Des employés de compagnies aériennes témoignent de leur situation
AVIATION. Le domaine de l’aviation, comme bien d’autres, est touché durement depuis le début de la pandémie, les pertes d’emploi se comptant par milliers au sein des compagnies aériennes qui espèrent toujours un soutien des gouvernements.
Quelques employés de lignes aériennes, qui sont originaires ou vivent dans la région, ont accepté de partager ce qu’ils vivent, eux qui ont perdu leur emploi au printemps 2020 et souhaitent, tout comme leurs employeurs respectifs, un retour à la normale le plus rapidement possible.
Directeur de bord chez Air Canada, Louis Mercier de Sainte-Sabine est sans emploi depuis avril 2020. « Je suis revenu de Tokyo le 25 mars et dès le lendemain, je venais à mon chalet de Sainte-Sabine pour passer deux semaines de vacances et faire ma quarantaine. Je suis encore ici 10 mois plus tard », souligne-t-il en ajoutant qu’il a bénéficié, comme bien de ses collègues, de la subvention salariale et de la PCU avant de devoir se tourner vers l’assurance-emploi.
S’il ne sait pas quand il reprendra le boulot, Louis Mercier mentionne qu’il se porte bien et profite de chacune de ses journées en pleine nature. « Je fais un peu de bénévolat et je suis proche aidant auprès de mes parents et d’une de mes tantes qui vivent au Belvédère du Lac. J’ai passé un été extraordinaire à profiter du site, ici dans le rang Ste-Marie, à me baigner et jardiner. Je suis en pleine nature, j’ai des amis et de la famille qui viennent me voir à l’occasion. Il y en a des pires que moi », mentionne-t-il.
« Même si je suis sur le chômage, je ne suis pas à plaindre. Je mange trois fois par jour, je paie mes factures ainsi que mon logement à Montréal, car on ne sait jamais quand on sera rappelés. Même si cela fait 12 mois que l’on vit dans l’incertitude, je demeure résolument optimiste », poursuit celui qui a amorcé sa carrière dans l’aviation en tant qu’agent de bord, il y a près de 30 ans.
Âgé de 57 ans, Louis ajoute qu’en temps normal, il lui reste six années de travail avant de profiter de sa retraite qui est, dans les faits, retardée d’une année. Il n’envisage pas, pour le moment, une réorientation de carrière.
« On a peut-être été mis à pied, mais la compagnie a jusqu’à cinq ans pour nous rappeler. Comme j’ai 19 ans d’ancienneté, je sais que je serai dans les premiers rappelé, car ceux qui volent présentement sont ceux qui ont plus de 25 ans de service. Si j’avais 40 ans, je pourrais envisager une réorientation de carrière, mais plus maintenant. Si jamais je devais me trouver un autre emploi, l’employeur saura que ce sera temporaire en attendant un rappel. »
Travailler dans un Jean Coutu
Originaire de Lac-Etchemin et résidente de Saints-Anges, en Beauce, Isabelle Grenon-Ouellet vit elle aussi dans l’attente d’une reprise des activités dans le domaine de l’aviation, elle qui est agente de bord chez Air Canada depuis une dizaine d’années. Cette dernière, comme des milliers d’agents de bord au cours de la dernière année, a perdu son emploi en avril 2020, en raison de la pandémie de COVID-19.
« J’ai utilisé deux semaines de congés de maladie à la fin mars. Comme bien d’autres, j’ai bénéficié de la subvention salariale pendant deux mois et en juin, puis je suis tombée sur la PCU. C’est alors que je me suis trouvé un emploi à temps partiel comme technicienne en laboratoire à la pharmacie Jean Coutu de Sainte-Marie », souligne-t-elle.
« Mon conjoint n’a jamais cessé de travailler et dès que mon fils s’est mis à fréquenter le camp de jour en juillet, j’ai commencé à travailler 40 heures par semaine. Je ne me voyais pas rester à la maison à ne rien faire, il fallait que je m’occupe », poursuit Isabelle qui ajoute qu’elle entend y demeurer jusqu’à son rappel par Air Canada, sans toutefois savoir quand ce sera le cas.
« Pour le moment, nous devons attendre, on n’a pas le choix. Je demeure positive malgré tout, car j’ai bon espoir que tout cela aura une fin. En attendant, je me tiens occupée. »
Agente de sécurité
Agente de bord depuis 11 ans, Karine Nadeau a passé une bonne partie de l’été dans la région, d’où sa famille est originaire. Après son dernier vol en provenance de Cancún le 15 mars dernier, elle a dû su s’astreindre à une quarantaine préventive, car trois de ses collègues avaient testé positif à la COVID. Elle n’a toutefois pas été atteinte de la maladie, heureusement. Si elle a toujours espoir de retourner à son métier d’agent de bord, elle a dû réorienter sa carrière, devenant agente de sécurité pour un CISSS de la région de Montréal.
« Quand mon contrat d’agent de sécurité s’est terminé en juillet, je suis venue chez mes parents, à Saint-Luc, où j’ai passé une grande partie de l’été, car il n’y avait rien à faire en ville. En octobre, j’ai repris mon emploi d’agent de sécurité et j’ai renouvelé ma demande de permis temporaire, car il y a une demande dans le domaine. Comme au printemps, on donne un coup de main dans les résidences de personnes âgées », mentionne-t-elle en ajoutant qu’il est important de se réinventer dans un contexte comme celui que nous vivons.
De pilote à employé de la construction
Natif de Lac-Etchemin et pilote d’avion depuis 26 ans, Mario Roy n’a pas volé depuis le 26 mars 2020, son dernier vol en tant que commandant ayant eu lieu le 26 mars dernier, lui aussi au retour de Cancún au Mexique. « Une agente de bord a eu des symptômes sur le vol de retour, alors j’ai dû me mettre en quarantaine pendant deux semaines et je n’ai pas volé depuis ce temps », mentionne celui qui était basé à Toronto. D’ici à son retour dans une cabine de pilotage, qu’il espère le plus rapide possible, M. Roy est revenu à Montréal, où il travaille depuis quelques mois dans le domaine de la construction.
Il dit être en contact régulier avec des collègues qui, notamment par le biais d’une page Facebook, souhaitent que le gouvernement fédéral soutienne l’industrie aérienne et disent ne comprendre que le Canada soit le seul pays au monde à ne supporter pas cette industrie.
« Présentement, ce sont les Américains et les Mexicains qui transportent nos passagers. Nous autres, ça va être long avant que ça reparte, car la situation financière de nos entreprises est précaire », mentionne-t-il en ajoutant qu’il ne veut pas repartir à zéro, lui qui a plus de 15 000 heures de vol à son actif et avait de très bonnes conditions avant sa perte d’emploi.
« Toutes mes années d’expérience ne seront pas prises en compte si je devais changer de compagnie aérienne. Je suis commandant depuis 11 ans et si je devais travailler ailleurs, je vais devoir recommencer comme copilote, ce qui me trente moins. »