La Covid, deux ans plus tard

SANTÉ. Normand Leblond de Saint-Charles et son entourage se souviendront longtemps de la pandémie entourant la Covid-19, puisqu’il est l’un de ceux ayant été les plus durement touchés par le virus.

Cette façon d’aborder le sujet est la même que nous avions utilisée il y a deux ans, alors que M. Leblond était sur le point de retourner chez lui. Après avoir été admis à l’hôpital le 10 avril 2020, il a quitté l’Hôtel-Dieu de Lévis le 17 juin suivant, ne revenant à la maison que le 15 juillet, après une réadaptation de 27 jours.

Il aura été absent de chez lui pendant 97 jours, au total. « Mon épouse m’avait organisé une fête cette fois-là. Il y avait une cinquantaine de personnes. Je n’étais pas très en forme à ce moment-là. J’ai pris beaucoup de force ensuite », se souvient-il.

« On m’a baptisé le « Miraculé de Chaudière-Appalaches ». J’ai été 22 jours dans un coma forcé, intubé 33 jours et avec une trachéotomie pendant un mois et paralysé un bon bout. J’ai eu de très bons soins, heureusement. On m’avait dit que je reviendrais à 80 % maximum et que ce serait long, au moins un an. J’évalue que je suis à environ 90 %. J’ai une neuropathie dans le pied gauche, possiblement causée par la période de coma. On m’avait dit de deux mois à deux ans pour que ça puisse revenir », indique M. Leblond qui a dû subir une opération à la hanche en novembre dernier, ce qui le limite aussi dans ses activités. « C’est de l’usure. J’ai été debout longtemps pour la coiffure et j’ai pesé 200 livres longtemps. »

Il est vrai qu’il a possiblement été atteint aussi sévèrement par le virus en raison d’une paralysie du diaphragme droit. « Quand je tousse, les sécrétions ne sortent que d’un côté. Mon diaphragme droit ne lève pas en même temps que celui de gauche. Quand j’ai une grippe, je râle et je dois prendre des antibiotiques, ça fait des années que j’ai ça. Ce qui m’a fait avoir la Covid, c’est une pneumonie. J’avais tous les symptômes à ce moment-là. J’ai dû subir un examen à Charny et on m’avait donné des antibiotiques. Comme les choses empiraient, je suis parti en ambulance. »

Deux ans plus tard, l’homme de 73 ans doit toutefois composer avec quelques séquelles. « J’ai perdu l’odorat complètement. Le goût à moitié. J’ai surtout perdu de la capacité, de l’endurance. J’ai de la difficulté à rester debout longtemps, alors que j’ai coupé des cheveux pendant 51 ans. Je prenais 8 tylenols par jour et d’autres médicaments. J’ai fini par tout arrêter, car ça ne faisait pas d’effet », résume M. Leblond.

Il en a été quitte pour prendre sa retraite, de manière un peu forcée. « C’était le temps que j’arrête, de toute façon. Je me suis préparé mentalement et j’ai avisé la MRC et la municipalité que je fermais. Ça l’était déjà de toute façon. J’avais de la réadaptation à faire et j’allais à Charny régulièrement, alors pas vraiment de temps pour reprendre certaines activités. »

Les deux dernières années

M. Leblond avoue que les deux premiers mois ont été très longs, car en revenant, il n’avait plus de clients et ne recevait plus de téléphones. Ce faisant, il y avait beaucoup moins d’activités dans la résidence. « Avant, ça sonnait souvent ici pour des coupes de cheveux, des réparations de serrures ou des transports par autobus. Les deux premiers mois, c’était vide. La chaise était là et les clés aussi et personne n’entrait dans la maison. On devait recevoir de 125 à 130 téléphones par semaine, régulièrement. Il y en avait peut-être une dizaine pour ma femme et le reste était pour moi. Là, on tombait à une quinzaine par semaine. C’est tout un changement. »

Normand Leblond se dit satisfait des progrès qu’il a pu faire au cours des deux dernières années, ne négligeant pas de saluer la contribution de son épouse qui a été présente à tous les instants. Cette dernière a aussi été témoin du support qu’a reçu M. Leblond pendant toute la durée de son épreuve. « Il a été fort dans ça. Plein de monde a eu des pensées positives, mais il a fait sa grosse part. Quand les choses ont commencé à progresser, ça s’est fait vite. Le personnel du centre à Charny n’en revenait pas à quel point il devançait les échéances. »

M. Leblond ajoute que le personnel de l’Hôtel-Dieu et du centre de réadaptation de Charny a aussi été à la hauteur. « Ma porte à Charny était fermée en tout temps, tout le monde devait mettre des jaquettes parce que j’ai été considéré contagieux assez longtemps. Plusieurs personnes ont souffert de ça. Le matin que j’ai eu mon deuxième résultat négatif consécutif, ça courait dans le corridor et ça ouvrait les portes », se rappelle-t-il en riant.

Il a pu retrouver ses permis de conduire, trois mois après son retour à la maison, ce qui a contribué à rehausser son moral. « J’ai recommencé les autobus au printemps et je me suis inscrit pour faire du transport pendant la visite du Pape à Québec », ajoute M. Leblond qui rend service à quelques personnes depuis quelques semaines pour des transports occasionnels en automobile. « Aussitôt que j’ai retrouvé mes licences, j’ai repris le volant. J’ai commencé avec une dame et je suis rendu à sept personnes pour qui je suis un proche aidant en quelque sorte. »

Une chose demeure, il n’a jamais perdu l’appétit pendant toute cette période. « Je mange trop. J’ai toujours eu un bon appétit. Je ne l’ai jamais perdu d’ailleurs, même à l’hôpital, je vidais mon assiette. » Maintenant à la retraite, M. Leblond n’a pas de projets précis en tête, sinon que de s’occuper à sortir et à prendre soin de son premier petit-fils, Olivier, né il y a 9 mois. « C’est le fils de notre garçon Patrice. Nous n’avons que lui. J’ai même pu retarder mon opération à la hanche pour être sûr d’assister à sa naissance en octobre. »

M. Leblond ajoute que sa foi l’a possiblement sauvé. « Il y a plein de gens qui priaient pour moi. J’ai une très grande foi, je l’ai dit devant tout le monde à l’église. Tout seul, je ne serais pas là. La vie est encore belle. Elle est différente, parce que nous sommes à la retraite. Je ne suis pas mort, peut-être parce que Saint-Pierre me trouvait trop malcommode et il s’est dit qu’il allait me laisser picosser encore le monde un bout. D’autres me disent que c’est parce que Saint-Charles avait encore besoin de moi. »