Des élus libéraux pour une assemblée citoyenne sur la réforme du mode de scrutin

OTTAWA — Des dizaines d’élus libéraux appuient l’idée de ramener sur le tapis le débat sur la réforme du mode de scrutin en créant une assemblée citoyenne, comme le proposaient les néo-démocrates dans une motion qui a toutefois été battue mercredi.

En plus de compter sur le soutien des bloquistes, les troupes de Jagmeet Singh ont pu avoir l’appui de 40 députés libéraux.

La ligne de parti ne s’appliquait pas pour ce vote, ce qui a notamment permis aux députés québécois Anthony Housefather, Alexandra Mendès et Anna Gainey de voter en faveur, de même que les Franco-ontariens Marc Serré et Arielle Kayabaga.

Des députés libéraux d’ailleurs au pays ont aussi entériné la motion, comme l’élu du Manitoba Ben Carr et celui de la Colombie-Britannique Taleeb Noormohamed.

Un élu de l’Ontario, Ryan Turnbull, avait signalé en mêlée de presse qu’il voterait en faveur de la proposition.

Il a affirmé qu’un nombre significatif d’électeurs de sa circonscription de Withby lui parlent de l’importance, pour eux, d’une réforme du système électoral.

«Je suis très ouvert et favorable à ce que des citoyens s’impliquent d’une façon qui est, je pense, saine pour notre démocratie – de parler de comment une réforme électorale peut rehausser notre démocratie», a-t-il soutenu avant de se rendre à la période des questions.

La veille, son collègue Marc Serré a indiqué qu’il «aime vraiment l’idée» mise de l’avant par le Nouveau Parti démocratique (NPD). «Il y a certaines démarches qu’on doit faire pour améliorer la participation (citoyenne)», a-t-il dit en évoquant les Canadiens qui n’exercent pas leur droit de vote.

Un autre député franco-ontarien, Francis Drouin, avait affirmé qu’il appuierait la motion, mais a finalement voté contre. «Qu’un comité citoyen se penche sur cette question-là, sans politiciens, c’est une bonne idée», avait-il soutenu avant de se rendre à la réunion hebdomadaire du caucus libéral.

Durant le débat en Chambre sur la proposition néo-démocrate, la libérale Leah Taylor Roy n’a pas caché son enthousiasme.

À son avis, l’initiative pourrait être une façon de répondre à la désinformation, un courant qui se nourrit, d’une certaine façon, par des décisions politiques importantes qui sont prises loin du regard des citoyens. «Une assemblée citoyenne permet aux discussions d’être menées à portée de l’ouïe des Canadiens», a lancé lundi celle qui a voté en faveur de la motion.

Les militants du Parti libéral du Canada ont adopté une résolution ressemblant à la motion du NPD lors du dernier congrès national de leur parti, en mai. Le texte entériné appelait à la mise sur pied d’une assemblée citoyenne pour se pencher sur la réforme du mode de scrutin.

Le député libéral David McGuinty estime que le débat sur la réforme du système électoral devrait se faire sur le plancher de la Chambre puisque le Parlement constitue, à ses yeux, une assemblée citoyenne.

«On a une Chambre des communes. On est tous élus. On a une responsabilité de représentation», a-t-il fait valoir devant les journalistes.

Les conservateurs ont pratiquement tous voté contre la motion, à l’exception de trois d’entre eux, c’est-à-dire les élus ontariens Ben Lobb, John Nater et Alex Ruff.

En Chambre, leur collègue Michael Cooper avait défendu le système actuel de scrutin uninominal majoritaire à un tour. Il avait été chaudement applaudi par ses collègues qui étaient présents.

«Je ne pense pas que c’est un accident que nous ayons vu, depuis 150 ans, un transfert de pouvoir pacifique. (…) Si le système n’est pas brisé, alors nul besoin de le réparer», avait-il dit en précisant qu’un changement de mode de scrutin ne peut selon lui être tranché que par référendum.

Selon la néo-démocrate Lise Marie Barron, qui a déposé la motion en question, il est clair qu’une discussion sur le système électoral est d’autant plus nécessaire dans le contexte économique difficile ainsi que de la manifestation des changements climatiques.

«Ce que j’entends de la part de Canadiens partout au pays est que, maintenant plus que jamais, il est essentiel d’avoir un gouvernement représentatif (…) (de) nos communautés avec des députés qui s’assemblent pour amener de réelles solutions aux Canadiens en temps opportun», a-t-elle déclaré mardi en point de presse.

En 2015, le gouvernement de Justin Trudeau a été élu en promettant de réformer le mode de scrutin. Il a ensuite abandonné cet engagement au cours du premier de ses trois mandats. Aucun consensus n’avait été trouvé sur la formule de remplacement à privilégier, que ce soit le scrutin proportionnel ou préférentiel.

La motion sur laquelle les élus ont voté mercredi n’était pas contraignante. Bien qu’elle ait été rejetée, elle pourrait avoir ressuscité, pendant quelques jours, un débat renvoyé aux calendes grecques.