Les décès de Jennyfer et de Mélissa étaient évitables dit la coroner
SAINT-RAPHAËL. La coroner Andrée Kronström estime que les décès de Jennyfer Pichette-Mercier et de Mélissa Prévost, étaient évitables dans un rapport publié jeudi.
Les deux jeunes filles sont mortes noyées dans la rivière du Sud à Saint-Raphaël le 15 juillet 2015 lors d’une activité dans le secteur du Rocher Blanc. Me Kronström indique que l’enquête a permis d’identifier plusieurs facteurs modifiables et émet certaines recommandations afin de rendre la baignade en rivière plus sécuritaire.
Selon elle, il faut travailler à alerter la population aux dangers de noyade en rivière et accroître les connaissances sur l’eau vive. Elle suggère également à la Mutuelle des municipalités du Québec de rédiger un guide afin d’aider les municipalités à aménager des sites sécuritaires aux abords des plans d’eau. Elle invite aussi la municipalité de Saint?Raphaël à déployer son plan de sécurité civile en y incorporant des mesures précises pour le sauvetage en rivière. Aussi, les activités de baignade choisies dans le cadre du programme des coopératives jeunesse de services (CJS) doivent obligatoirement se dérouler dans des endroits surveillés selon elle.
Elle a aussi constaté qu’avant le décès des deux jeunes filles, aucun affichage n’interdisait la baignade sur le site. Depuis, aidé financièrement par la municipalité de Saint-Raphaël, le Mouvement des amis de la rivière du Sud (MARS) a sollicité l’expertise de la Société de sauvetage du Québec pour mettre en place des mesures visant à améliorer la sécurité du site et à réduire les risques de noyade, essentiellement un affichage beaucoup plus détaillé et l’érection d’une pierre gravée à la mémoire de Jennyfer Pichette-Mercier et de Mélissa Prévost.
Pendant son enquête, Me Kronström a considéré différents éléments ayant contribué au décès malheureux des deux jeunes filles, dont les caractéristiques de la rivière du Sud, la gestion du site du sentier du Rocher Blanc, le choix de l’activité dans le contexte d’encadrement du projet CJS, la méconnaissance des dangers de l’eau vive et le sauvetage.
Une mère espère d’autres changements
Nathalie Pichette a des sentiments partagés à la suite du dépôt d’un second rapport du coroner sur le décès des deux jeunes filles. Mère de Jennyfer Pichette-Mercier, elle avait réagi vivement à la sortie du premier rapport en mai 2016 reprochant au coroner, Me Donald Nicole d’avoir «bâclé» son travail en omettant d’enquêter sur certains aspects de l’événement. «Ça demeure des recommandations. Ce qui va me sécuriser, c’est ce qui sera fait à partir de maintenant. Le premier rapport avait été monté rapidement et il aurait dû y avoir plus de rigueur.»
Elle se dit toutefois satisfaite sur certains points. «Certaines conclusions sont différentes du premier rapport. Il y a des corrections faites comme pour l’affichage sur les lieux. Il y a aussi plusieurs recommandations pour sécuriser la baignade en général. On espère maintenant qu’elles seront bien étudiées et mises en application. L’installation de bouées n’est pas exigée, mais au moins recommandée. »
Une déception, l’organisme La Fabrique Entrepreneuriale, responsable des CJS, a été plutôt timide dans ses actions juge Mme Pichette. «La coroner a aussi remarqué que les modifications étaient modestes. S’il y a un endroit où il fallait que ça bouge, c’est là où on s’occupe de nos ados. Il n’y a aucun plan qui dicte qu’on ne va pas en eau vive s’il n’y a pas de sauveteur sur les lieux et qu’on doit se rendre dans un endroit sécuritaire. Depuis deux ans, peu de choses ont été faites. Il aurait été important que cela se fasse rapidement pour des changements immédiats.»
Elle estime maintenant qu’elle devra provoquer les choses. «Nous attendions le dépôt du rapport. C’est sûr que l’on fait une poursuite pour les faire bouger, les réveiller. Nos enfants sont décédés mais ceux qui sont vivants et qui ont vu ça en direct, la monitrice qui devra composer le reste de ses jours avec ça, on n’attendra pas que d’autres vivent la même chose. On va pousser pour que les choses changent.»
Malgré son chagrin, elle se rend occasionnellement sur les lieux de la tragédie pour observer ce qui se passe et si les gens ont changé leurs habitudes. «La municipalité a bien collaboré avec nous et a précisé que les changements apportés étaient une première phase. L’affichage pourrait sûrement être amélioré pour attirer l’attention davantage. Ça n’a pas changé la mentalité des gens, ils ne s’arrêtent pas.»
Le maire de Saint-Raphaël, Gilles Breton, a eu l’occasion de survoler le rapport après sa publication. Il en connaissait sommairement le contenu ayant assisté aux quatre journées d’audience. «Nous devrons nous réunir dans un premier temps. Une rencontre avec le MARS, gestionnaire du site, devra aussi avoir lieu», a-t-il résumé.
Il a déjà ciblé certaines recommandations qui touchent directement sa localité. «L’absence de téléphonie cellulaire, nous avons fait des efforts déjà en ce sens mais on ne contrôle pas ce bout-là et on regarde aussi la possibilité d’installer une cabine téléphonique au besoin. On devra aussi rencontrer les gens de notre service incendie pour des interventions en eau vive. La sensibilisation des jeunes et l’amélioration de l’affichage est aussi à notre agenda. On devra travailler tout ça en équipe.»