Quatre ans plus tard, ils doivent cesser la production

AGRICULTURE. S’il souhaite soutenir sa fille maintenant établie à Saint-Charles ainsi que ses deux autres enfants qui entendent prendre la relève de la ferme familiale, Bernard Leblond roulera vers Ottawa en tracteur, en vue de la manifestation du 2 juin contre l’importation de lait diafiltré, afin de soutenir l’ensemble de la relève agricole qui pousse «et qui ne l’a déjà pas facile.»

À cet égard, il cite l’exemple de Jonathan Côté et Maryse Corriveau, jeune couple de Saint-Lazare qui s’est lancé dans la production laitière en 2012 par le biais du programme 12-12 de la Fédération des producteurs de lait. En raison de la baisse importante du prix du lait, ceux-ci ont décidé, à la fin d’avril, de jeter l’éponge et de vendre leur bétail et ainsi que le quota, en plus de retourner à la fédération les 12 kilos/jour qui leur avaient été prêtés en 2012.

«Quand tu as un jeune couple qui vient te voir pour te dire qu’ils veulent se lancer en production et qu’ils ont besoin de bétail, tu ne peux pas lui vendre ça à un prix de fou. On a fait ce qui était possible pour les aider, car nous étions convaincus que ça marcherait. Ils avaient un beau projet et avaient réussi à limiter leurs coûts d’exploitation. Malheureusement, ça s’est compliqué pour eux au cours des derniers mois et c’est dommage», précise le producteur.

Maintenant à l’emploi d’Unicoop, Jonathan Côté confirme que lui et sa conjointe étaient assurés d’avoir un projet porteur d’avenir pour eux. «On louait l’étable des parents de Maryse qui avaient accepté de faire une place à notre troupeau, eux qui n’ont plus que des vaches à bœuf depuis 2006. On cultivait chez les parents à Maryse ainsi que chez mon père et nous avions de la machinerie en commun avec eux, afin de diminuer les coûts au minimum», précise-t-il.

«Les premières années, ça allait bien, le prix du lait était intéressant et on réussissait à faire nos paiements. Maryse conservait son emploi à l’extérieur afin de faire vivre la maisonnée et on misait tous les mois pour continuer à grossir le quota. Quand les prix ont commencé à baisser, il y a une remise en question qui s’est installée», poursuit le jeune producteur qui ajoute que devant les financiers, deux seules solutions se présentaient : vendre ou agrandir. «On a écarté cette deuxième solution, car pour garder un revenu stable, il fallait nous endetter davantage. Nous n’avions pas le choix.»

Désireux de ne pas quitter complètement le milieu, Jonathan et Maryse ont conservé quelques génisses et l’hiver prochain, ils entendent garder des taures en pension. Cet été, ils feront les foins, comme d’habitude.

«Enlèves le lait diafiltré et ils seraient serait encore en affaires aujourd’hui. Ils seraient en train de traire leurs vaches et moi, je ne parlerais pas d’aller à Ottawa en tracteur», souligne avec philosophie Bernard Leblond qui, tout comme Jonathan Côté, est d’avis qu’il est important de conserver le système laitier actuel. «C’est peut-être l’une des dernières chances que nous avons de le faire», mentionnent les deux hommes.