Le tatouage de moins en moins tabou

SOCIÉTÉ. Traditionnellement associé à certains éléments de la société et aux hommes, le tatouage est en voie de devenir une mode autant chez la femme que chez la population en général. Une passion chez plusieurs, un passe-temps pour certains, le tatouage représente de plus en plus un art chez celles et ceux qui le pratiquent.

Louis Robert de Sainte-Justine et Charles Ouellet, communément appelé Charlie, de Sainte-Marie sont deux véritables passionnés. Le premier a débuté il y a près de dix ans tandis que le second a entrepris d’en faire son gagne-pain il y a plus de 30 ans.

«Quand j’étais plus jeune, j’aimais déjà ça sauf que c’était dispendieux et on ne voulait pas nous en faire», raconte Charlie. «J’ai commencé par mes amis, ensuite ce fut les amis de mes amis. Au début je ne pensais pas en faire un métier, c’était pour dépanner sauf que j’ai constaté que ça pouvait être lucratif». Après avoir appris seul au départ, il ajoute que sa passion l’a poussé à entreprendre des études en art. «Je voulais perfectionner mon dessin au niveau des ombres, la lumière et les contrastes. J’ai obtenu mon baccalauréat à l’Université Laval en bout de ligne», ajoute celui qui peut en réaliser jusqu’à une quinzaine par semaine.

Louis Robert dit se situer dans une branche plus graphique du tatouage. Pour lui, l’art et le contact avec les gens sont au cœur de sa démarche. «On entre vraiment dans l’intimité de la personne. Les gens nous racontent leur histoire, leurs secrets. Le côté artistique nous amène aussi à découvrir ce que les gens font. Ma façon de faire vise à créer l’équilibre avec les courbes du corps humain. Ici en Amérique du Nord c’est plus ou moins répandu, mais je connais beaucoup d’artistes européens qui l’utilisent».

Les deux remarquent que les tabous s’effacent de plus en plus autour du tatouage et reçoivent, à cet égard, une clientèle de plus en plus variée. «Les gens veulent investir sur leur corps. J’ai des infirmières, des avocats, plusieurs personnes âgées de 65 à 75 ans, des gens de différentes classes sociales aussi», raconte Charlie. «Beaucoup de professionnels ou des gens d’affaires ont des tatouages maintenant ajoute Louis Robert. C’est sûr que ces gens-là y vont avec des tatouages un peu plus discrets, mais c’est une grosse partie de la clientèle».

De plus en plus de femmes

Charlie se rappelle qu’il y a une quinzaine d’années, le tatouage était presqu’exclusivement réservé aux hommes sauf que maintenant ce sont les femmes qui se font tatouer le plus souvent. Le tatouage est devenu un accessoire au même titre que le bijou pour la femme selon son exemple.

Les deux hommes conviennent qu’il y a toutefois de bons et de mauvais tatoueurs. «Un bon tatoueur sera très à l’écoute de son client et lui fera des suggestions en lien avec ses goûts et sa morphologie, et comment il entend le disposer», indique Charlie.

Louis Robert est d’avis qu’il y a de la méconnaissance chez les gens sur les prérequis pour un tatouage qui conviendra et sur celui ou celle qui le réalisera. «Les règles d’hygiène ne sont pas toujours suivies. La personne qui réalisera le tatouage n’est pas toujours la bonne. Les gens auraient avantage à s’informer davantage avant de faire leur choix.»

Des artistes

À la question où on lui demande s’il est un artiste, Louis Robert répond rapidement que oui. «Il y a beaucoup de gens qui se lancent dans le tatouage pour le côté monétaire. Tout le monde est capable de prendre un dessin, le calquer et le reproduire. Dans mon cas, chacun de mes tatouages est une création unique, inspirée de choses qui existent ou non». Charlie, lui, fait aussi de la peinture dans ses temps libres. «Je suis un artiste dans mon métier. Plutôt que d’avoir un canevas inerte, mon canevas en tatouage est vivant. C’est plus risqué d’œuvrer et de créer en tatouage, car on ne peut recommencer, l’encre étant permanente. Si tu constates sur un tableau que tes ombrages ou tes lumières sont mal disposés, tu peux te reprendre.»

Charlie remarque aussi que les dessins sont plus pensés et évolués qu’à ses débuts. «À l’origine, les gars se faisaient faire un Taz et les filles un Tweety bird. C’était absurde et cliché comme ça. Aujourd’hui, les gens veulent des pièces plus artistiques». Si la démarche peut être complexe, Charlie est l’un de ceux vers qui les gens se dirigent lorsque leur tatouage ne répond pas à leurs attentes. «Il arrive souvent que j’aie à réparer ou corriger un tatouage réalisé par quelqu’un d’autre. C’est là où ma créativité me rend service beaucoup. Trop de personnes s’improvisent tatoueurs aujourd’hui puisque l’équipement est facilement accessible. Par conséquent, plus de personnes se promènent avec des ratés.»

Un festival Kustom Kulture

Louis Robert est à l’origine d’un salon sur le tatouage qui aura lieu à Lévis en août prochain. En compagnie de ses partenaires, il espère présenter une convention de tatouage internationale appelée le qui devrait regrouper à la fois le tatouage, mais aussi la culture Hot Rod des années 50′, jumelée à d’autres thématiques.

Concours de tatouages, séminaires de formation, ateliers et échanges permettront aux tatoueurs de parfaire leur art. Des voitures antiques, des Hot Rods, un marché d’articles d’autrefois, surtout les années 50′, et des spectacles meubleront la programmation qui est toujours en développement. «Ce sera très gros. Nous avons réservé le Centre des congrès de Lévis pour le week-end des 13-14 et 15 août au grand complet. Jusqu’à l’an dernier, rien n’existait au Québec. On s’inspire de ce qui se fait ailleurs à Las Vegas par exemple. Sauf que ce sera plus large qu’une simple rencontre sur le tatouage», raconte Louis Robert qui espère en faire une tradition.