Lieu d’enfouissement à Armagh: la grogne persiste

BELLECHASSE. Une cinquantaine de citoyens d’Armagh ont profité de la séance publique du conseil des maires de la MRC de Bellechasse mercredi soir pour exprimer, une fois de plus, leur désarroi relativement à la situation des odeurs aux abords du lieu d’enfouissement technique (LET).

Les propos parfois acerbes des citoyens ne laissent aucun doute quant à la présence d’odeurs nauséabondes aux abords du site et au fait que celles-ci incommodent les citoyens qui résident en périphérie. Si la MRC admet avoir constaté un retour des odeurs malgré les travaux de recouvrement effectués l’automne dernier, des citoyens précisent plutôt que celles-ci ont toujours été présentes.

Face à la critique virulente de certains résidents du secteur, la MRC de Bellechasse se défend depuis plusieurs mois sur sa gestion du dossier et estime travailler ardemment à résoudre la problématique. Elle a tenu à rappeler que les plaintes relatives aux odeurs étaient à peu près inexistantes avant que des résidus de construction ne soient utilisés comme matériau de recouvrement.

Son directeur général Clément Fillion a tenu à revenir sur l’origine de la problématique. «À partir du moment où nous nous sommes servis de débris de construction comme matériau de recouvrement, les problèmes ont commencé. Avant cela, on avait très peu de signalements. Le ministère de l’Environnement a voulu nous le mettre sur le dos, sauf qu’un juge nous a donné raison même s’ils sont en appel. Il y a encore une problématique, personne ne le nie. Nous sommes à la recherche d’une solution finale et nous avons choisi d’y aller par étape, surtout que nous avons découvert récemment une nouvelle source d’émission d’odeurs que l’on espère la régler rapidement», a souligné M. Fillion. Un citoyen, Patrick Labonté, a toutefois soutenu que le Mouvement des amis de la Rivière-du-Sud (M.A.R.S.) avait soulevé de telles problèmes dans le passé.

Le conseiller municipal Sylvain Guillemette a annoncé, au nom de son conseil municipal, une fin de non-recevoir à la proposition de la MRC de redistribuer différemment une partie ou la totalité de la compensation monétaire versée annuellement à la municipalité. (Voir texte précédent:). «La proposition ne règle pas ce qui se passe depuis plusieurs années au lieu d’enfouissement. L’air et l’eau n’ont pas de prix», a-t-il lancé devant l’assemblée.

La conseillère Céline Beaudoin a proposé de changer les torchères actuelles par des torchères actives, malgré la réponse négative émise par la MRC qui préfère cette alternative comme solution finale. En réponse à une question posée par le conseiller Gene Bourgeau, la MRC a d’ailleurs annoncé qu’aucune exploitation ne sera effectuée sur un terrain boisé récemment acquis en bordure du LET, souhaitant plutôt s’en servir comme zone tampon.

La démarche n’a pas semblé impressionner un résident du secteur, Michel Bradette. «J’ai des odeurs chez moi, surtout l’hiver lorsque les torches ne fonctionnent pas en raison du froid et lorsque les vents sont du nord. Un boisé entoure ma propriété et les odeurs sont là quand même», a-t-il soutenu. Ce dernier, tout comme André Laferrière et Florent Labrecque, estime qu’une partie de la problématique pourrait également venir du site original, le lieu d’enfouissement sanitaire (LES) aménagé en 1979, du fait qu’on n’y retrouve aucune membrane protectrice dans le sol.

Pauline Rodrigue, membre du comité de vigilance, se demande quant à elle si la MRC juge qu’il avait été sage d’établir un site d’enfouissement à cet endroit, alors que des résidences permanentes se trouvaient à proximité. Le directeur général de la MRC, Clément Fillion, a tenu à rappeler que les lieux d’enfouissement ont été mis en place à la fin des années 70′ après que le gouvernement du Québec ait exigé des municipalités des regroupements. «À l’époque, les municipalités d’Armagh et Saint-Damien avaient bataillé pour l’obtenir, car elles voyaient là une occasion de développement. À la toute fin, c’est le ministère qui avait tranché en faveur d’Armagh puisqu’il n’y avait pas de cours d’eau à proximité pour recevoir le lixiviat».

Un projet pilote de biofiltre envisagé

La MRC de Bellechasse rappelle qu’elle est en mode solution et qu’elle souhaite dénouer l’impasse rapidement. Elle estime multiplier les initiatives dans cet objectif. «L’hiver 2014-2015 devait nous permettre de déterminer si les travaux de correctifs parvenaient à minimiser les épisodes d’odeurs de façon satisfaisante, ou sinon qu’elles étaient les zones touchées», précise le directeur du Service des matières résiduelles à la MRC, Dave Loranger-King.

«On sait maintenant que la situation persiste. Des analyses pour l’eau ont été faites en septembre et une série de tests au niveau de la qualité de l’air sont aussi à l’agenda. Il nous reste à déterminer comment nous obtiendrons une situation objective à ce niveau avant d’en attribuer le mandat», mentionne-t-il. Une firme spécialisée dans le domaine de l’air sera éventuellement ciblée avec pour objectif l’élimination progressive des odeurs de H2S en périphérie du LET.

L’utilisation de mâchefers démétalisés (résidus provenant des fours d’incinération de déchets) et de compost mature ayant des propriétés biofiltrantes en font partie. «Nous ne sommes pas les seuls à vivre de telles problématiques», ajoute M. Loranger-King. «L’idée de mâchefers démétalisés vient de cette volonté du gouvernement de valoriser une certaine récupération comme matériel de recouvrement». La Ville de Québec utilise avec succès ce procédé depuis un certain temps. Les cendres, qui ont des propriétés filtrantes, sont aussi utilisées en Europe.