant 40 ans et malheureusement, tout le monde oublie un peu le nom de l’AQLPA, même si plein de monde a contribué. Nous en avons livré des combats et nous avons eu de très bons résultats », mentionne-t-il en déplorant toutefois qu’après les succès enregistrés dans les années 1980 et 1990, le mouvement environnemental a un peu perdu ses repères au cours des 20 dernières années.

Conjointe de M. Bélisle et bras droit de ce dernier depuis le milieu des années 1980, Jocelyne Lachapelle rappelle que l’AQLPA a mis en place une panoplie de projets et programmes qui ont fait de l’AQLPA un chef de file.

Après la caravane sur les pluies acides en 1984, des programmes comme Faites de l’air sur le recyclage des vieilles voitures ou encore Changez d’air, qui a permis aux gens de changer leurs poêles à bois pour des systèmes plus performants et moins polluants, ont propulsé l’organisme à l’avant-plan du mouvement écologique au Québec.

Cela sans oublier le programme Un air d’avenir dont les deux intervenants se disent fiers et qui avait permis à l’organisme de remporter un prix Phénix pour l’environnement. Celui-ci a conduit à la mise en place d’un véritable programme d’inspection des véhicules, notamment en ce qui a trait aux émanations polluantes.

« On avait pour objectif de recycler 5 000 véhicules par année, on était rendus à 20 000 dès la 2e année. Le monde en voulait, nous étions les meilleurs au Canada pour le temps de réponse et le service à la clientèle », précise M. Bélisle. Ce sujet sera développé davantage dans le Tome 2, tout comme la récente bataille contre Volkswagen qui avait modifié ses systèmes antipollution.

« L’AQLPA a remporté toutes ses batailles, même si notre organisme a payé le prix fort par moments comme ce fut le cas de la poursuite intentée contre nous par AIM Québec, qui a débouché sur l’adoption de la loi anti-bâillon contre les poursuites abusives », rappelle-t-il également.

Un mouvement écologique qui a changé

Si le Québec et le Canada étaient de véritables chefs de file jusque dans les années 1990 en matière d’environnement, la situation a beaucoup changé depuis ce temps, selon André Bélisle qui croit que cela peut en partie s’expliquer par un certain manque d’efficacité du mouvement environnemental qui, mentionne-t-il, « est devenu comme une mode où les gens embarquent un peu de façon éphémère, parce que c’était hot. »

« Certains ont embarqué, d’autres ont débarqué dans les années 2000. D’autres y ont vu une possibilité de développement de carrière et c’était correct, mais quand ça tombait dans le giron politique et ce que j’appelle le « fan club des ministres », ça devenait un obstacle. Quand on voit des actions de groupes écolos teintées de partisanerie politique ou personnelle, c’est la cause qui avance moins et tout le monde en souffre », affirme-t-il en ajoutant que s’il n’y aura jamais assez de groupes écologistes, on voit trop de groupes qui dépendent du financement des gouvernements, ce qui les empêche de conserver leur indépendance.

« Chaque fois qu’on avait décidé de régler un problème, cela a permis d’accroître nos connaissances collectives et a surtout été un plus pour notre économie, car on a fait travailler du monde. C’est faux de dire que nous ne sommes que des flyés, car quand tu règles des problèmes, tu améliores la qualité de vie des gens, tu fais travailler du monde et ça fait rouler l’économie, tout en protégeant l’environnement », mentionne-t-il en terminant.