Prévention de la criminalité chez les jeunes: un travail de terrain constant
SOCIÉTÉ. Les événements violents impliquant des groupes criminalisés dans la région ont fait largement l’objet de conversations autant chez les jeunes que les adultes au cours des dernières semaines. Autant les corps de police que différentes organisations œuvrant auprès des jeunes surveillent la situation et modulent leurs façons de faire, selon les besoins.
Pour le coordonnateur régional en police communautaire, le sergent Frédéric Boutin, l’arrivée des nouvelles technologies a changé les façons de faire. « La criminalité évolue dans tous les milieux et dans la sphère jeunesse, c’est exponentiel, car ils sont à l’affût des nouvelles tendances. Pour les nouvelles technologies, ce sont les premiers à sauter dessus et ça influence la criminalité. Nos policiers en milieu scolaire sont souvent ceux que nous formons le plus régulièrement pour cette raison. »
Si le terrain peut demeurer un champ d’action pour certains groupes, les réseaux sociaux font aussi partie de leur arsenal maintenant, remarquent aussi Jérôme Baillargeon et Christian Perron du service de Travail de rue dans Bellechasse. « Il y a du recrutement qui se fait sur ces réseaux et heureusement, des intervenants ne font que ça aujourd’hui, surveiller ce qui s’y passe. On les appelle des agents virtuels. Avant, ça se faisait surtout avec le gaming, mais aujourd’hui, c’est sur les Whatsapp, Snapchat et autres plateformes. Derrière le clavier, c’est toutefois difficile de cibler la personne que tu veux », résument-ils.
Un constat que fait également Marjorie Asselin d’Action Jeunesse Côte-Sud qui remarque aussi des changements dans la criminalité chez les jeunes depuis la pandémie. Selon elle, l’intolérance des gens en général est facilement remarquable. « Les crimes de nature sexuelle sont aussi à la hausse et ce n’est pas que du partage de photos intimes. Il y a davantage de crimes de violence chez les filles qu’avant. L’évolution des médias sociaux n’est pas à négliger et les jeunes sont davantage à la recherche de sensations de nos jours. »
Policiers en milieu scolaire
Le travail sur le terrain des différentes organisations jeunesse est aussi en évolution. La Sûreté du Québec a choisi de déployer des policiers intervenants en milieu scolaire (PIMS), depuis quelques années, notamment pour ces raisons.
Coordonnatrice locale en police communautaire au Centre de services de Sainte-Marie, qui regroupe les territoires de Nouvelle-Beauce, Bellechasse, Montmagny et L’Islet, Mélanie Côté a déjà agi en police communautaire sur le territoire de la MRC Beauce-Centre et été policière sur le territoire de la MRC des Etchemins. Elle précise que chaque école a ses réalités, mais le corps policier a des yeux sur le terrain à chaque rentrée scolaire.
« Dès le début, le rôle du PIMS est de s’arrimer avec les directions d’écoles primaires et secondaires, aux adultes et même les écoles privées. Il fait une offre de service à l’école souvent inspirée de sa réalité. À titre d’exemple, l’école secondaire Veilleux à Saint-Joseph a beaucoup de sport-étude, alors les événements qui s’y produisent ne sont pas toujours les mêmes qu’ailleurs. Les écoles Jésus-Marie à Beauceville ou à Saint-Michel ont aussi une réalité bien différente comme écoles privées. »
Elle ajoute que le policier en milieu scolaire s’ajuste aux événements et ajuste ses actions de prévention ou autres selon les événements. « À l’occasion, une école peut dire que pour une certaine thématique, elle juge que ses élèves ne sont pas à risque et il se chargeront eux-mêmes d’assurer certaines choses. Si elle remarque des problématiques d’intimidation, par exemple, elle nous indiquera alors son besoin. »
De nouvelles tendances
Des actions ciblées, individuelles ou par groupe, peuvent toutefois être nécessaires dans certaines situations jeunesse. Des actions comme l’intimidation ou une série de méfaits publics peuvent en faire partie. Mme Côté remarque que les médias sociaux amènent beaucoup de défis à la jeunesse. La sextorsion, le partage de photos intimes, la cryptomonnaie et les fraudes à l’international sont d’autres dossiers sur lesquels les policiers en milieu scolaire se penchent dans leurs fonctions.
Parmi les autres préoccupations d’importance chez les policiers dans les écoles, à l’heure actuelle, on remarque les cigarettes électroniques (waxpen) ayant des taux de THC et qui sont facilement accessibles par internet. « Certains en achètent et en revendent. On a vu des transports en ambulance se faire de jeunes ayant consommé ce type de produit. Nos policiers font des enquêtes sur ce genre de choses. Souvent, les jeunes commandent cela en ligne et en provenance d’une autre province », indique le coordonnateur régional en police communautaire, Frédéric Boutin.
Il ajoute que des constats généraux sont faits par les policiers, mais ils demeurent subjectifs. « La Sûreté du Québec demeure un service d’urgence. On remarque certaines choses, mais notre rôle sera souvent de référer certains cas à nos partenaires qui agiront sur le long terme. C’est un échange de services continuel. »
Ce travail sur le long terme est toutefois tributaire du reste. Surcharge à la Direction de la protection de la jeunesse (DPJ) et retards dans la judiciarisation de certains dossiers sont aussi à considérer. « Nous ne sommes plus dans l’immédiat du geste, alors notre travail n’a pas la même signification. On intervient dans un dossier X, sauf que si le jeune a continué dans sa délinquance, il peut être ailleurs dans son cheminement », déplore Sébastien Bourget d’Action Jeunesse Côte-Sud, qui a pour mandat d’accompagner des jeunes ayant des défis en lien avec la criminalité, les dépendances et la résolution de conflit.
Présent lui aussi dans les écoles, Sébastien Bourget est sensible à la situation actuelle, à la fois comme intervenant jeunesse et comme élu de sa localité. « Nous l’avons cette sensibilité comme élu, intervenant ou même citoyen. La criminalité est souvent le symptôme d’autre chose. Nos jeunes à risque, on les connait, mais tout le monde a la même difficulté, celle d’aller les chercher », résume-t-il.