Sainte-Claire: Kerry perd une ligne de produits

ENTREPRISE. La difficulté d’obtenir de l’eau en quantité suffisante a un impact négatif chez Kerry de Sainte-Claire, alors qu’une ligne de produit sera déménagée à Savannah en Georgie à la fin de l’année.

Le directeur de la production pour l’Amérique, André Amyot, confirme que les retards dans l’évolution du dossier de l’eau sont en cause. «Il faut ajouter le fait qu’on a s’est fait couper à quelques reprises dans les dernières semaines, alors cette insécurité a amené la direction à faire ce choix.»

Jimmy Chabot, directeur de l’usine

Directeur de l’usine de Sainte-Claire, Jimmy Chabot, évoque aussi des défis à l’interne pour expliquer la chose. «Dans le dernier mois, nous avons eu des difficultés à avoir de l’eau en quantité suffisante et ça nous a forcé de demander de l’eau à une municipalité voisine (Saint-Anselme) pour être opérationnel à un certain pourcentage. Un autre défi avec lequel on doit composer est celui des vacances et un certain nombre d’absentéisme, possiblement dû au beau temps et à l’intensité des derniers mois.»

Il évalue la perte de production à environ 8 % de la capacité de l’usine. «Cela nous empêche d’optimiser une ligne de production, alors que l’objectif est de l’opérer le plus possible», précise M. Chabot, ajoutant qu’il n’y aura pas de perte d’emplois pour le moment, sauf que le recrutement sera moins nécessaire.

L’enjeu, l’eau

Les canicules des dernières semaines, jumelées à la rareté de l’eau potable sont un casse-tête autant pour la municipalité que chez Kerry, puisque l’eau est la matière première de l’entreprise, rappelle M. Chabot. «Nos besoins se situent généralement à 1 350 mètres-cubes d’eau, sauf que nous ne pouvons entrer de nouveaux volumes et optimiser davantage nos installations. Après les épisodes de mai, on nous a demandé de baisser notre demande d’eau à 1 200 mètres-cubes, sauf que notre volume ne baisse pas. On nous invite maintenant à essayer de maintenir nos volumes à 1 100 mètres-cubes. Si on doit baisser chaque fois qu’on se parle, ça ne fonctionne plus.»

Denise Dulac est mairesse de Sainte-Claire.

Rappelons que l’entreprise Kerry cherche depuis plus d’un an à obtenir davantage d’eau potable de la municipalité dans le but de sécuriser sa production et supporter à la fois sa croissance et son développement futur. La municipalité de Sainte-Claire s’est toutefois tournée vers le gouvernement du Québec pour répondre à cette demande. L’eau étant toutefois de compétence municipale, Québec étudie différentes solutions, sauf que les réponses tardent et les émotions de plus en plus vives chez les intervenants au dossier.

La mairesse de Sainte-Claire, Denise Dulac, convient que l’eau est une responsabilité municipale qui implique l’obligation de fournir de l’eau aux usagers, sauf que la part de l’entreprise à ce chapitre est très élevée. «Ce ne sont pas toutes les localités qui ont un citoyen corporatif qui consomme 60 % de l’eau. Si nous avons l’obligation d’augmenter notre capacité, c’est en raison de Kerry.»

Elle ajoute toutefois qu’elle misait sur une aide gouvernementale pour faire avancer le dossier. «On devait avoir une réponse du gouvernement avant le 30 juin, soit il y a plus de deux semaines. On attend toujours une réponse, qu’elle soit négative ou positive. Peut-être que ça donne rien d’attendre puisque le gouvernement est passif, alors je pense qu’il va falloir cheminer tout seul là-dedans».

André Amyot est vice-président aux opérations de Kerry

André Amyot avoue avoir bien hâte de savoir sur quel pied danser. Il ajoute toutefois trouver particulier qu’il n’y ait pas de résolution de la municipalité pour demander officiellement de l’aide au gouvernement du Québec. «Il n’y a pas de résolution de la municipalité chiffrant ses demandes. Ce serait le fun qu’ils en fassent une pour donner du poids au dossier.»

Ayant toujours hésité à se compromettre sur l’étendue d’une implication municipale, Mme Dulac avoue qu’aucune résolution ne vient appuyer les demandes de la localité. «Il y a eu plusieurs rencontres avec des fonctionnaires de quelques ministères. Ils ont demandé des documents pour étayer leur dossier. Il y a du travail qui a été fait et personne ne nous a demandé de résolution. Il arrive qu’on fasse des démarches sans résolution», indique-t-elle.

Un engagement clair

Question de dissiper certains doutes, André Amyot confirme que l’entreprise est prête à s’engager à long terme. «Déménager une usine n’est pas simple. Ce ne sont pas des boîtes à outils, ce sont des lignes de production imposantes. On a investi beaucoup au cours des dernières années, il me semble que c’est une preuve d’engagement. Maintenant, nous avons besoin d’eau pour rentabiliser ces investissements. On est prêts à payer notre eau, comme ça se fait ici, comme ailleurs. On a aussi dit qu’on était prêts à s’engager à long terme.»

Mme Dulac salue cette avancée, une nouveauté à ses yeux, mais s’inquiète du fait que le dossier pourrait encore trainer en longueur. Elle semble maintenant prête à piloter le dossier localement. «On s’est toujours dit que l’on s’assoirait éventuellement pour négocier ce que serait l’engagement de Kerry vis-à-vis ce projet-là. Il semble de plus en plus clair que nous n’aurons pas le choix d’aller en règlement d’emprunt et cela pourrait se traduire par un référendum. Malheureusement, tout cela allonge les processus, puisqu’il faudra obtenir un certificat d’autorisation du ministère de l’Environnement et tout le reste.»