Les ministres Fréchette et Roberge lancent Francisation Québec

MONTRÉAL — À compter du 1er juin, quiconque souhaite apprendre ou perfectionner sa maîtrise de la langue française devra s’inscrire via le portail Francisation Québec, le nouveau point de service unique du gouvernement pour coordonner tous les services d’apprentissage de la langue de Molière.

La ministre de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration, Christine Fréchette, et son collègue responsable de la Langue française, Jean-François Roberge, ont procédé au lancement de la plateforme lundi matin.

Ce faisant, tous les services d’apprentissage du français, que ce soit pour les nouveaux arrivants, les futurs immigrants qui souhaitent se franciser en vue de leur arrivée, les travailleurs et les résidants du Québec qui ne parlent pas français, seront gérés par le nouveau service, qui a été élaboré au cours de la dernière année pour répondre au nouveau droit créé par la loi 96, soit celui de pouvoir avoir accès gratuitement à des services de francisation.

Le tout se déploiera en différentes phases, a souligné la ministre Fréchette, et ce, afin de simplifier le processus, d’harmoniser les services offerts et d’améliorer le service à la clientèle. 

«On va y aller de manière progressive. Les programmes et services suivront tous la même logique pour assurer une amélioration en continu», a fait savoir la ministre Fréchette, qui a précisé lors de la période de questions que de nombreux tests avaient été faits en amont pour s’assurer de la capacité de la plateforme et de se prémunir contre des cyberattaques.

Mme Fréchette a aussi lancé lundi le Programme québécois d’apprentissage du français (PQAF), qui remplacera le Programme d’intégration linguistique des immigrants (PILI) et le Programme d’aide financière pour l’intégration linguistique des immigrants (PAFILI). Le PQAF vise à offrir gratuitement des cours de francisation aux personnes immigrantes ou en démarche d’immigration au Québec, qui pourront aussi bénéficier d’une aide financière.

Un nouveau programme de soutien à la francisation appuiera les organismes à but non lucratif et les établissements d’enseignement qui développent des initiatives permettant d’améliorer la connaissance du français.

Demande inconnue

Bien qu’ils parlent d’un «engouement» sans précédent pour la francisation, au point de s’attendre à ce que davantage de personnes s’inscrivent aux différents services au cours des prochains mois, les ministres ne disposent pas de cibles ou de projections quant au nombre de candidats à la francisation dans la province.

«Le gouvernement s’adaptera» à la demande et Francisation Québec est en «recrutement continu» d’enseignants pour y répondre, a indiqué Mme Fréchette. Son ministère emploie actuellement 550 professeurs.

«Comme les services de francisation actuels étaient éclatés en raison du grand nombre de partenaires, c’était plus difficile d’obtenir des données sur le nombre de personnes en francisation, a-t-elle expliqué. Avec Francisation Québec, on va regrouper, monitorer et centraliser ces données qui nous donneront un portrait plus précis de la situation.»

En 2021-2022, plus de 37 000 personnes ont pris part à une démarche de francisation, une augmentation de 16 % par rapport à l’année précédente. Pour l’année 2022-2023, la hausse était encore plus marquée, à 25 %, avec un sommet de près de 46 000 inscrits.

Mme Fréchette attribue cette croissance aux investissements de son gouvernement en francisation, qui ont doublé entre 2018 et 2022.

«En 2017, la vérificatrice générale avait dit que l’organisation des services de francisation était un véritable fiasco», a rappelé la ministre.

«Le premier ministre (François Legault) l’a réitéré: nous sommes le gouvernement qui aura pris conscience de la réalité, qui aura nommé le déclin du français et qui aura posé des gestes pour l’inverser», a poursuivi le ministre Roberge.

«C’est un gros défi, les indicateurs sont au rouge pour la langue parlée à la maison, la langue au travail, la langue de consommation, mais comme gouvernement, on a la responsabilité de faciliter l’apprentissage du français et c’est ce qu’on va faire», a-t-il renchéri.

Les services de francisation continueront d’être offerts en ligne ou en présentiel, en milieu de travail ou même dans certains milieux de la petite enfance, à temps plein ou à temps partiel, le tout pour répondre aux besoins du plus grand nombre.

L’opposition salue le geste, mais demeure prudente

Le porte-parole solidaire en matière d’immigration et de francisation, Guillaume Cliche-Rivard, a réagi par déclaration écrite à la création de Francisation Québec.

«La mise en place de Francisation Québec est certainement une bonne nouvelle, mais nous ne pourrons juger de son succès que par les résultats. La priorité doit être mise sur la mise en place de conditions gagnantes pour assurer une francisation réussie en entreprise et il reste à voir dans quelle mesure Francisation Québec réussira à atteindre cet objectif», a souligné le nouveau député de Saint-Henri-Sainte-Anne.

De son côté, le porte-parole libéral Monsef Derraji a tenu à saluer l’initiative, mais ne se fait pas d’illusions.

«Encore une fois, l’annonce du gouvernement caquiste sent l’improvisation à plein nez. Par exemple, la ministre n’a aucune idée du nombre potentiel d’utilisateurs, ne présente aucune cible, ni aucun critère d’évaluation de l’efficacité du système», a déploré par communiqué le député de Nelligan, craignant que Francisation Québec ne donne lieu à d’autres «ratés spectaculaires» comme ceux qu’a connus le lancement de SAAQclic.

«Sans ces éléments connus et en pleine pénurie de main-d’œuvre, il est impossible de prévoir le nombre de professeurs qui sera nécessaire à la réussite du projet. Avec la CAQ, c’est toujours aussi brouillon», a-t-il ajouté.

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Cette dépêche a été rédigée avec l’aide financière de la Bourse de Meta et de La Presse Canadienne pour les nouvelles.