La Cour supérieure permet l’abattage de cerfs à l’arbalète à Longueuil

MONTRÉAL — La Ville de Longueuil pourra permettre une chasse contrôlée à l’arbalète afin de contrer la surpopulation de cerfs dans le Parc Michel-Chartrand, où le cheptel dépasse la centaine de bêtes alors que les experts estiment sa capacité à une vingtaine de bêtes au maximum.

Le juge Bernard Jolin, de la Cour supérieure, a rendu cette décision jeudi, ajoutant ainsi une nouvelle page à la longue saga entourant le sort des cervidés.

L’organisme Sauvetage animal et la citoyenne Florence Meney tentaient, avec l’appui de la Société de prévention de la cruauté envers les animaux (SPCA), de faire annuler le permis de chasse à l’arbalète émis par le ministère de la Forêt, de la Faune et des Parcs à la demande de la Ville de Longueuil.

Dans une décision de 57 pages, le magistrat estime que ceux-ci «ne parviennent pas à démontrer le caractère déraisonnable» de la démarche.

Selon le juge Jolin, celle-ci «s’inscrit dans l’exercice légitime des pouvoirs que la loi attribue à la Ville en matière de parcs, d’environnement, de nuisances, de salubrité et de sécurité. Elle est intimement liée à la surpopulation de cerfs dans le Parc et aux nombreux enjeux qu’elle soulève», explique-t-il, soulignant qu’il y a eu «un long processus de consultation et de réflexion qui intègre des considérations importantes pour le bien-être et la sensibilité des cerfs».

Quant à l’émission du permis par le ministère, celle-ci «résulte d’une analyse approfondie qui examine toutes les options». 

Pas de droit à vivre

Le juge rejette l’argument des demandeurs voulant que l’on doive, lorsque possible, privilégier des méthodes de contrôIe qui permettent de maintenir les animaux en vie plutôt que des méthodes létales qui ne considèrent pas l’intérêt des cerfs à vivre. 

«lls ont tort», tranche le magistrat. Si la loi «reconnaît que les animaux sont des êtres doués de sensibilité, (elle) ne reconnaît pas toutefois leur droit ou leur intérêt à vivre. (Elle) n’impose pas non plus de privilégier des méthodes de contrôle qui assure leur maintien en vie aux méthodes létales». 

«Une nuisance»

Il poursuit en faisant valoir que le fait «qu’ils soient doués de sensibilité n’empêche pas que les cerfs puissent constituer une nuisance et, dans ces cas (…) la preuve ne laisse aucun doute: les cerfs constituent une nuisance et leur nombre pose des risques sérieux pour les citoyens, l’équilibre écologique du Parc et met même en péril leur propre existence».

Quant à la dénonciation par les demandeurs de l’utilisation de l’arbalète parce qu’elle implique la possibilité d’erreurs et entraîne un risque de cerfs blessés errants, le magistrat juge que «le fait que cette méthode ne soit pas infaillible ne rend pas son adoption déraisonnable. D’ailleurs, la preuve révèle qu’il en est ainsi des autres méthodes telles que la capture-euthanasie ou la relocalisation qui posent des risques élevés de stress, de blessures ou de morbidité».

«L’arbalète, rappelle-t-il, fait partie des engins de chasse reconnus pour la chasse aux cerfs» et a été utilisée «à de nombreuses reprises dans le cadre d’opérations de chasse contrôlée». 

Nouvel échéancier «prochainement»

La Ville de Longueuil n’a pas tardé à réagir à cette décision, annonçant qu’elle entend présenter «prochainement» un échéancier révisé de son Plan d’intervention en vue d’une réduction du cheptel. Le vice-président du comité exécutif de la Ville, Jonathan Tabarah, affirme que le jugement «tombe à point alors que l’état du parc Michel-Chartrand continue de se dégrader rapidement en raison de la surpopulation de cerfs, ce qui inquiète les citoyennes et les citoyens, en plus des enjeux de sécurité routière inhérents aux abords du parc».

Cette saga a débuté en 2020 lorsque la Ville de Longueuil a commencé à vouloir contrôler la population de cerfs, estimant à l’époque qu’elle devait procéder à la capture et à l’euthanasie d’une quinzaine de bêtes en surpopulation. La décision avait soulevé une vive opposition de certains citoyens et de groupes de défense des animaux, faisant traîner le tout assez longtemps pour que la population de cerfs de Virginie explose et dépasse la centaine.

Il n’est pas dit, cependant, que ce jugement tourne définitivement la page sur le dossier puisque les demandeurs ont 30 jours pour en appeler.