La fermeture du chemin Roxham n’a pas freiné l’arrivée des demandeurs d’asile

MONTRÉAL — Les aéroports en Ontario et au Québec semblent être les nouvelles portes d’entrée pour les demandeurs d’asile au Canada.

Leur nombre avait chuté à la fin du mois de mars lorsque le gouvernement fédéral a conclu un accord avec les États-Unis pour refouler ces migrants aux postes frontaliers non officiels comme le chemin Roxham au Québec. Cependant, les chiffres indiquent une remontée au cours des derniers mois. La hausse est attribuable aux arrivées dans des aéroports ontariens et québécois.

En juin, la GRC à travers le pays a intercepté seulement 36 personnes entre les points frontaliers officiels, comparativement à 4994 en janvier. Cependant, l’Agence des services frontaliers du Canada a traité 4350 demandes en juin dans les aéroports — presque tous au Québec et en Ontario — comparativement à 1370 en janvier et 1360 en juin 2022.

Bien que la question semble avoir disparu des projecteurs politiques depuis la fermeture du chemin Roxham, un groupe d’aide aux réfugiés à Montréal affirme qu’il est plus occupé que jamais.

« Les chiffres que nous connaissons actuellement sont en fait plus élevés que ceux que nous avons eus en mars, janvier et février », relève Abdulla Daoud, directeur général du Centre des réfugiés. Entre 100 et 150 personnes par jour se présentent à son organisme à la recherche de services juridiques et d’autres aides pour des demandes.

Une demande qui ne fera qu’augmenter

Selon M. Daoud, l’augmentation du nombre de demandeurs d’asile dans les aéroports est due à ­«la situation mondiale actuelle». À l’heure actuelle, on compte quelque 110 millions de personnes déplacées sur l’ensemble de la planète, un sommet selon l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés.

«Nous devons commencer à investir dans les infrastructures pour faire face à cette réalité, car il n’y a pas de véritable moyen de dissuasion pour empêcher les individus d’entrer», estime le directeur général.

Stéphanie Valois, coprésidente de l’Association des avocats spécialisés en droit de l’immigration du Québec, ne croit pas que l’augmentation des arrivées à l’aéroport soit liée à la fermeture du chemin Roxham, car «les demandeurs d’asile qui arrivent à l’aéroport viennent de différents endroits». Elle l’attribue plutôt à l’augmentation du traitement des visas de visiteur, pour rattraper un certain retard, ce qui a entraîné plus d’arrivées et donc plus de demandes.

La Presse canadienne a demandé à Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada des informations sur les changements apportés à son traitement des visas, mais n’a pas reçu de réponse au moment de la publication.

Mme Valois convient cependant qu’à long terme, le nombre de demandeurs d’asile augmentera, à mesure que de plus en plus de personnes trouveront des moyens d’atteindre le Canada dans leur quête de sécurité.

Elle note que la majorité des demandes d’asile au Canada sont acceptées. «Ce ne sont pas des gens qui viennent ici pour une vie meilleure, souligne-t-elle. Ils viennent pour échapper à la persécution.»

Augmentation des passages secrets

Bien qu’elle ne partage pas de données pour des raisons «logistiques», la GRC affirme qu’il y a eu une augmentation des passages frontaliers secrets vers le Canada et vers les États-Unis depuis la mise en place du nouveau système.

«De l’autre côté de la frontière Québec-États-Unis, il n’y a pas un jour ou une nuit sans que la police interpelle certains migrants», a déclaré le sergent Charles Poirier dans un courriel. 

«Pour cette raison, nous avons adapté nos patrouilles, et nous poursuivons maintenant des enquêtes sur certains réseaux de contrebande», a-t-il précisé.

L’agent de patrouille en chef Robert Garcia, de la Patrouille frontalière des États-Unis, a écrit cette semaine que des agents patrouillant dans un secteur de la frontière qui comprend le Vermont, le New Hampshire et l’est de New York ont appréhendé plus de 5400 individus en un peu plus de 10 mois – plus qu’au cours des neuf dernières années combinées.