Tuerie en N.-É.: des agents de la GRC liés à un autre dossier qui aurait été mal géré

HALIFAX — Un agent de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) qui a enquêté sur le tireur de masse de 2020 en Nouvelle-Écosse a été lié à la mauvaise gestion présumée d’une affaire de meurtre en 2017 qui fait l’objet d’un examen fédéral.

Greg Wiley fait partie des trois agents nommés dans un examen de la police de 2018 sur les lacunes de la GRC dans l’affaire du meurtre de Susie Butlin. L’enquête sur la tuerie en Nouvelle-Écosse a révélé cette semaine l’identité des agents.

Mme Butlin s’était plainte à la GRC de la Nouvelle-Écosse d’avoir été agressée et harcelée sexuellement par Ernest Ross Duggan, qui l’a finalement tuée en septembre 2017. En août de la même année, M. Wiley a reçu les plaintes de Mme Butlin pour harcèlement et a été nommé enquêteur principal.

Selon le rapport interne de police, l’agent Wiley «a déterminé qu’il n’y avait aucun fondement pour des accusations» et avait conseillé à la dame de bloquer Duggan sur Facebook.

L’enquête sur le meurtre de Mme Butlin fait maintenant l’objet d’une enquête fédérale examinant la réponse de la GRC à ses plaintes et la gestion du corps de police dans les enquêtes sur les agressions sexuelles.

M. Wiley est également le policier à qui l’on a demandé de vérifier si Gabriel Wortman — l’homme qui a assassiné 22 personnes en avril 2020 — avait des armes à feu chez lui à Portapique, en Nouvelle-Écosse, en 2010. À cette époque, Wortman avait menacé de tuer ses parents au Nouveau-Brunswick.

Le 15 juillet, la conjointe de Wortman, Lisa Banfield, a témoigné lors de l’enquête que l’agent Wiley était venu à la résidence de Portapique en juin 2010 pour voir «s’il (Wortman) avait des armes à feu au chalet». La visite de M. Wiley est intervenue après les menaces de Wortman.

Mme Banfield a déclaré que M. Wiley avait vu des armes anciennes dans la maison lors d’une visite qui a duré 10 minutes.

Lors de son entretien l’année dernière avec les avocats de l’enquête publique, M. Wiley n’a pas pu se souvenir des détails de l’enquête de juin 2010. Dans une lettre de suivi, un avocat de la GRC a déclaré que M. Wiley n’avait plus ses notes de cette époque.

L’enquête de juin 2010 sur les menaces de mort présumées que Wortman aurait proférées contre ses parents n’a abouti à aucune accusation.

Rectifier la situation

Le rapport interne de la GRC sur l’affaire Susie Butlin a été initialement soumis à l’enquête sous une forme caviardée qui censurait les noms des agents. Jennifer Cox, avocate de l’enquête publique — connue sous le nom de Commission des pertes massives — a indiqué lundi lors des audiences que la décision de ne pas divulguer les noms des policiers «avait eu une incidence sur notre capacité à faire le travail».

Me Cox a ajouté que l’enquête s’efforcera de rectifier la situation et de «surmonter le fait que nous avons peut-être manqué des occasions d’interroger des témoins lorsqu’ils ont comparu devant la commission».

M. Wiley n’a pas encore témoigné sous serment et il devrait comparaître à une date ultérieure.

Lors de son entretien l’année dernière, M. Wiley a déclaré aux enquêteurs de la commission qu’il entretenait de bons rapports avec Wortman et qu’ils avaient souvent de brèves conversations à la résidence du tueur. M. Wiley a estimé qu’il avait rendu visite à Wortman au terrain de balle à 15 occasions au fil des ans, mais il a dit qu’il n’avait rien remarqué d’inhabituel.

Selon un rapport de police dévoilé par l’enquête en mai, la police de Halifax a mené l’enquête de 2010 sur les menaces de Wortman contre ses parents. L’enquêteur, le sergent Cordell Poirier, maintenant à la retraite, avait qualifié M. Wiley d’«ami» de Wortman. M. Poirier avait déclaré avoir demandé à plusieurs reprises à M. Wiley de se rendre à la résidence Portapique de Wortman pour vérifier les armes à feu et déterminer si un mandat de perquisition était nécessaire.

Sont également nommés dans l’affaire Susie Butlin Stuart Beselt — le premier officier à arriver à Portapique la nuit où le saccage a commencé — et Rodney MacDonald.

Au cours de la première nuit de la fusillade de masse, M. Beselt a demandé qu’une alerte soit envoyée pour avertir les voisins du tueur. On lui a dit que les habitants de la région étaient appelés directement et qu’aucune alerte n’avait été faite. M. Beselt a reçu des éloges pour sa bravoure de la part de la commissaire de la GRC Brenda Lucki.

M. MacDonald a été l’un des premiers intervenants lors de la tuerie, venant volontairement sur les lieux avant son quart de travail prévu après qu’un ami l’a alerté qu’un tireur actif tuait des citoyens. Il a installé sa voiture de police sur un pont près de Portapique pour tenter d’empêcher le tueur — qui, à son insu, avait déjà fui la région — de s’échapper. Il a également participé le lendemain à la chasse au tueur, alors que le déchaînement se poursuivait dans la région de Wentworth.

Rapport interne de 2018

MM. Beselt et MacDonald ont répondu à un appel de la femme de Ernest Ross Duggan — April Duggan — à la police le 21 août 2017, au cours duquel elle a dit qu’elle pensait que «son mari allait tuer (Susie) Butlin», selon le rapport interne de 2018 de la GRC. Le rapport indique que les deux policiers ont localisé Duggan, qui buvait et semblait ivre. Duggan a dit aux deux agents qu’il «ne ferait jamais de mal à personne».

C’est cinq jours plus tard que Mme Butlin a parlé avec M. Wiley du harcèlement continu de Duggan et que l’agent lui a dit qu’il n’y avait aucun fondement pour des accusations.

Le 14 septembre 2017, Mme Butlin a dit au caporal Neil Wentzell qu’elle n’était pas satisfaite de la réponse de la police à ses allégations.

Mme Butlin a été retrouvée morte chez elle le 17 septembre 2017.

Un porte-parole de la Fédération de la police nationale a déclaré dans un communiqué envoyé par courriel qu’une fois l’examen civil fédéral du cas de Mme Butlin publié, la fédération «l’examinera attentivement et de manière critique».

Un porte-parole de la GRC de la Nouvelle-Écosse a écrit dans un courriel qu’elle «s’engage à enquêter sur les plaintes rapidement et de manière approfondie, avec sensibilité et sans parti pris tout en donnant la priorité aux besoins de la victime».

— Avec les informations de Michael Tutton à Halifax.

Cette dépêche a été rédigée avec l’aide financière des Bourses de Meta et de La Presse Canadienne pour les nouvelles