Magasin Coop à Saint-Anselme: des conseillers s’ouvrent

MUNICIPAL. La politique municipale en région est une passion et non une question de revenus. Si les choses se déroulent rondement habituellement, il arrive que certains dossiers soient plus exigeants que d’autres.

Le dossier de l’emplacement d’un futur nouveau magasin Coop à Saint-Anselme fait partie des discussions depuis plusieurs années et est devenu plus incisif au cours des derniers mois. Des conseillers municipaux de la localité ont bien voulu partager leur expérience des dernières semaines, alors qu’une résolution demandant au Comité consultatif d’urbanisme de la municipalité d’étudier le dossier a été adoptée la semaine dernière.

En plus du maire Yves Turgeon, cinq des six conseillers de la localité ont participé à une rencontre jeudi soir dernier où la plupart ont avoué consacrer énormément de temps et d’énergie à ce dossier au cours des dernières semaines. Seul le conseiller André Gagnon, retenu à l’extérieur était absent.

Mis à part le maire Turgeon, tous ont convenu que le sujet était exigeant, que c’était long, mais que plusieurs raisons expliquaient ces délais. Changement d’endroit, taxes municipales, règlementation et négociation ont fait partie des coulisses récemment.

Pour un, le conseiller Marial Morin insiste pour dire que tous les membres du conseil municipal souhaitaient un nouveau magasin. «Nous avons toujours travaillé dans ce sens. La seule chose que nous voulions faire, c’est d’utiliser les terrains qui étaient déjà disponibles. Je suis d’accord que c’est long. Il faut toutefois se rappeler qu’entre la dernière assemblée générale de la coop en mai l’année et l’élection municipale, nous n’avons eu aucune nouvelle de personne. Il n’y avait pas de nouveau projet sur la table. Après l’élection, là ça pressait.»

Nouveau venu au conseil, Dominic Bernier ne s’attendait pas à autant de pression populaire. «Ce n’est pas comme ça que ça devrait se passer. Je voulais m’investir dans ma communauté. Je le savais que c’était un gros dossier. Les gens semblent oublier que c’est du municipal et qu’il y a un processus et des règles à suivre. Nous ne sommes pas à temps plein là-dedans, même si des fois c’est tout comme.»

Beaucoup de choses se sont dites au cours des dernières semaines et pas toujours par des gens bien informés selon lui. «Il y en a qui pensent qu’on ne veut pas d’un autre magasin et qu’on fait possiblement nos affaires à l’extérieur. C’est frustrant d’entendre ça. Je suis membre de la coop depuis 14 ans. J’ai acheté pour plus de 12 000 $ à la coop en 2017. J’ai demeuré pendant 10 ans à Saint-Charles et je faisais mes affaires à Saint-Anselme.»

Le maire Turgeon est toutefois plus nuancé que ses collègues. «Je ne sens pas de pression du tout. La population s’est impliquée et c’est extraordinaire comme mobilisation. Ce n’est pas si complexe que ça. Les gens sont seulement tannés d’attendre. Ils veulent un supermarché et que cela se règle. Il est vrai que c’est une volonté politique que ça prend.»

Plusieurs choses à considérer

De son côté, Réal Audet comprend que le dossier est sur toutes les lèvres et depuis longtemps, mais indique que le conseil a dû composer avec les rebondissements dans le dossier. «Un premier endroit avait été retenu et semblait faire l’unanimité, surtout chez les gens plus âgés. Ce premier projet comprenait deux autres bâtiments, en plus de l’épicerie elle-même. Nous avions dépensé 60 000 $ pour aménager le secteur en le rendant attrayant. On a ajouté une voie pour entrer, les entrées d’eau et les trottoirs qui servent également pour les blocs appartements.»

Les conseillers avouent avoir aussi du mal à comprendre pourquoi le site appartenant en partie à l’homme d’affaires Yvon Dufour n’est plus convenable, malgré la présence du Couche-Tard, alors que la situation existe ailleurs en province. Ils conviennent toutefois que c’est au promoteur du projet à qui revient la décision. «Nous sommes revenus plus tard en faisant une offre au magasin récemment qui stipulait que nous ferions l’acquisition des terrains de M. Dufour. Nous possédons déjà 60 % de l’espace. Nous aurions vendu nous-mêmes tout l’espace à Sobeys, et grâce à la vente des terrains (pour environ 268 000 $), nous aurions pu aider la coopérative avec un crédit de taxe de 10 ans à raison de 26 000 $ par année. La coopérative nous a dit non», ajoute M. Audet.

Pour Dominic Blais, l’idée de construire le futur magasin sur nos terrains du chemin St-Jacques était attractive puisque tout le développement résidentiel se serait greffé autour. «Le fonds terrain de la municipalité a toujours été riche. La construction allait bien et on réussissait à l’autofinancer et acheter des terrains pour le futur à même ce fonds-là. Ça rapportait à la municipalité du même coup. L’épicerie dans le boisé sera attrayante, mais pas autant.»

Il est d’avis que la décision pourrait avoir un impact sur le compte de taxes des citoyens. «Un terrain qui ne se vend pas doit être supporté par la municipalité. Nous avons dû puiser environ 175 000 $ l’an dernier pour le faire. En fin de compte, ce sont des taxes payées par les citoyens dont on parle. Des citoyens de toute la municipalité, pas seulement des clients du magasin Coop.»

Le maire Yves Turgeon conclut toutefois que l’option du boisé était devenue inévitable. «Tout ce que les conseillers expliquent est vrai, sauf qu’ils ne veulent pas aller là. On veut aussi les envoyer où tous les autres commerces ne vont pas. Il y a eu beaucoup d’investissements le long du boulevard Bégin, mais peut-être que notre plan d’urbanisme n’est pas parfait. Nous avons peut-être mal évalué les tendances au niveau commercial», a-t-il partagé avant de quitter pour une autre rencontre.

Des questions et des réponses

Après avoir longtemps hésité, les conseillers ont finalement acquiescé à ce que le boisé puisse devenir une option.  L’engagement d’un autre bâtiment sur le site a fait pencher la balance, indique Dominic Blais. «C’était important pour nous, car il y a des règles à respecter et un aspect taxation là-dedans. Pendant quelques réunions consécutives avec les promoteurs, on nous avait indiqué que les bâtiments seraient construits en même temps. Ça devenait alléchant pour la municipalité parce qu’on comblait l’espace et pour celles et ceux qui seraient déçus qu’on coupe le boisé, on pourrait leur répondre qu’on avait l’assurance de revenus de plus.»

On ne veut pas gaspiller le terrain, ajoute Marial Morin. «C’est tellement difficile d’obtenir des terrains additionnels avec la CPTAQ ou le ministère des Affaires municipales. Ils regardent ce que l’on a fait dans le passé, avec raison.»

Dominic Bernier a rappelé que le conseil avait récemment posé une série de questions aux promoteurs du projet. «Sur les 14 points que nous avions posé des questions, nous avons reçu des réponses il y en a 12 sur lesquels nous étions d’accord. Que Sobeys s’engage à faire du reboisement ailleurs via le Fonds Vert, c’est une très bonne idée, mais nous n’avons jamais exigé ça. Ce sont eux qui l’avaient proposé au départ. L’autre point très important c’est que nous voulions avoir une confirmation écrite et non verbale de la construction du deuxième bâtiment, pour respecter le 15 % d’occupation du terrain, chose que nous avons reçu la veille de la réunion.»