Une expérience marquante pour Roger Comeau

SAINT-MAGLOIRE. Près de 26 800 militaires canadiens ont pris part, entre 1950 et 1953, à la guerre de Corée. Ce conflit, méconnu de plusieurs encore de nos jours, a été déclenché après l’invasion de la Corée du Sud par les forces communistes du nord, alors soutenues par l’Union Soviétique.

Natif d’Armagh et résident de Saint-Magloire, Roger Comeau se souvient trop bien de ce conflit où il a été grièvement blessé par des éclats d’obus au visage lors de son premier séjour en décembre 1951. Aujourd’hui âgé de 90 ans, ce vétéran combattant avait joint l’armée canadienne en janvier 1949. Il y servira pendant 24 ans.

C’est en 1951 que le Bellechassois et les membres de son escadron du Royal 22e Régiment de Valcartier, se rendaient en Corée. Ils devaient auparavant compléter leur entraînement à la base américaine de Fort Lewis, dans l’État de Washington, puis dans une autre base britannique, en terrain montagneux, au Japon. Une fois prêts, les soldats traversaient dans une base temporaire de Pusan, d’où ils étaient transférés vers la capitale, Séoul.

Roger Comeau rappelle que les combats entre les forces alliées et les Nord-Coréens se déroulaient principalement au 38e parallèle, frontière établie à la fin de la Deuxième Guerre mondiale.

L’escadron de M. Comeau était stationné à la montagne 355, lieu qui restera longuement marqué dans la mémoire du soldat qui a été grièvement blessé au visage par des éclats d’obus en décembre 1951. «C’est un endroit que je n’oublierai jamais, car c’est un endroit où plusieurs de mes confrères ont été blessés ou tués», rappelle-t-il avec émotion.

La veille de ce tragique accident, un autre obus avait éclaté dans une tranchée située non de là, tuant un jeune soldat qui avait à peine 17 ans. «Il n’aurait pas dû être là. Il s’était arrangé pour «se vieillir», peu. Tout le monde pensait qu’il en avait 18 (âge minimum légal pour être dans l’armée), mais ce n’était pas le cas», poursuit-il.

Pas peur de la mort

Atteint par un éclat d’obus qui a traversé son visage, Roger Comeau sera transporté dans un hôpital de campagne de Séoul, puis un hôpital du Commonwealth au Japon, où il passera de longues semaines à recouvrer la santé. Si d’autres étaient morts de telles blessures, M. Comeau a miraculeusement survécu, retournant ensuite dans les tranchées coréennes où il demeurera jusqu’à la fin du conflit. «J’ai parlé à ma mère, je lui ai dit de m’aider. Il n’était pas question de mourir là-bas. Je me disais que si j’étais pour quitter ce monde, ce serait au Canada, pas en Corée», mentionne-t-il.

Lorsqu’on lui demande s’il n’avait pas songé à revenir pour de bon au pays avant la fin du conflit, il a sans hésitation ajouté qu’il n’était pas question de laisser ses frères d’armes là-bas, qu’il s’était enrôlé dans l’armée afin de servir et défendre son pays et que, surtout, il n’avait pas peur de la mort.

Il est rentré au pays en 1954, après que les belligérants aient signé un accord de paix. Il est demeuré dans l’armée pendant 24 ans, revenant ensuite à Saint-Magloire où il a notamment opéré, au début des années 1971, un bar et une salle de spectacles connue sous l’appellation de «La grange».

Celui qui était sergent à son départ de l’armée a également servi plusieurs années comme instructeur civil. Homme droit et aimant la discipline, il a été membre de la garde paroissiale de Saint-Magloire pendant de nombreuses années. «Dans son cœur, il sera un militaire toute la vie. Se tenir droit, les gardes à vous et les salut, ça fait partie de son quotidien», conclut Clément Blanchet, proche du soldat qui trouve important que l’on se souvienne d’hommes comme Roger Comeau lorsqu’ils sont toujours vivants.

Combattre dans des conditions exécrables

Lui-même un ancien militaire, Clément Blanchet rappelle que les conditions de guerre, à l’époque de la Guerre de Corée, étaient loin d’être idéales. «Nos valeureux combattants, dont la plupart étaient à peine âgés de 18 ans, œuvraient dans des conditions extrêmes. Vies de tranchées, sans hygiène de base sauf la nuit pour se nettoyer un peu avec de l’eau de pluie, guettant sans cesse l’irruption ennemie pendant des jours, des nuits, des semaines. Et qui dit tranchées dit eau, boue, insectes, humidité et froidure. Quand la température descendait sous le point de congélation et que le pauvre soldat s’était assoupi pendant quelques heures, il devait, à son réveil, utiliser la baïonnette de sa carabine pour dégager ses bottes de l’emprise de la glace», écrit-il dans un court récit remis à LA VOIX DU SUD.