Les transactions de pétrole de la Chine avec la Russie irritent les États-Unis

PÉKIN, Chine — Le soutien de la Chine à la Russie par le biais d’achats de pétrole et de gaz irrite Washington et augmente le risque de représailles américaines, selon des observateurs étrangers. Ils ne voient toutefois aucun signe que Pékin aide Moscou à échapper aux sanctions liées à sa guerre contre l’Ukraine.

L’importance de Pékin en tant que bouée de sauvetage pour le président russe Vladimir Poutine a augmenté lundi après que les 27 pays de l’Union européenne, le principal marché des combustibles fossiles qui fournissent la plupart des revenus étrangers à Moscou, ont accepté d’arrêter les achats de pétrole.

Le gouvernement du président Xi Jinping a déclaré avant l’attaque russe du 24 février qu’il entretenait une amitié «sans limites» avec Moscou et a laissé l’Occident deviner s’il pourrait soutenir le président Vladimir Poutine.

La Chine considère les sanctions comme illégales parce que les États-Unis, l’Europe et le Japon ont coupé la Russie de leurs marchés et du système bancaire mondial sans passer par les Nations Unies, où Pékin et Moscou ont un droit de veto.

Les sanctions n’interdisent pas à la Chine, à l’Inde ou à d’autres pays d’acheter du pétrole et du gaz russes. Mais le président Joe Biden a averti Xi Jinping des conséquences non précisées si Pékin aidait Moscou à échapper aux sanctions. Cela laisse ouvert le risque que des entreprises chinoises soient punies en perdant l’accès aux précieux marchés occidentaux.

Pékin semble s’y conformer, mais des entreprises publiques achètent davantage de pétrole et de gaz russes, ce qui rapporte au Kremlin des revenus d’exportation. Ils sont également des investisseurs potentiels dans des projets énergétiques russes alors que les entreprises occidentales quittent le pays. 

«L’administration Biden deviendra probablement de plus en plus exaspérée par le soutien continu de la Chine à la Russie», a déclaré dans un courriel Neil Thomas d’Eurasia Group, un cabinet de conseil en risques politiques. 

Cela augmente la probabilité de «mesures unilatérales pour punir Pékin» et de «coordination alliée sur des mesures de sécurité économiques visant à contrer la Chine», a déclaré M. Thomas.

Le conflit ajoute à la tension avec Washington sur Taiwan, Hong Kong, les droits de l’homme, le commerce, la technologie et les ambitions stratégiques de Pékin.

La Chine représente «le défi le plus sérieux à long terme pour l’ordre international», a déclaré le secrétaire d’État Antony Blinken dans un discours du 26 mai.

Le gouvernement de Xi Jinping a tenté de se distancer de la guerre de Vladimir Poutine en appelant à des pourparlers de paix, mais il évite de critiquer Moscou.

Les autres gouvernements «ne doivent en aucun cas nuire aux intérêts légitimes de la Chine» dans leurs relations avec l’Ukraine, a averti un porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Zhao Lijian.

La décision de lundi des dirigeants européens réduira les importations de pétrole russe de 90%, selon la chef de son exécutif, Ursula von der Leyen. Les clients européens ont payé à la Russie jusqu’à un milliard $ par jour pour le pétrole, le gaz et le charbon.

Mikhail Ulyanov, représentant permanent de la Russie auprès des organisations internationales à Vienne, a répondu sur Twitter : «La Russie trouvera d’autres importateurs».

Moscou n’est qu’un petit partenaire commercial pour Pékin, mais un allié contre ce que tous deux considèrent comme une domination américaine dans les affaires mondiales. 

La Chine voit dans le pétrole et le gaz russes un moyen de diversifier les approvisionnements de son économie gourmande en énergie. La Chine a acheté 20% des exportations russes de pétrole l’an dernier, selon l’Agence internationale de l’énergie. Les deux parties ont annoncé un nouveau contrat gazier de 30 ans le 4 février, trois semaines avant l’attaque de Moscou contre l’Ukraine, qui, selon le journal d’État Global Times, augmentera les approvisionnements annuels vers la Chine d’environ 25 %.

La Chine profite de la situation pour obtenir une énergie moins chère et des accords commerciaux favorables, a déclaré Maria Shagina de l’Institut international d’études stratégiques.

Le 24 mai, alors que le président Biden se rendait à Tokyo, des avions de guerre russes et chinois ont effectué des «patrouilles aériennes stratégiques» au-dessus de la mer du Japon, de la mer de Chine orientale et du Pacifique occidental. Le gouvernement japonais a déclaré que des avions de bombardement avaient volé près du Japon.

M. Biden a averti Xi Jinping lors d’une réunion vidéo le 18 mars de ne pas apporter d’aide militaire ou économique à Moscou.

Le conseiller à la sécurité nationale de Biden, Jake Sullivan, a déclaré en mars que Washington ne tolérerait pas que la Chine ou tout autre pays aide Moscou à contourner les sanctions. La Maison-Blanche a critiqué le «soutien rhétorique» de Pékin à Vladimir Poutine.

Washington «surveille de près» les relations chinoises avec Moscou, a indiqué l’ambassade américaine dans une réponse écrite aux questions.

Après que les sociétés BP et ExxonMobil ont annoncé qu’ils se retiraient des projets pétroliers et gaziers russes, «il y a eu des rumeurs selon lesquelles des entreprises publiques chinoises pourraient intervenir et acquérir des participations», a déclaré Mme Shagina.nir et acquérir des participations», a déclaré Mme Shagina.

Les importations chinoises en provenance de Russie ont augmenté de 56,6 % par rapport à un an plus tôt, en avril, pour atteindre 8,9 milliards $, selon des données douanières. Cela a aidé le gouvernement de Vladimir Poutine d’enregistrer un excédent de la balance courante, la mesure la plus large du commerce, de 96 milliards $ pour les quatre mois se terminant en avril.

Washington est également frustré que l’Inde, le troisième importateur mondial de pétrole, achète davantage à la Russie pour profiter des bas prix. L’administration Biden fait pression sur le gouvernement du premier ministre de l’Inde Narendra Modi pour qu’il arrête.

En mars, le gouvernement américain a déclaré à ses alliés asiatiques et européens que ses services de renseignement avaient déterminé que la Chine avait indiqué à la Russie qu’elle serait disposée à fournir un soutien militaire pour la mission en Ukraine et une aide financière pour limiter l’impact des sanctions.

La Russie a été expulsée du réseau mondial SWIFT pour les virements bancaires.

Le processeur de cartes de crédit chinois, UnionPay, a refusé de travailler avec les banques russes après que Visa et MasterCard ont cessé de les servir, a rapporté le média russe RBC en avril. Il a déclaré qu’UnionPay craignait d’être frappé par des «sanctions secondaires» et coupé du système financier mondial contrôlé par l’Occident.

Ce n’est pas la première fois que la Chine aide économiquement Moscou. Elle lui avait donné un coup de main à la suite des sanctions occidentales imposées pour sa prise de la Crimée en 2014 par l’Ukraine.

Pékin avait accepté d’acheter du gaz russe dans le cadre d’un accord estimé à 400 milliards $ sur trois décennies. Moscou s’est tournée vers des entreprises publiques chinoises pour aider à payer le développement du pétrole et du gaz après que les sanctions liées à la Crimée ont interrompu le financement occidental.