Six mois de prison pour avoir harcelé la transgenre Michelle Blanc sur Twitter

JUSTICE. La célèbre transgenre Michelle Blanc était plus que soulagée quand un juge a condamné celui qui l’a harcelée sur Twitter notamment en raison de son identité sexuelle à six mois de prison et l’a privé de réseaux sociaux pendant trois ans vendredi dernier au palais de justice de Joliette.

«C’est un grand pas en avant pour la justice et pour que cesse enfin la haine sur les médias sociaux», a-t-elle confiée à TC Media, quelques minutes après que le jugement de culpabilité et la sentence soient tombés contre son harceleur au lourd passé criminel, Érick Poulin, 41 ans de Saint-Prosper. En effet, l’accusé cumule plusieurs condamnations pour entraves, voies de fait, menaces et non-respect des conditions de liberté surveillée.

«Crève»

Il y a près de quatre ans, le 6 mai 2013, Érick Poulin a harcelé pendant près de six heures la résidente de Chertsey sur Twitter avec des tweets violents et vulgaires qui lui ont fait craindre pour sa sécurité. À l’époque, il avait une profonde aversion pour les transgenres et, semble-t-il, pour Michelle Blanc en particulier.

«Crève», «Non, tu ne seras pas toujours là, tu te trompes », « Je veux que tu décrisses de l’espace public», sont quelques-uns des tweets parmi la vingtaine envoyés par Érick Poulin à Michelle Blanc sur Twitter ce jour-là. À d’autres personnes, l’accusé a écrit «Il y en a qui joue de la casserole, d’autres de la cocotte-minute».

Le juge Marc Vanasse a relevé dans son jugement que l’accusé faisait alors une allusion claire aux évènements du printemps érable, mais surtout au marathon de Boston où des personnes ont été tuées ou blessées par une bombe artisanale faite avec une cocotte-minute.

Crainte pour sa sécurité

C’est toutefois lorsque l’accusé a mentionné son intention d’aller à sa conférence «pour lui faire part de son point de vue», que Michelle Blanc a décidé de porter plainte à la police parce qu’elle s’est sentie agressée par le comportement de l’accusé et qu’elle a craint pour sa sécurité.

«Si on vous harcèle sur la rue, vous avez toujours la possibilité de rentrer chez vous et de fermer la porte. Si on vous harcèle en ligne, il y a un effet multiplicateur, parce que même chez vous la porte fermée, le harcèlement continue», illustre Michelle Blanc. L’accusé a d’ailleurs admis devant la cour qu’il était parti en croisade contre Michelle Blanc parce qu’elle allait faire une conférence à Saint-Prosper.

Intolérance manifeste

Pour le juge, il est clair que le flot d’insultes, le langage utilisé et « l’intolérance manifeste à l’égard de son statut de transgenre » ont contribué à ce qu’elle se sente harcelée. «C’est sûr que ça me fait sentir mal et je sais que c’est le lot de plusieurs transsexuels», glisse-t-elle à propos de l’intolérance de son harceleur vis-à-vis son identité sexuelle.

La procureure de la poursuite, dans ses représentations sur la sentence, a d’ailleurs qualifié le harcèlement d’Érick Poulin envers Michelle Blanc de «crime haineux dirigé vers son identité sexuelle».

Encore beaucoup de transphobie

«Malheureusement, le Québec est une société extrêmement ouverte, mais, au travers de cette société extrêmement ouverte, il y a encore beaucoup de transphobie. Et ça, c’est une illustration assez éloquente de jusqu’où peut aller la transphobie», déplore Michelle Blanc qui incite les victimes de cyber crimes à dénoncer.

Lors de son procès, tenu à la mi-février, Érick Poulin, qui s’est défendu seul, a témoigné qu’il voulait à l’époque «tomber sur la patate de Michelle Blanc parce qu’il la voyait partout». Il a qualifié Michelle Blanc de « chasseuse » qui avait des armes et que c’est lui qui devait craindre pour sa sécurité. «Pour lui, Mme Blanc avait intérêt à se faire harcelée pour mousser son agenda et il se demandait comment on peut harceler quelqu’un en six heures», a retenu le juge dans son jugement.

Privé de réseaux sociaux

Érick Poulin a aussi été déclaré coupable de non-respect des conditions de liberté surveillée, et de violation d’engagement. En plus de sa peine de six mois, il lui sera interdit de visiter les réseaux sociaux pendant sa probation d’une durée de trois ans. Lors du prononcé de la sentence, il s’est exclamé qu’elle était «exagérée» et que le juge était «en train de signer son arrêt de mort».