Investissement de 3,5 M$ chez les Œufs Lapierre

AGRICULTURE. L’entreprise avicole Les Œufs Lapierre de Saint-Gervais a récemment débuté la construction d’un nouveau poulailler qui, à terme, permettra d’accueillir plus de 45 360 poules.

La production quotidienne d’œufs, qui est d’environ 50 000 à l’heure actuelle, passera à plus de 77 000 œufs.  « Nous espérions être plus autonomes et savoir ce qui se passe avec nos oiseaux. L’élevage, c’est comme les fondations d’une maison. Quand ça commence croche, le lot évolue de cette manière. Quand ça débute de la bonne façon, ça évolue de la même manière », explique le propriétaire, Sylvain Lapierre.

Les fondations du bâtiment de 300 pieds par 52 sont apparues il y a quelques jours à peine.

« Nous aurons toujours une rotation, ce qui nous évitera d’avoir à acheter nos poulettes, surtout que notre éleveur a vendu son site. Nous aurons nos poussins à un jour et on pourra les élever jusqu’à ce qu’ils soient prêts à pondre », ajoute-t-il.

Le souhait de développer une plus grande autonomie était d’ailleurs au cœur de la réflexion depuis le début. « Élever nos poules nécessite environ 19 semaines, plus la période de lavage d’une semaine, ce qui fait qu’un cycle dure environ 5 mois. On se donne une pause d’environ un mois ou un mois et demi entre chacun des élevages. »

Il avoue avoir hésité un certain temps au départ, l’investissement nécessaire étant passé à 3,5 millions de dollars. « Je l’avais estimé à 3 M$, sauf que la montée du prix des matériaux et quelques « tant qu’à y être » font grimper la facture. Si ça n’avait pas été du désir de produire mes poules de remplacements moi-même, j’aurais possiblement attendu un an. Il y a trop d’incertitude, mais mon plan était fait et on a choisi de foncer. »

Le bâtiment devrait être complété d’ici Noël et les premières poules devraient intégrer le bâtiment en mars 2022.

Une institution

Les nouvelles installations sont de plus en plus orientées vers le bien-être animal.

Cet investissement fait que Les Œufs Lapierre est en voie de devenir l’une des entreprises les plus importantes du genre dans Bellechasse et un joueur important en Chaudière-Appalaches. La renommée de l’entreprise n’est toutefois plus à faire. « Mon grand-père a parti ça en 1949 avec 3 000 poules dans un poulailler que nous avons démoli au milieu des années 2000. En 1967, il s’est bâti un autre poulailler, cette fois-ci de 10 000 poules. Les cages étaient suspendues au plafond. Quand mon père a acheté en 1981, mon grand-père venait d’aménager le lieu avec des cages surélevées, avec trois étages. Il y avait aussi une maternité porcine qui a été abandonnée plus tard pour y installer des porcs à l’engrais et une éleveuse pour les poussins », se souvient Sylvain Lapierre.

Il se rappelle aussi que l’évolution de l’entreprise a été retardée à deux reprises en raison de sinistres. « En 2001, nous sommes passés de 10 000 à 17 000 poules pondeuses. Nous devions retirer les porcs à l’engrais l’année suivante, sauf que nous sommes passés au feu en janvier 2002, ce qui a causé des pertes importantes, soit les 17 000 poules sur place et 200 porcs à l’engrais qui étaient prêts à sortir. Nous avions rebâti pour 27 000 poules et un autre incendie a détruit ce bâtiment en 2004. »

Loin de se laisser abattre, la famille Lapierre a reconstruit le bâtiment l’année suivante, infrastructure qui est toujours existante. « Ces équipements commencent à être désuets un peu, mais l’occasion est bonne de bien s’équiper pour le bien-être animal. Les systèmes sont plus imposants, mais procurent plus d’espace à nos poules. Ce sera encore mieux pour elles. »

Confort et bien-être

Le bien-être animal revient souvent dans le discours de Sylvain Lapierre qui estime que l’industrie a possiblement trouvé de bons compromis, à la fois pour le confort des animaux et une certaine productivité. « On avait peut-être poussé un peu loin avant et avons probablement trouvé l’équilibre. On remarque plus de mortalité chez les élevages en liberté et plus de fractures de bréchets. Les poules sont davantage en contact avec le fumier et on retrouve des œufs par terre plus souvent. Laisser trop d’espace et de liberté aux oiseaux n’était peut-être pas la solution optimale. »

Il remarque que les nouvelles technologies, notamment au niveau des systèmes d’échangeurs d’air, procurent de bons avantages. « Spécialement en hiver, il y a souvent des odeurs d’ammoniac, car l’air circule moins bien. Par un simple échange de chaleur, on peut maintenant vendre notre fumier, plutôt que d’avoir à dépenser pour s’en départir. Un nouveau système pour la récolte des œufs existe aussi. Comme on fait beaucoup de vente à la ferme, le système permettra de sélectionner les œufs pour cette clientèle »

La relève et l’avenir

Entreprise familiale depuis 1950, Les Œufs Lapierre pourrait demeurer dans le giron familial, espère Sylvain Lapierre qui indique que les investissements actuels seront peut-être les derniers, pour un certain temps du moins. « Nous avons fait beaucoup de rénovations au cours des dernières années. Avec un poulailler de 2016 et un autre de 2021, je vois qu’à long terme, nous sommes plutôt bien positionnés. Dans une dizaine d’années, je verrai si mes enfants sont intéressés à reprendre la chose et à réinvestir au besoin. »

La production d’œufs est sur une belle lancée, estime Sylvain Lapierre, même si la pandémie est venue modifier le comportement des consommateurs. « Avant la pandémie, les Québécois et les Canadiens en général mangeaient beaucoup d’œufs et c’était en augmentation depuis les dix dernières années. Les restaurants et le marché de la transformation a chuté beaucoup. On a dû raccourcir les cycles de ponte pour diminuer le nombre d’œufs sur le marché. »

Il ajoute qu’historiquement, le Québec produisait moins d’œufs qu’il y avait de consommateurs. « Il y aura possiblement plus de quotas qui vont se donner nationalement. La mise en marché collective permet aussi aux producteurs d’être égaux, peu importe où ils sont sur le territoire », évalue-t-il en terminant.