Saint-Vallier: Marc Bergeron pose un regard différent sur l’être humain

EXPOSITION. Une exposition lourde de sens et basée sur l’être humain a cours depuis le 29 juillet dernier au Domaine Pointe-de-Saint-Vallier.

Photographe de combat au sein de l’armée canadienne pendant de nombreuses années et maintenant résident de Saint-Vallier, Marc Bergeron propose Humanis, une exposition unique présentant des scènes de la vie quotidienne glanées au hasard de ses voyages à travers le monde.

« Humanis, ce sont des portraits de personnes pris en Inde, en Thaïlande, au Costa Rica, en Colombie et autres. C’est mon regard à travers le regard de l’autre, mais également les regards du monde pris à travers le regard des autres », indique le photographe en précisant qu’on n’y retrouve aucune photo à caractère militaire.

« J’ai quelques photos qui ont fait les nouvelles dans certains pays comme en Colombie, par exemple. Lors d’un changement de gouvernement, il y a eu de gros rassemblements avec des émeutes. Cela faisait 200 ans que la droite était au pouvoir et j’ai un cliché montrant 20 000 personnes se soulevant à la Place Simon-Bolivar », poursuit-il en ajoutant qu’on y retrouve aussi quelques clichés en noir en blanc, ainsi que des photos qui amèneront les gens vers des réflexions plutôt que vers des explications.

« C’est une réflexion sur où nous allons comme humains, avec nos conflits et autres. C’est un petit côté de moi qui est en lien avec le syndrome de stress post-traumatique dont j’ai été victime dans l’armée, avec les guerres et les conflits que j’ai vécus. »

Place aux courageuses

Le photographe profite aussi de l’occasion pour présenter un photoreportage des plus émotifs intitulé Les courageuses (Las Valiantes), qui met en lumière le combat de femmes d’origine colombienne victimes d’attaques aux agents chimiques.

« Depuis 2019, je vais régulièrement en Colombie, spécialement à Bogota, pour suivre ces femmes. Je les ai photographiées dans leur quotidien et j’ai choisi 14 photos pour les représenter. Cela a été difficile de les approcher au départ, et c’est comprenable, car leur confiance envers les hommes est à son plus bas. Une grande majorité d’entre elles sont devenues des féministes et je les comprends très bien également », précise M. Bergeron en ajoutant qu’il a pris conscience de cette cause lors d’un séjour à Bogota, alors qu’il prenait des photos sur la danse, moyen utilisé par plusieurs Colombiens pour se sortir du syndrome post-traumatique dont ils sont victimes en raison de la guerre civile qui a longuement frappé ce pays.

« Mon guide m’a dit que plusieurs de ces femmes faisaient aussi de la danse du fait qu’elles ont été victimes d’attaques aux agents chimiques et cela m’a donné l’idée de mettre en place ce projet. Il faut montrer que cela n’arrive pas qu’en Inde ou au Moyen-Orient, mais également dans notre hémisphère et que ces femmes-là sont restées défigurées à cause de cela. »

Marc Bergeron parle en détail d’une de ces femmes qui a dû subir 130 opérations et 90 reconstructions physiques. « Il y a deux semaines, on nous a appris qu’elle avait un cancer généralisé. Tu lui parles, mais elle est heureuse quand même, car elle est en vie et a toujours de l’espoir », poursuit-il en rappelant que ces femmes ont été attaquées à la suite de drames conjugaux, pour plusieurs, alors que d’autres ont été victimes, sans raison, « seulement car elles sont belles et qu’elles marchaient dans la rue. »

Soulignons que si chaque photo de l’exposition Humanis est accompagnée d’un texte explicatif, celles consacrées aux Courageuses sont accompagnées d’extrait d’entrevues qu’il a effectuées avec celles-ci et dans lesquelles elles racontent leur vie au quotidien, comment elles ont réussi à survivre.

« C’est incroyable ce qu’elles ont fait pour survivre. Elles vivent dans une grande pauvreté et malgré tout, elles t’offrent du café et des pâtisseries quand tu les rencontres. Tu es presque gêné d’accepter, mais tu le fais et elles sont heureuses de te parler. Elles ne comprennent pas pourquoi quelqu’un part du Québec et du Canada pour parler de leur cause. Cela les impressionne », mentionne le photographe.

« Ce sont des histoires qui viennent te chercher. Certaines n’ont jamais parlé de leur histoire, mais elles ont tout de même accepté d’en parler sans savoir où cela allait les mener, mais en sachant que ce sera diffusé ailleurs dans le monde. »

Vernissage et exposition

Le vernissage officiel de l’exposition Humanis et des Courageuses, qui se déroulera jusqu’au 15 août prochain, aura lieu ce dimanche 6 août. Pour l’occasion, Marc Bergeron présentera une conférence sur ses années de guerre à compter de 14 h sous le thème La photographie de combat et reportage : de la fulgurance à la résilience.