Motoneige: Chalet Villégiature et Pourvoirie Daaquam annonce sa fermeture
SAINT-JUST-DE-BRETENIÈRES. Le conflit opposant le Syndicat des producteurs de bois de la Côte-du-Sud (SPBCS) à l’Association des producteurs de boisés privés des Appalaches (APBPA) ainsi que le blocus de certains sentiers de motoneige, dans le secteur de Saint-Fabien-de-Panet notamment, pourraient avoir raison de l’une des plus anciennes infrastructures touristiques de ce secteur.
Propriétaire de Chalet Villégiature et Pourvoirie Daaquam, Max Vidal a annoncé sur ses réseaux sociaux, mercredi, que son entreprise cessera ses activités le 31 mars prochain.
« Cette décision difficile résulte, entre autres, de la prise en otage des sentiers de motoneige par certains propriétaires de l’Association forestière (APBPA), et ce, pour la deuxième fois en moins d’un an. Pendant cette période, nous nous engageons à honorer toutes les réservations et à offrir à nos clients la qualité de service qu’ils méritent, comme nous l’avons toujours fait », écrit M. Vidal dans son message.
Lors d’un entretien avec le journal jeudi, M. Vidal a souligné que les dernières années ont été difficiles pour son commerce, comme bien d’autres, en raison de la pandémie, du ralentissement économique, des mauvaises conditions climatiques et du manque de neige, mais également en raison du blocus de certains sentiers par certains producteurs forestiers qui, selon ses dires, ne sont qu’une minorité, mais sont très actifs dans leurs actions. Il rappelle d’ailleurs que 60 % de son chiffre d’affaires provient de ses activités hivernales.
« Il faut que ça arrête. Il y a eu la pandémie, le ralentissement économique, le blocus de certains sentiers l’an dernier et ils nous refont le coup encore cette année. Il n’y a rien qui bouge. C’est du n’importe quoi », a-t-il indiqué.
Dans ce message, il s’en prend à la fois au président de l’APBPA, Raynald Nadeau et à celui du SPBCS, Pierre Lemieux, qui selon lui sont les deux principaux responsables de la situation.
De Raynald Nadeau, président de l’APBPA, il écrit que celui-ci « a démontré un grave manque de clairvoyance et de leadership. Sa gestion de cette situation a non seulement nui aux commerçants locaux, mais aussi nui à sa cause en faisant réaliser aux citoyens avisés les graves conséquences pour les commerce locaux essentiels pour notre région. »
De Pierre Lemieux, président du SPBCS, il ajoute que « ses manœuvres douteuses et son refus d’écouter et prendre en compte une partie significative de ses membres exacerbent les tensions et créent un climat de stress injustifié pour beaucoup. »
Parler pour les autres
Max Vidal souligne qu’il a pris la parole, notamment sur les réseaux sociaux, au nom de tous les commerçants et propriétaires de petits commerces du secteur qui, comme lui, sont touchés par les effets de ce nouveau blocus de sentiers, mais n’osent pas officiellement parler, de peur de représailles, ce qu’il déplore.
« Les petits commerçants sont pris en otage et ils n’osent rien dire. Ils ont la gorge dans le nœud coulant et la corde est tirée. Ces commerçants disent m’appuyer dans mes démarches, mais quand on leur demande s’ils vont faire de quoi de leur côté, ils ne bougent pas de peur de représailles alors que dans les faits, ce sont seulement 5 ou 6 personnes qui sont en train de faire crever tout le monde », poursuit-il avec dépit.
Toujours selon M. Vidal, il était prévisible d’imaginer que la fermeture de sections de sentiers, comme c’est le cas actuellement, allait nuire aux commerçants et aux entreprises touristiques de la région.
« Ces personnes n’en ont rien à faire de la survie du poste à essence ou de l’épicerie locale, ils ne pensent qu’à eux. Le jour où ils devront faire 50 km pour aller mettre de l’essence, ils vont se plaindre en disant qu’il n’y a plus rien dans nos villages, mais ils ne diront pas qu’ils ont contribué à cela par leurs actions. »
M. Vidal rappelle que la saison dernière, une fermeture partielle de sentiers dans le même secteur, sur une période de 10 jours, avait été organisée par ces même propriétaires de boisés et que cela avait eu des effets négatifs sur ses activités et celles de bien d’autres commerces.
« Ils ont essayé la même chose l’an passé et cela a scrappé notre reste de saison qui était la pire de notre histoire au niveau de la fréquentation. Cet hiver est aussi pire que celui de l’an dernier côté neige et température et en plus, ils nous ont coupé des sentiers comme l’an passé. L’an passé, plusieurs motoneigistes ont annulé leurs réservations et sont allés ailleurs. Ça ne peut plus durer, il faut qu’il se passe quelque chose et que l’on règle cela de façon définitive. »
Fermeture définitive ?
Ce n’est pas de gaité de cœur que M. Vidal a annoncé la fermeture de son commerce. Y a-t-il une chance qu’il revienne sur sa décision si les sentiers devaient rouvrir rapidement ?
« Si c’est le cas, on va pouvoir respirer et recommencer à travailler. L’objectif derrière mon message, c’est qu’on nous laisse travailler tranquille et faire nos affaires. Je ne connais pas l’avenir, mais ce que je sais, c’est que c’est inconcevable de continuer dans de telles circonstances. Il faut que ça change tout de suite, pas dans deux mois. J’ai fait ce message dans l’espoir que ça fasse débloquer des choses. Des gens intelligents, quand ils vont le voir et le lire, vont se dire qu’il faut que ça arrête. À l’heure actuelle, personne n’ose parler, tout le monde veut protéger son petit cousin, son petit machin, mais le jour où il n’y aura plus de commerce, ces personnes-là vont chialer. Ce n’est pas le temps de tuer le peu d’économie qui nous reste. Le véritable enjeu est là, ils sont en train de tuer leurs milieux respectifs et leur économie locale. »
Pas contre les revendications de l’APBPA
Propriétaire de boisé privé lui-même, Max Vidal dit appuyer les revendications des membres de l’APBPA qui, selon lui, « ont raison de chialer après le syndicat ». Il ne croit toutefois pas que le blocus des sentiers est une solution efficace.
« Si j’étais président de l’Association, est-ce que j’aurais pris l’économie en otage ? Jamais dans 100 ans. J’aurais pris tous les moyens autour du syndicat et ça ne serait pas passé comme cela. Nous avons des gens qui manquent de courage et qui ont décidé de s’en prendre à la seule chose qui était facile à faire pour eux, soit de s’en prendre à leur économie locale en pensant que les députés allaient bouger, ce qui est grave. Les producteurs forestiers ne sont pas contents de cela et je peux les comprendre, mais tu ne peux pas prendre du monde en otage comme cela pour avoir gain de cause. »
Des gestes de trop
Lors de son entretien avec le journal, Max Vidal souligne qu’en plus d’avoir fermé des sentiers du côté de Saint-Fabien, les propriétaires forestiers concernés cherchent à bloquer d’autres sentiers pour, selon lui, « emmerder » le plus de gens possible.
« Ils ont coupé des arbres sur des sentiers passant sur des terres de la couronne, coupé des arbres sur des terrains de propriétaires privés qui n’avaient pas donné leur autorisation et même creusé un fossé dans un sentier sur un terrain d’un voisin qui n’avait pas donné la permission de le faire non plus. La police est intervenue et le gars a dû reboucher ce trou, car c’était dangereux. Un motoneigiste aurait pu tomber dans le trou et se blesser gravement ou même en mourir. Ça va vraiment loin et on voit que l’intelligence n’est plus au rendez-vous. Ces gens-là veulent gagner coûte que coûte et font ce qu’il y a le plus facile. Au lieu d’aller manifester leur mécontentement devant le syndicat et faire ce qu’il y a à faire, ils s’en prennent aux plus faibles. »
Appui de la municipalité
Max Vidal dit avoir l’appui du maire de Saint-Just et de sa municipalité à qui il a demandé une intervention de la MRC de Montmagny dans ce dossier.
« Si tout le monde se tenait debout et osait parler, on pourrait peut-être sauver quelque chose et ensuite, prendre des décisions pour la suite des choses. Il faut arrêter à tout jamais les prises d’otage de notre économie locale et de notre industrie touristique. J’ai demandé au maire de Saint-Just de prendre des actions pour lancer un mouvement dans l’ensemble de la MRC de Montmagny pour que ça arrête et que l’on empêche la fermeture d’autres commerces. À Saint-Just seulement, on n’a plus de poste à essence et de restaurant. À Saint-Pamphile il y a des fermetures qui s’en viennent aussi et à Saint-Magloire, il n’y a plus de restaurant et de poste à essence depuis longtemps non plus. Chaque fois qu’un truc ferme, cela amène des conséquences comme à Saint-Cyprien où il n’y a plus qu’un poste à essence, ou encore à Sainte-Justine où il n’y a presque plus de restauration. Au rythme où ça va, que va-t-il rester ? Juste des bureaux de poste ? Ces personnes n’ont pas conscience qu’ils sont en train de tuer leur économie locale. »
Max Vidal précise que même si son commerce est relié au sentier 547, la fréquentation était anémique avec sept motoneiges samedi dernier (18 janvier) et aucune dans les jours suivants. Pour ces raisons, il a dû réduire temporairement son personnel en coupant dans les heures.
« Il ne reste que huit semaines à la saison de motoneige, alors l’urgence est là. Chaque fois que quelqu’un aura une crotte, ils vont faire quoi ? Fermer des sentiers de motoneige comme ils le font actuellement ? Cela fait deux fois en 11 mois et si ça n’arrête pas, ce sera encore le cas l’an prochain et ainsi de suite. On est ouvert 7 jours sur 7, 365 jours par année, on veut travailler et s’occuper de nos clients. On ne veut pas que nos commerces meurent. Il n’y a personne qui veut cela. »