Les chasseurs désavoueront le registre des armes à feu
CHASSE. L’annonce en juin de la mise sur pied d’un registre des armes à feu au Québec a rendu les chasseurs de la région mécontents observe Daniel Blanchette, propriétaire de Dan-Chasse de Saint-Camille, l’un des plus importants détaillants du genre dans la province.
Les échos qu’il reçoit chez ses clients démontrent que plusieurs personnes n’enregistreront pas volontairement leurs armes pour différentes raisons. Au bout du compte, la démarche sera très onéreuse et tout simplement inutile. «Les clients trouvent cela ridicule et savent fort bien qu’il n’y a pas la moitié des armes qui vont s’enregistrer, car ça va coûter des millions. Les personnes qui vont se prêter au jeu et s’inscrire au registre ne sont même pas les personnes que l’on devrait contrôler», pense-t-il.
Propriétaire de la boutique depuis 2002 et commerçant d’armes à feu depuis 2004, Daniel Blanchette estime que la perte du registre canadien a changé des choses, mais qu’il existe toujours un certain contrôle, malgré tout. «Une personne qui souhaite se procurer une arme doit franchir une série d’étapes. D’abord, elle doit suivre un cours de maniement, faire l’objet d’une enquête et remplir une série de formulaires. Dans le cas d’une arme restreinte, il y a des étapes qui s’ajoutent et c’est beaucoup plus long.»
Sans le juger inutile, il estime que le registre sera uniquement basé sur la bonne foi des gens. «La base de données peut offrir un accès rapide à tout ce que, en théorie, vous avez bien voulu enregistrer, rien de plus. D’une certaine façon l’arme est déjà enregistrée et répertoriée dans mon inventaire à moi. La personne qui possède un permis de possession et d’acquisition a assurément au moins une arme».
De fausses raisons
À son avis, le gouvernement du Québec n’a fait que répondre aux pressions exercées par certains groupes. «Ils ne savent pas de quoi ils parlent et ne veulent pas le savoir non plus. Ils ne souhaitent que faire plaisir à une partie de la population et créer un faux sentiment de sécurité ou de contrôle qu’ils n’auront pas. Dans le fond, on va contrôler quoi. Si nous ne contrôlons que 50 % des armes de celles et ceux qui veulent s’enregistrer et que l’on dépense des millions de $ sur ça, on devrait peut-être mettre l’argent ailleurs».
Il décèle chez ses clients une déception face au gouvernement actuel et sa gestion du dossier. «Les personnes qui viennent nous voir regardent ce qui se passe dans l’actualité et constatent que nos personnes âgées n’ont qu’un bain par semaine, qu’il y a des coupures dans les hôpitaux. Le gouvernement va quand même gaspiller des fonds publics dans un registre pour faire plaisir à une partie de la population et, surtout, dans le but d’obtenir du capital politique».
Il ajoute toutefois qu’il ne peut blâmer les gens qui n’ont pas d’arme ni les personnes qui sont en faveur du registre. «Si on me propose une chose et qu’on me le présente en me disant que cela pourrait être dangereux, alors on va faire cela et ce le sera moins, personne ne refusera. Ils ne connaissent malheureusement pas les coûts que cela va impliquer et l’ampleur que cela pourrait prendre pour pas de résultat du tout à la toute fin».
Ailleurs au pays
Daniel Blanchette craint aussi une perte pour l’économie québécoise à moyen terme puisque plusieurs armes, une fois le registre en fonction, ne seront tout simplement pas achetées au Québec. «Lorsque le registre a été abandonné au Canada, nous avons continué à enregistrer les armes vendues au Québec, afin d’assurer la sauvegarde des données. Il n’y a pas une semaine où je ne recevais pas un coup de fil d’une personne qui me demandait si je pouvais faire comme en Ontario et ne pas enregistrer l’arme. Je répondais que non bien entendu, car j’étais tenu par la loi. La réaction du client était toujours «pas de problème, je vais la commander de l’ouest» et le client raccrochait».
Les taxes élevées au Québec incitent aussi les gens à acheter hors Québec. «Dès que le montant est significatif, avec internet et le transport aujourd’hui, les gens commandent leur marchandise dans une autre province et sauvent jusqu’à 10 %. Nous ne pouvons pas empêcher ça. On ne parle pas que d’armes. Ça vaut aussi pour l’électronique, les bijoux et autres.»
Il avoue avoir tenté de sensibiliser la députée-ministre Dominique Vien à sa cause, mais en vain. «La réponse que j’ai reçue est qu’il y aura de grosses amendes pour les gens qui se feront prendre. Elle suit la ligne du parti et n’a pas cherché à défendre les chasseurs de la région ou d’ailleurs. Des fois on gagne, des fois on perd j’imagine».