Église de Saint-Louis : une réflexion régionale est lancée

PATRIMOINE. Fermée au public depuis deux ans, l’église de Saint-Louis-de-Gonzague peut-elle être rénovée ou transformée ? Sinon, doit-elle être vendue ?

Ce sujet était au menu d’une journée de réflexion, tenue le vendredi 20 mai dernier dans la localité etcheminoise. Cette activité pilotée par la MRC des Etchemins a réuni 25 personnes, dont de nombreux élus.

Agent de développement local à la MRC des Etchemins, Mathieu Baillargeon souligne que cette rencontre a permis aux participants de découvrir l’unicité de ce bâtiment construit en 1961 après qu’un incendie ait détruit l’ancienne église de Saint-Louis. Le mandat de concevoir celui-ci avait été confié à l’architecte Jean-Marie Roy de Saint-Léon-de-Standon, spécialiste de l’architecture moderne qui a été associé à la construction de nombreuses églises du genre au Québec. Celle de Saint-Louis est toutefois l’une des rares en Chaudière-Appalaches.

« Ce qu’on voulait, c’était de présenter aux élus l’aspect unique de ce bâtiment avec l’aide de deux conférenciers (Marie-Josée Deschênes et Martin Dubois), qui nous ont partagé leur intérêt sur le patrimoine bâti. Ils avaient reçu le mandat de réaliser un carnet de santé ainsi qu’une étude sur le béton et l’ensemble du bâtiment en tant que tel, ce qu’ils ont partagé avec nous », mentionne-t-il en ajoutant que les élus avaient également pu visiter l’entièreté de ce lieu de culte qui est méconnu de nombreux intervenants du milieu et le seul, dans Les Etchemins, à recevoir la cote A du Conseil du patrimoine religieux du Québec.

En après-midi, le directeur général de la paroisse Sainte-Kateri-Tekakwitha, Martin Gauthier a expliqué aux personnes présentes la position de la fabrique régionale sur ce bâtiment. « On sait que le culte ne se fait plus là depuis deux ans. On sait aussi que la municipalité n’embarquera pas là-dedans par elle-même, mais elle s’est dite prête à devenir partenaire d’un éventuel projet régional », ajoute M. Baillargeon.

« Cette église est mal perçue de l’ensemble de la population qui n’est pas nécessairement au fait de sa valeur architecturale et patrimoniale. On a une responsabilité de mise en valeur de notre patrimoine bâti et cela, même si l’église n’a pas été identifiée comme telle jusqu’ici. Ce que nous avons su ce matin, c’est qu’il s’agit d’un bâtiment d’une grande valeur », poursuit-il en précisant que le sujet devrait, comme l’a indiqué le préfet Camil Turmel en après-midi, être discuté lors d’une prochaine séance de travail du conseil des maires.

Un potentiel méconnu

Conférenciers invités de la journée, les architectes Martin Dubois et Marie-Josée Deschênes ont brossé un tableau complet du bâtiment qui,, selon eux, mérite d’être connu et assurément sauvé.

« On a procédé à un audit technique sur le bâtiment en 2020, puis on a fait faire une caractérisation du béton par une entreprise spécialisée et un ingénieur en structure qui nous ont dit que si le béton était de mauvaise qualité, il n’est pas complètement fini ou brisé. C’est une église qui peut être restaurée et comme il n’y a pas de colonne à l’intérieur, c’est facile à transformer », indique Marie-Josée Deschênes, architecte de Saint-Henri.

Auteur d’un livre portant sur l’œuvre de Jean-Marie Roy, Martin Dubois abonde dans le même sens, ajoutant qu’ils avaient profité de cette tribune pour présenter leur intérêt envers l’église de Saint-Louis. « On a parlé d’architecture moderne pour situer les gens sur ce courant qui a marqué le 20e siècle. J’ai parlé de Jean-Marie Roy lui-même et comment cette église s’inscrivait dans son œuvre. On a présenté les caractéristiques du bâtiment et les gens ont découvert qu’il s’agissait d’un bijou d’architecture. Même si celle-ci n’est pas en très bon état pour le moment, elle offre beaucoup de potentiel », mentionne-t-il en rappelant qu’en 1961, la fabrique locale disposait d’un peu moins de 100 000 $ pour reconstruire son église, ce qui était peu en considérant qu’il en coûtait normalement 250 000 $ pour la réalisation d’un tel bâtiment, à l’époque.

Les deux architectes se sont, par ailleurs, dits encouragés par les discussions émanant des élus et intervenants présents. « Ce qui est intéressant, c’est qu’on a entendu plein de points de vue venant autant de la fabrique que de la municipalité et de la MRC. Le fait d’avoir autant de maires présents (9 en tout) c’est novateur. C’est le premier signe d’une vision régionale », d’affirmer Marie-Josée Deschênes.

« On sait que la municipalité de Saint-Louis, seule, n’est pas capable de prendre un tel dossier en charge. Il faut que ça devienne un outil régional. Dans le fond, trois options se présentent à la région : le statu quo que l’on connaît depuis 10 ans, la démolition du bâtiment ou sa transformation. Il faut analyser chaque étape avec attention », précise-t-elle en ajoutant que la démolition du bâtiment devrait, à elle seule, coûter aux alentours de 500 000 $.

Journée positive pour la paroisse

Directeur général de la paroisse Sainte-Kateri-Tekakwitha, propriétaire de l’église de Saint-Louis, Martin Gauthier mentionne lui aussi que l’activité du 20 mai s’inscrivait dans une démarche complète qui s’est amorcée par la réalisation d’un carnet de santé de l’église et sur l’état du béton en tant que tel.

« Ce que l’on souhaite voir, c’est une démarche ou une réflexion régionale sur l’avenir de l’église. On ne pourra pas la garder, c’est certain et on l’a dit plus tôt aujourd’hui, mais si un projet régional devait émaner, on va l’appuyer », précise-t-il en affirmant que si cela ne devait finalement pas être le cas, la mise en vente du bâtiment devra être envisagée.

« Cela a déjà été discuté et réfléchi au sein de la fabrique, mais on a dit qu’on donnait une chance au milieu. On attendait la rencontre d’aujourd’hui pour voir si quelque chose allait sortir et on sait maintenant qu’une réflexion sera lancée. On va attendre que la discussion se fasse au conseil des maires et on va se tenir au courant de ce qui aura été dit avec les autorités de la MRC. »

Avenir des églises

À la suite de certaines rumeurs laissant entendre la fermeture de plusieurs églises dans Les Etchemins, « ce qui est entièrement faux » selon M. Gauthier, ce dernier mentionne que lui et le président de la Paroisse Sainte-Kateri, Gérald Lamontagne, rencontreront sous peu l’ensemble des comités locaux au pour les inviter à réfléchir sur la question.

« Au conseil de fabrique, nous avons établi notre plan immobilier directeur que nous avons acheminé au diocèse et pour lequel nous sommes en attente d’autorisation. Dans les trois prochaines années, nous allons laisser à chacun des milieux l’occasion de réfléchir et voir si c’est possible de trouver d’autres utilisations pour les églises, afin de s’assurer que l’Église catholique ne soit pas la seule à utiliser et supporter ces bâtiments. On utilise celles-ci à raison d’une heure par semaine et on voudrait bien que ces bâtiments, qui font partie du patrimoine de chacune de nos localités, deviennent des centres de villages et soient utilisés pour d’autres activités, ce qui permettra de partager la facture d’entretien. Peu importe le projet, on peut demeurer propriétaire ou être locataires comme c’est le cas actuellement à Saint-Vallier ou La Durantaye », conclut celui qui, le mercredi 18 mai, a été nommé directeur de la paroisse Saint-Benoît-de-Bellechasse, lui qui occupait déjà la même fonction au sein des deux autres paroisses de Bellechasse-Etchemins.