Route 281: un mouvement citoyen prend forme

ARMAGH. L’accident de voiture ayant causé la mort de Dyna Chamberland, 36 ans d’Armagh, semble avoir éveillé des sentiments d’insécurité chez plusieurs qui questionnent l’aspect sécurité de l’endroit où s’est produit l’accident lundi soir dernier, soit la jonction de la route 281 et du 8e rang à Armagh.

Rappelons que la victime revenait de Québec, le lundi 2 mars en début de soirée, où elle s’était rendue afin de déposer ses quatre enfants chez leur père pour la semaine de relâche. Le conducteur d’un camion de l’entreprise Dicom, qui circulait en sens inverse, a dévié de sa voie pour une raison inconnue et a percuté sa voiture de plein fouet, ne lui laissant aucune chance.

Amélie Bouffard, à droite, tient à faire sa part dans les démarches actuellement en cours. Elle est appuyée de sa mère Nathalie Bélanger dans ses initiatives.

Citoyenne de la localité et amie de la victime, Amélie Bouffard est à l’origine d’un mouvement populaire qui souhaite que des changements soient apportés à cette section de la route.

«Cela fait longtemps que tout le monde le dit que ce croche-là, c’est quelque chose (de dangereux). J’ai fini par apprendre que c’était mon amie, la victime. Ça m’a choquée et c’est un peu ma manière d’honorer sa mémoire, pour qu’elle ne soit pas morte pour rien. J’ai reçu énormément de messages après une publication que j’ai faite sur les réseaux sociaux.»

Elle a d’ailleurs débuté un recensement des accidents qui se sont produits à cet endroit avec la collaboration du public. «C’est à la demande de notre députée, Stéphanie Lachance, que j’ai commencé à recueillir des infos. Voyant l’ampleur que ça prenait, j’ai demandé à ma mère (Nathalie Bélanger) de me donner un coup de main. Les gens souhaitent du changement et ça parait. Mme Lachance est aussi en train de faire sa part.»

Jusqu’à maintenant, elle a reçu près d’une cinquantaine de signalements, tous survenus à cet endroit. De ce nombre, au moins huit accidents mortels lui ont été signalés depuis le début des années 80, sans oublier une dizaine d’accidents avec blessés et un nombre incalculable de sorties de route.

«On voit que ça touche du monde pas seulement chez nous, mon cellulaire ne dérougit pas. J’ai reçu des messages de partout, de Saint-Pamphile, de Lévis, de Sainte-Justine, de Saint-Just et même de Montréal, notamment de personnes qui viennent au Massif du Sud.»

Une indication suggérant aux automobilistes de circuler à 55 km/h est en place depuis plusieurs années.

Un secteur particulièrement dangereux

Christian Théberge est à la fois chef du service incendie de la localité et ambulancier. Il est appelé régulièrement à intervenir lors d’événements du genre. «Il y a quelques secteurs problématiques, mais c’est définitivement un secteur où l’on doit souvent se rendre et depuis longtemps. Dire qu’il y a eu près d’une dizaine de décès à cet endroit depuis les années 70 n’est pas exagéré», dit-il.

M. Théberge ajoute que plusieurs types d’accidents ont été observés à cet endroit. «Ça va de la simple sortie de route à l’accident matériel, ce qui arrive régulièrement, surtout l’hiver. Viennent ensuite les accidents avec blessés et les accidents mortels qui retiennent davantage l’attention. C’est davantage fréquent quand deux voitures se croisent à l’intersection. Ce sont particulièrement les gens qui circulent vers le nord et qui se retrouvent dans la voie inverse qui sont impliqués.»

Nancy Roy, propriétaire du casse-croûte du village, circule quotidiennement par cette intersection et avoue être méfiante. «Les gens qui descendent la côte sont souvent de notre côté de la ligne jaune. Trop de personnes empiètent de l’autre côté, ce qui rend l’endroit dangereux.»

Propriétaire de l’entreprise RCL, qui loge maintenant dans les anciens locaux d’Idéal Sport, Christian Côté explique que les camionneurs affectés à son entreprise vivent un véritable casse-tête chaque fois qu’ils doivent prendre la route. «On se doit de prendre des précautions et de positionner quelqu’un pour indiquer au chauffeur s’il peut se lancer sur la route. Il y a un énorme risque d’accidents.»

Un remodelage de la route serait difficile en raison de la présence d’une usine à gauche et d’une résidence à droite.

Des intervenants en mode solution

La municipalité d’Armagh souhaite un réaménagement du secteur depuis longtemps. Les premières résolutions sur le sujet datent de 2003 et le Comité Action-Sécurité 281 avait aussi abordé le sujet à l’époque. Le maire Sarto Roy confirme que le conseil municipal siégera exceptionnellement mardi soir prochain (10 mars) afin d’adopter une résolution exigeant des améliorations.

«Ça prend toujours un décès pour provoquer des choses et c’est malheureux. Nous allons demander au ministère d’apporter des modifications et d’avoir des moyens, entretemps, pour améliorer les choses. Le ministère semble déjà ouvert à ajouter de la signalisation ou un radar, pour le reste on verra.»

Selon lui, un remodelage de la route serait idéal. «La difficulté est qu’elle est enclavée entre une industrie et une résidence. Un élargissement ou un remodelage pourrait permettre de diminuer sans aucun doute le nombre d’accidents et améliorer la sécurité, car la signalisation en place ne semble pas être suffisante. Jeter un coup d’œil sur ce qui se fait comme entretien doit aussi en faire partie.»

Porte-parole du ministère des Transports, Benoit Lachance indique que le ministère n’a qu’une dizaine d’accidents de répertoriés depuis les cinq dernières années. Il convient que ce ne sont pas tous les accidents qui peuvent être rapportés. «Nous avons des échanges avec la municipalité, mais pas seulement pour ce secteur en particulier. Au sujet de l’intersection de la route 281 et du 8e rang, ce segment de la route a été très peu abordé dans le passé.»

M. Lachance indique qu’il y a eu quelques améliorations visuelles dans le passé, notamment l’ajout d’un panneau invitant les gens à diminuer leur vitesse à 55 km/h en 1989, parce que le ministère considérait que la vitesse devait être diminuée. «Nous savons que c’est un secteur qui est en pente et où il y a une courbe. Il y a toutefois un réaménagement géométrique qui est à l’étude pour ces raisons. Un réaménagement complet de la zone pourrait être complexe, mais ce sera discuté avec la municipalité. Il n’y a toutefois pas d’échéancier de fixé.»

Pour Stéphanie Lachance, député de Bellechasse, l’implication de citoyens et citoyennes dans le dossier est primordiale. Elle ajoute qu’une rencontre entre la municipalité et le ministère est déjà à l’agenda pour le 18 mars. «L’idée est de connaitre l’ampleur du problème, pas de diriger des blêmes vers personne, sur ce qui a été fait et qui aurait pu ou dû être fait. Amélie a pris le taureau par les cornes et sa mère s’implique aussi. Il y a un projet à l’étude. Ce n’est toutefois qu’une étape parmi plusieurs à venir. »