Le fédéral est contraint de protéger les habitats essentiels des oiseaux migratoires

Le gouvernement fédéral devrait agir rapidement pour mieux protéger les habitats essentiels contre l’exploitation forestière et la destruction des forêts anciennes, ont déclaré mardi des groupes environnementaux, alors qu’ils saluaient une décision de justice touchant à la protection des oiseaux migrateurs en péril.

Un juge de la Cour fédérale s’est rangé la semaine dernière du côté des groupes environnementaux qui alléguaient que le ministre canadien de l’Environnement avait interprété de manière trop étroite certaines protections fédérales pour les oiseaux migrateurs en péril.

Un avocat de l’association caritative environnementale Ecojustice, qui représentait deux groupes de conservation devant le tribunal, a qualifié la décision de «victoire pour les oiseaux en voie de disparition et menacés qui habitent au Canada, qu’ils résident dans des arbres anciens en Colombie-Britannique ou sur les îles du Canada atlantique».

«Maintenant, la Cour fédérale a confirmé que la loi exigeait que le gouvernement fédéral fasse davantage pour assurer la survie et le rétablissement de ces espèces», a écrit l’avocat Andhra Azevedo dans un communiqué.

Les groupes allèguent que le ministre Steven Guilbeault a pris une position en 2022 selon laquelle le gouvernement fédéral n’avait aucune obligation de protéger autre chose que les nids sur les terres provinciales, et non plus largement l’habitat dont les oiseaux migrateurs en péril ont besoin pour survivre.

Le juge en chef Paul Crampton a décidé la semaine dernière que l’interprétation du ministre était déraisonnablement étroite, renvoyant la déclaration de protection du ministre au gouvernement pour réexamen.

«Il n’était ni raisonnable ni tenable de la part du ministre de limiter cet habitat essentiel seulement aux « nids »», indique la décision.

La déclaration du ministre est intervenue après que les groupes environnementaux, dans le contexte de manifestations massives contre l’exploitation forestière des forêts anciennes dans le bassin hydrographique de Fairy Creek, en Colombie-Britannique, ont pressé le gouvernement de prendre des mesures pour protéger le Guillemot marbré.

Des habitats essentiels en péril

Le petit oiseau marin, qui niche dans les forêts anciennes sur la côte de la Colombie-Britannique, est répertorié comme «menacé» depuis 2003 et les groupes ont allégué que la province n’avait pas réussi à le protéger de l’exploitation forestière industrielle et d’autres activités.

Les groupes ont avancé que certaines régions de conservation de l’île de Vancouver disposaient d’habitats de nidification moins adaptés que ce qui était nécessaire à la survie et au rétablissement de l’oiseau, selon la décision du tribunal, tandis que d’autres régions de conservation de l’île approchaient rapidement de ce seuil.

Les menaces qui pèsent sur l’habitat, depuis l’exploitation forestière industrielle jusqu’aux incendies de forêt provoqués par le changement climatique, rendent les espèces d’oiseaux migrateurs déjà en danger vulnérables à l’extinction, ont soutenu les groupes.

Si l’interprétation du ministre n’était pas contestée, les groupes ont soutenu que la majorité de l’habitat essentiel d’au moins 25 espèces d’oiseaux migrateurs en péril à travers le pays, y compris le Guillemot marbré, n’aurait pas été protégé sur des terres non fédérales.

«Cette décision doit entraîner une action rapide de la part du gouvernement fédéral pour protéger l’habitat essentiel des oiseaux migrateurs en péril», a déclaré Shelley Luce, directrice des campagnes et des programmes du Sierra Club BC, qui a intenté une contestation judiciaire, aux côtés du Wilderness Committee.

Dans une déclaration écrite, Mme Luce a déclaré que la décision souligne en outre l’urgence d’adopter une législation adaptée aux espèces en péril en Colombie-Britannique, «où l’habitat du Guillemot marbré et d’autres oiseaux en voie de disparition reste vulnérable à l’exploitation forestière et à d’autres destructions d’habitat».

Le ministre avait fait valoir que son interprétation maximisait la capacité provinciale d’agir dans un domaine de compétence partagée, selon la décision. D’après le ministre, une interprétation plus large risquerait de miner le principe du fédéralisme coopératif.

Mais le juge a déclaré que ce principe, élaboré pour offrir une certaine flexibilité dans la répartition des pouvoirs provinciaux et fédéraux, ne peut être invoqué pour «interpréter» les responsabilités fédérales au point de les rendre «sans utilité».

«Cela est particulièrement vrai lorsque la province concernée n’a pas réussi à profiter des possibilités de prendre des mesures de protection dans un domaine de responsabilité conjointe, comme l’allèguent les demandeurs», a écrit le juge en chef Crampton.

M. Crampton a également cité les preuves apportées par les groupes environnementaux selon lesquelles l’identification des nids est difficile et constitue donc un moyen inefficace de protéger et de rétablir les oiseaux migrateurs. Le programme de rétablissement du gouvernement fédéral de 2014 indique que les sites de nidification du Guillemot marbré, qui pond généralement un seul œuf sur une branche couverte de mousse d’un arbre ancien, peuvent être «très difficiles à localiser».

«En bref, les nids ne peuvent pas être protégés s’ils ne peuvent pas être trouvés», lit-on dans la décision du juge Crampton.