Acériculture: les travailleurs étrangers en renfort

MAIN D’OEUVRE. La venue de travailleurs étrangers pourrait être le salut de plusieurs entreprises agricoles qui vivent, au même titre que plusieurs industries, des problèmes de main d’œuvre.

Si la tendance est déjà en cours dans certains secteurs, dont la production de petits fruits ou de légumes et de plus en plus dans la production animale, l’acériculture pourrait être le prochain secteur à en bénéficier.

Serge Tanguay fait partie des acériculteurs qui font confiance à la technologie et aux travailleurs étrangers.

Responsable des ventes canadiennes pour l’entreprise d’équipements d’érablières CDL, Serge Tanguay entreprend sa 9e année à titre de producteur acéricole. Il fait aujourd’hui confiance à des Guatémaltèques pour travailler sur ses propriétés en Gaspésie. Il avait acquis le Domaine Franco de Saint-Henri il y a deux ans et s’en est servi de tremplin de formation pour ses travailleurs étrangers. « Je les ai équipé et leur ai donné une formation pour l’entretien de la forêt surtout. Comment manier les scies mécaniques, les débroussailleuses, bref tout l’aspect entretien d’une érablière », indique-t-il.

Des travailleurs indispensables

Pourquoi avoir recours à des travailleurs étrangers ? Sa réponse est simple. Il est devenu périlleux de ne miser que sur la main-d’œuvre locale. « C’était planifié à l’acquisition que je m’en allais vers ça. La main-d’œuvre québécoise est devenue rare et indépendante par rapport au patron. J’ai commencé l’entaillage l’an dernier avec 9 employés et j’avais une moyenne de présence de 5,5 employés sur le premier mois. Nous n’avons pas les moyens d’être en sous capacité de main d’œuvre, mais c’est devenu notre réalité. »

Les travailleurs étrangers apprennent tous les rudiments nécessaires à bien œuvrer dans des entreprises acéricoles.

L’entretien d’une érablière exige des tâches difficiles, physiques et en plein air, tient-il à rappeler. « Les travailleurs québécois sont fiables et expérimentés, mais la disponibilité n’est pas au rendez-vous. Les jeunes Québécois d’aujourd’hui ne rêvent pas à leur scie mécanique ou leurs raquettes le dimanche. Ils n’ont pas hâte de quitter l’école pour se rendre en forêt ou à la ferme comme les générations qui nous ont précédés. Même ma génération à moi, on avait plutôt hâte de faire du vélo que de s’intéresser à ces choses-là. »

Ces travailleurs d’ailleurs sont devenus indispensables malgré l’avènement des nouvelles technologies, autant informatiques que sur le terrain, selon Serge Tanguay. Sur ses 11 employés, six sont du Guatemala. Son érablière en Gaspésie était déjà devenue un modèle en matière de gestion à distance. « Je me suis départi de certains employés que j’ai remplacés par la gestion 100 % automatisée de mon entreprise. Si un problème survient sur le terrain, à 6 heures de routes avec 85 000 entailles, ce n’est pas toujours évident quand ça coule et je peux faire certaines choses à distance. Même avec la technologie, la main d’œuvre est importante pour assurer l’entaillage dans les temps requis. Ça assure une constance. »

Les travailleurs étrangers apprennent tous les rudiments nécessaires à bien œuvrer dans des entreprises acéricoles.

Bien encadrés

Plusieurs ressources sont nées au cours des dernières années en raison des problèmes de recrutement de la main-d’œuvre et le recours aux travailleurs étrangers semble devenir une solution dans plusieurs régions de la province. Le Club d’encadrement technique en acériculture du Bas-St-Laurent existe et opère principalement dans l’Est-du-Québec. En Chaudière-Appalaches, Arimé Canada s’occupe de la venue de travailleurs étrangers, autant pour l’acériculture que d’autres domaines, et ce partout en province.

Directeur général de l’organisation, Djibril Diallo constate une augmentation du nombre de demandes, notamment en acériculture. « On s’occupe des démarches légales pour obtenir l’approbation des autorités canadiennes, du transport vers le Canada et une fois sur le terrain, les services d’un traducteur sont souvent nécessaires. La plupart des travailleurs apprennent le métier sur place et souvent, la formation est donnée directement par l’employeur. »

Martin Méthot, dont le bureau est à Sainte-Marie-de-Beauce, recrute des travailleurs étrangers en acériculture depuis maintenant plus de 5 ans. « Je ne me trompe pas en disant que nous avons plus d’une centaine de travailleurs étrangers, dans les sucreries uniquement, au Québec et au Nouveau Brunswick. De ce nombre, environ 80 % sont du Guatemala et un autre 20 % provient du Mexique. »

Les travailleurs étrangers apprennent tous les rudiments nécessaires à bien œuvrer dans des entreprises acéricoles.

La principale qualité de ces travailleurs est qu’ils sont généralement fiables et connaissent les raisons pour lesquelles ils sont ici. « Ce sont un peu les travailleurs québécois des années 40 et 50. Ils n’ont pas été habitués aux gros outillages, mais plutôt à travailler de leurs mains. Ce n’est pas déshonorant pour eux d’effectuer un travail manuel et répétitif. Pour eux, le Canada est un peu ce qu’a été la Baie-James pour les travailleurs québécois. Ils sont les riches de leur pays quand ils retournent. »

Étonnamment, ces travailleurs semblent se plaire dans leur travail, même s’ils ne sont pas habitués à travailler par temps froid. « Je n’ai jamais eu un commentaire négatif d’un ou l’autre de ces travailleurs. Les acériculteurs le savent et les habillent chaudement et avec des vêtements de qualité dès leur arrivée. Ils sont toutefois sensibilisés avant leur départ, mais l’adaptation est plus facile qu’on l’estimait au départ. »