Geneviève Couët dans l’œil d’Irma

OURAGAN. Comme plusieurs Québécois en vacances dans les Antilles, Geneviève Couët se souviendra longtemps de l’ouragan Irma qui a frappé ce secteur et la Floride au début du mois de septembre.

Lorsqu’elle a quitté Montréal pour une semaine de vacances au Club Med dans les Îles Turquoises le 3 septembre dernier, la fille du maire de Saint-Prosper, Richard Couët, savait qu’une tempête tropicale était en formation dans cette région du globe. Toutefois, rien ne laissait présager, à ce moment, un tel dénouement.

Souvent, ça meurt en mer ou ça passe ailleurs. Irma avait déjà son nom et était seulement classée tempête tropicale», signale Mme Couët qui n’en était pas à sa première visite au Club Med de l’endroit.

Le dimanche et le lundi, tout se déroulait normalement. En soirée toutefois, les voyageurs ont appris que la tempête était passée à ouragan de catégorie 2, puis à catégorie 4 le lendemain (mardi). «Tous les jours pourtant, il faisait beau, gros soleil et pas une graine de vent», souligne celle qui n’en était pas à sa première visite à cet endroit.

Dès le mardi soir, les responsables du Club Med ont commencé à mettre en place leur plan d’urgence en placardant le rez-de-chaussée de leurs bâtiments avec des planches de contre-plaqué. Craignant le pire, plusieurs visiteurs ont tenté de quitter à l’avance le mercredi, mais en vain puisque tous les avions étaient déjà pleins.

«Il y avait une panique généralisée qui s’établissait dans les Antilles. C’était difficile de sortir, sauf pour ceux dont le billet de départ était prévu pour cette date-là», poursuit Mme Couët qui ajoute que la journée de mercredi s’est elle aussi déroulée normalement, jusqu’à ce qu’on leur annonce que l’ouragan qui allait les frapper serait de catégorie 4 plus, ou 5 très fort.

Dès 14 h le jeudi, tous les voyageurs étaient confinés à leur chambre. Ceux et celles qui se trouvaient au rez-de-chaussée ont été déménagés à l’étage et le personnel de l’hôtel, dont les quartiers étaient faits de bois, a aussi été installé dans les unités d’habitation faites de béton.

Geneviève, qui était seule dans sa chambre, a abrité un voyageur de la France et une Newyorkaise qui avait vécu les affres de l’ouragan Sandy il y a quelques années. «Ils nous ont donné trois boîtes à lunch pour les repas du jeudi soir, du vendredi matin et du vendredi midi, de l’eau et des lampes de poche. J’étais bien content d’avoir de la compagnie, car je ne voulais pas être seule dans ces circonstances.»

Place à l’enfer

Le vent s’est levé vers 14 h et la pluie soutenue a débuté vers 16 h. À ce moment, les vents étaient d’environ 100 km/h. Les fenêtres de sa chambre étaient barricadées et la porte d’entrée avait été bloquée avec une chaise afin d’empêcher des débris d’entrer par là.

«Il faisait noir dans nos chambres. On entendait cependant très bien le vent et la pluie. L’enfer a débuté vers 21 h avec des pointes de vents à 300 km/h. C’était extrêmement violent», signale Mme Couët qui ajoute que des débris ont commencé à frapper l’hôtel vers 23 h. «Il y avait beaucoup de claquements et de craquements. Le vent sifflait de façon soutenue et intense. Cela faisait une pression dans nos oreilles, comme si on était dans un avion qui atterrissait.»

Le calme est revenu vers 3 h 30 du matin. Geneviève et ses invités se sont endormis une heure plus tard et dès 8 h, ils entendaient les gens discuter à l’extérieur. «On a ouvert la porte. L’ouragan était passé. Il ventait encore beaucoup, mais il n’y avait plus de pluie. Il y avait des débris partout. Les blocs où demeurent les employés n’avaient plus de toits ou étaient détruits. Les palmiers et de gros arbres étaient déracinés.»

Geneviève mentionne qu’un peu d’eau est entrée dans sa chambre, à peine 2 mm, par la porte, la fenêtre de la salle de bains et le cadre d’une autre fenêtre.

Bien informés

Geneviève Couët souligne que personnellement, elle n’a jamais craint pour sa vie. Elle ajoute que les autorités de l’hôtel étaient rassurantes et savaient ce qu’elles faisaient. «J’étais à la bonne place, mais au mauvais moment. Le reste de l’île a été plus touché que le Club Med qui offre des structures sécuritaires. Les résidents de l’endroit, dont les employés du Club Med, ont été plus touchés. Si leurs familles étaient saines et sauves, ce n’était pas le cas de leur résidence qui a été détruite.»

Retour chaotique

Le retour au pays a été toutefois plus chaotique pour Geneviève et les autres Canadiens qui terminaient leurs vacances le 10 septembre. L’aéroport des Îles Turquoises a été lourdement endommagé, des accumulations d’eau totalisant trois mètres étant enregistrées à cet endroit. La tour de contrôle était intacte, mais les éléments satellites ont été plus durement touchés et les ordinateurs étaient non fonctionnels, ce qui compliquait la tâche du personnel en place.

«Nous avions reçu la confirmation qu’Air Canada acheminait un avion humanitaire pour nous ramener à la maison. Tous les gens qui avaient réservé avec eux devaient rentrer au pays le 10 septembre, mais les autorités locales ne voyaient pas la chose autrement. Ils nous ont dit qu’on ne pouvait pas partir en raison de la situation de crise qui sévissait et que seuls les vols humanitaires étaient autorisés à atterrir et partir.»

Après que les gens d’Air Canada aient refusé de quitter l’aéroport, des négociations ont permis aux voyageurs en question de repartir le lendemain. «On a alors eu la confirmation que l’aéroport était ouvert, même si les ordinateurs étaient non-fonctionnels. Les employés d’Air Canada nous ont fait des cartes d’embarquement à la main et à 16 h 30, on prenait la route de Toronto, puis de Montréal où nous sommes arrivés à minuit 30, en un seul morceau avec nos bagages.»