Quatre conseillers municipaux plutôt que six ?

Des municipalités pourraient dorénavant faire le choix que leur conseil municipal ne soit composé que de quatre conseillers, plutôt que six à l’heure actuelle. Une nouvelle disposition de la loi régissant les municipalités, effective depuis juin dernier, permet maintenant aux localités de moins de 2 000 habitants d’adopter une telle mesure.

Le président de la Fédération québécoise des municipalités, Jacques Demers, avoue que la chose est passée à peu près inaperçue. « La loi 57 englobe tellement de choses que ce volet-là fait en sorte que personne ne réagit. C’était toutefois une demande de certains de nos membres. Ça devenait problématique, surtout pour des municipalités de quelques centaines de citoyens ».

Il avoue que certains irritants de la loi, bien que modifiés, créaient de la confusion et rendaient le tout complexe. « Quand on demande sept personnes au sein d’un conseil municipal et que certaines d’entre elles sont des entrepreneurs ou ont un commerce et qu’on enlève tout le monde qui n’a pas le droit d’être au conseil, ça diminue le nombre de candidatures potentielles ».

Le chiffre de 2 000 de population ou moins est suffisant aux yeux de M. Demers. « J’imagine que s’il y a des demandes spéciales, on va le revoir. On aurait peut-être même pu penser à 1 000 plus que 2 000. Rendu à ce chiffre, trouver sept personnes qui veulent s’impliquer, la possibilité est assez grande ».

C’est toutefois l’obligation de demander une permission au ministère des Affaires municipales qui agace M. Demers. « On voit que nous sommes une créature du gouvernement provincial. Ils ont toujours le droit de désaveu. Une fois que la ministre l’a mis dans la loi, on risque d’être dans des cas d’espèce. On verra le questionnement qu’ils auront, sauf qu’un conseil qui n’a jamais eu de difficultés à trouver des candidatures et qui demanderait un conseil plus petit soulèverait aussi un questionnement. Ce serait dommage d’annoncer qu’on passe de six à quatre conseillers, puis qu’il y ait une douzaine de candidatures ensuite ».

Réactions mitigées

Préfet de la MRC Beauce-Centre et maire de Saint-Victor, Jonathan V. Bolduc se dit étonné et l’option des regroupements demeure sa préférée. Plus de la moitié des localités de sa MRC ont moins de 2 000 habitants.« On en avait entendu parler, mais je ne savais pas que ça faisait maintenant partie d’une loi. Si c’est une option sur la table et que les gens d’une municipalité font ce choix, grand bien leur fasse, sauf que ce n’est pas mon choix numéro un. Déjà qu’il y a beaucoup de gens apparentés dans nos villages, en diminuant le groupe, ça risque d’avoir des effets pervers. Baisser le nombre de conseillers, si tu n’as pas la bonne gang, c’est long quatre ans ».

Selon lui, le fait d’avoir amélioré les apparences de conflits d’intérêts aura pour effet de ramener des gens déjà impliqués dans leur milieu. « Il faut convaincre des gens ayant des entreprises et qui s’impliquent, pas seulement des gens à la retraite. J’ai dû faire des choix avec mon autre emploi et mettre des choses en veilleuse pour m’impliquer et parce que j’aime ce que je fais. La nouvelle mouture de cet aspect de la loi aura du positif ».

Selon lui, le principal irritant pour le milieu municipal demeure la lourdeur de l’appareil gouvernemental, jumelé à toutes les exigences toujours en place. « La reddition de compte ne finit plus. On nous parle qu’on est des élus de proximité, mais il faut montrer patte blanche et laver plus blanc que blanc. Certaines personnes ont été blâmées et payées des amendes, en plus de voir leur réputation entachée, tout ça pour des choses plus ou moins graves. On attend toujours la réduction de la paperasse ».

À Armagh dans Bellechasse, au moins quatre élections partielles ont dû être tenues, depuis la dernière élection générale, pour combler des sièges devenus vacants à la suite de départs de conseillers. La mairesse de la localité, Suzie Bernier, indique que sa localité n’a pas l’intention de se prévaloir de cette nouvelle disposition, malgré tout. « Nous en avons discuté, mais avons choisi de demeurer à six pour le quorum et aussi le fait que nous n’avons jamais eu vraiment de problème à recevoir des candidatures », résume-t-elle. Armagh comptait 1 502  résidents, selon les chiffres de 2023.

Jacques Demers ne s’attend pas à ce qu’un grand nombre de localités se prévalent de cette nouvelle disposition. « S’il y a plus d’une dizaine de municipalités qui le demandent, je serai le premier surpris. Pour certaines ce sera un outil intéressant, mais pas au point de susciter des changements dans les façons de faire. »

Sur ce sujet, il ne croit pas non plus que cette nouvelle disposition de la loi ralentisse des processus de fusions déjà en marche. « Les fusions deviennent nécessaires surtout d’un point de vue administratif. Ce qui est difficile, c’est surtout de trouver une bonne direction générale que des gens intéressés à s’impliquer au sein d’un conseil ».