Commerces de proximité: Jean-Louis Marceau, le survivant
AFFAIRES. Ayant mis son commerce en vente il y a quelques mois, Jean-Louis Marceau de Saint-Anselme ne se berce pas d’illusions. S’il ne trouve pas de relève, ce sera la fermeture pure et simple du commerce d’ici à l’été, même s’il est le seul à œuvrer dans le domaine de l’électronique dans un rayon de plusieurs kilomètres.
À la tête de l’entreprise Marceau Radio-TV depuis 1976, M. Marceau avoue que maintenir certains services de proximité en région devient difficile, même si le service est peu présent dans la région. Manque de relève, nouvelle technologie et accès à du financement adéquat sont des facteurs qui empêchent une certaine pérennité pour plusieurs.
Aujourd’hui âgé de 73 ans, Jean-Louis Marceau indique avoir mis son commerce en vente en septembre dernier. « Des gens sont venus et se sont informés. Dans deux cas, c’était pour le volet électronique. J’aurais aimé cela, car j’aurais pu leur servir de mentor. Les autres, c’est le bâtiment et l’emplacement qu’ils trouvent avantageux. J’aurais pu vendre ou fermer avant, mais j’aime ça et c’est pourquoi j’ai continué. Mon épouse a été patiente. Elle aurait été prête avant », avoue-t-il.
Il mentionne que son domaine fait face à un manque de relève et que peu de personnes se sont manifestées avec le temps. « À l’époque où un cours se donnait à Charny, je prenais toujours des stagiaires et j’en ai eu plusieurs à mon emploi avec le temps. Ce cours ne se donne plus depuis près de 12 ans. Il faut aussi qu’il y ait de la demande pour qu’un cours du genre se donne », explique-t-il.
Autre élément important qui nuit à la relève d’entreprise selon lui, l’accès au financement pour les jeunes entrepreneurs, surtout dans certains domaines. « Les prêteurs sont de plus en plus frileux et exigent des garanties à n’en plus finir. C’est pourquoi aujourd’hui ce sont des regroupements et qu’il y a de moins en moins d’ateliers. J’aurais eu un acheteur il y a 15 ans, sauf que l’institution financière aurait voulu avoir sa résidence en garantie, mais son épouse ne voulait pas, et c’est normal. »
Réparer, encore possible
Selon lui, l’obligation prochaine des fabricants à rendre disponibles les pièces pour la réparation de différentes choses, dont l’électronique et les électroménagers, à titre d’exemple, pourrait ramener dans l’esprit des gens que la réparation de plusieurs choses est possible, plutôt que de s’en départir rapidement et les remplacer par du neuf. « On en répare tous les jours. Des gens appellent et s’informent sur la possibilité de le faire, mais beaucoup les classent rapidement dans les serpuariens, alors que si les pièces sont disponibles, on peut réparer. »
Il remarque que même dans certains grands centres, le réflexe de la réparation est peu présent, faute d’alternatives. « Même à Lévis, il y a peu de réparation. C’est peut-être pourquoi aujourd’hui c’est acheter – jeter, ce qui n’est pas l’idéal pour le recyclage. Il y en a un peu qui se fait, mais c’est incroyable tout ce qui se jette. On en ramasse un peu ici, mais c’est nous qui assumons les coûts. C’est comme ça qu’on fait notre part pour l’environnement. »
Bien au fait des nouvelles tendances, M. Marceau comprend que plusieurs font maintenant certains achats en ligne. Pour l’électronique, ce serait toutefois la dernière chose qu’il achèterait. « C’est un phénomène, mais il y a énormément de retours. Ce sont surtout les 18-35 qui commandent de cette façon et ils sont exigeants, alors ils retournent le produit, même si la boîte a été ouverte. Les commerçants n’ont d’autre choix que de le reprendre, rembourser le client et vendre à rabais. Ce n’est pas intéressant. »
Minuit moins une
Jean-Louis Marceau espère toujours avoir l’ocasion de céder son commerce avec son identité actuelle, mais avoue que le temps presse. Il confirme qu’il ne sera plus en opération cet été. « Il y en a des gens intéressés. Nous allons possiblement cesser au printemps, même si nous avons encore un bon roulement et une bonne rentabilité. »
Le commerce avait d’ailleurs pu ouvrir pendant la pandémie en raison de son volet réparation. Certains réflexes ne sont toutefois plus les mêmes. « L’entrepôt était toujours plein avant sauf qu’aujourd’hui, avec une bannière, on peut garder un inventaire plus bas et se rendre plus souvent à l’entrepôt.
Son secret, ne jamais refuser un client, même si la personne n’avait pas acheté son produit sur place. « Le bouche-à-oreille, la promotion que l’on faisait et le reste ont fait que nous avions beaucoup de travail. Nous en avons dépanné des gens et après, généralement ils revenaient acheter ici, parce que nous avions des bons prix de toute façon, plusieurs ne le savaient pas. »
Malgré son âge, Jean-Louis Marceau est toujours demeuré compétent dans son domaine en constante évolution, possiblement en raison de sa passion pour son travail. « Je ne suis jamais venu à reculons. C’est un domaine qui n’est pas pour tout le monde. La formation est nécessaire et se tenir à jour dans les technologies tout aussi important », avoue-t-il.