Réal Lapierre souhaite un lien à l’Est, mais pas à Beaumont

POLITIQUE. Effacé de la vie publique depuis plusieurs années, l’ex-maire de Beaumont et député bloquiste de Lévis-Bellechasse, Réal Lapierre, suit tout de même avec un certain intérêt les opinions émises dans le dossier d’un troisième lien entre Lévis et Québec.

Rappelons qu’il a amplement exploré le sujet il y a une vingtaine d’années lorsqu’il était en politique municipale.  S’il privilégie un lien vers l’Est et même s’il était maire de Beaumont à ce moment-là, M. Lapierre rappelle d’entrée de jeu que ce n’est pas sa municipalité qui était visée. «C’était impensable, car si nous voulions faire un réseau de transport intégré, Rive-Nord et Rive-Sud, il fallait que cela s’approche le plus possible des centres-villes. Même avec l’étalement urbain des dernières années, ce n’est pas la solution idéale non plus», a-t-il rappelé.

Après avoir étudié plusieurs scénarios, l’endroit le plus logique à ce moment était plutôt le secteur Lauzon. «Il fallait une proximité avec le centre-ville, soit via Mgr Bourget ou au maximum la route Lallemand pour se rendre près de Ciment St-Laurent sur la Rive-Nord, à proximité du port de Québec. Nous avions même imaginé que le tunnel pourrait sortir en plein milieu de l’île d’Orléans et une jetée de l’autre côté qui desservirait cette population. Partenariat public-privé, péage, comme on fait actuellement à Montréal. Tous les scénarios étaient sur la table», se souvient-il.

Si son scénario semble empreint d’une certaine logique aujourd’hui, les commentaires reçus à certains niveaux à cette époque étaient plus ou moins flatteurs. «C’était à l’automne 1997, au moment où l’économie du Québec était boiteuse. On m’avait traité d’illuminé, car j’imaginais que pour avoir un service efficace, on se devait de faire un peu comme à Ottawa, c’est-à-dire un rectangle en termes de circulation. Nous c’est l’envers du monde, nous avons un fer à cheval et il n’y a pas d’alternative que les ponts» a-t-il imagé pour illustrer son propos.

Après avoir travaillé sept ans sur le dossier en compagnie de plusieurs partenaires, il a choisi de le mettre sur les tablettes après son élection au fédéral. «Les problèmes de circulation dans la région posaient déjà un problème. Le but était aussi de décongestionner les principales artères du camionnage. Lorsqu’il n’y avait qu’un seul pont, c’était déjà une aventure de traverser à Québec le dimanche en après-midi. Avec le deuxième pont, nous savions aussi que tout le transport en provenance de la Beauce, de l’Est et de l’ouest. Les camions qui se rendent au port de Québec se doivent de faire le tour tout comme ceux qui se rendent sur la Côte-Nord et au Saguenay, les autobus, etc. J’ai été élu député en 2004 et je n’avais plus de temps à consacrer à ça, alors les démarches ont cessé d’évoluer».

Le SRB et les lobbys

Les enjeux du transport sont au cœur de bien des discussions concède M. Lapierre qui a des opinions bien arrêtées sur certains sujets actuellement sur la table. Il n’est pas partisan d’un service rapide par bus. «Le dossier du SRB, ça vaut absolument zéro, car l’étalement urbain a déjà eu lieu et il y aura toujours des gens incapables de demeurer en ville. Cet étalement fait en sorte que l’autobus, lors de pluies diluviennes ou autres, nous n’avons pas le climat pour ça. En fin de compte, on aura à peu près le même nombre d’utilisateurs qu’actuellement dans les autobus non fonctionnels que l’on connait».

Il se fait particulièrement critique du travail que certains lobbys effectuent à l’heure actuelle, surtout chez les environnementalistes. Selon Réal Lapierre, il est impossible de répondre à toutes leurs exigences. «Il faut se rendre à l’évidence qu’eux aussi ont un impact sur le sujet. Les antipollutions, les marcheurs, les cyclistes et autres. Ceux-ci bloquent énormément de projets. Pour eux, il faudrait que tout le monde marche, utilise l’autobus ou le vélo. Tant et aussi longtemps que tout ne fonctionnera pas à l’électricité, nous aurons besoin du pétrole. Il y a des évidences. Avec tous les produits de plastique que l’on utilise actuellement, on fait quoi? On retourne au contenant de verre? Voyons donc.»

Il ne faut pas se bercer d’illusions selon M. Lapierre. Les gens continueront de se construire en périphérie des villes autant sur la Rive-Nord qu’au sud. «C’est un phénomène normal. À l’époque où j’étais député au fédéral, il y avait trois ponts pour traverser de Gatineau à Ottawa. Quel beau système intégré de transport. C’était facile».

S’il aurait possiblement une meilleure oreille aujourd’hui pour partager ses idées sur le sujet, Réal Lapierre n’a pas l’intention de s’impliquer activement dans le débat. Ses démarches de l’époque étaient sérieuses et non farfelues. «J’avais demandé à Jean Garon, maire de Lévis à l’époque, de travailler avec nous. La Ville de Charlesbourg avait été sollicitée, car c’est là que nous nous dirigions, il y avait aussi un spécialiste des tunnels à notre table, le plus grand expert du moment en termes de séisme, et des gens de la Chambre de commerce de Lévis. Notre éventail était large. Aujourd’hui, je ne veux plus m’impliquer là-dedans, j’ai donné», a-t-il conclu.