Soins de santé, coût de la vie et Palestine au menu des discussions du NPD à Hamilton

HAMILTON — Systèmes de soins de santé, mesures d’abordabilité et conflit israélo-palestinien sont au menu des discussions qu’ont commencé à avoir vendredi les membres du Nouveau Parti démocratique (NPD) réunis en congrès à Hamilton.

Le leadership du NPD souhaite vraisemblablement que l’essentiel du brassage d’idées porte sur les façons dont le parti devrait se présenter en opposition aux conservateurs de Pierre Poilievre et aux libéraux de Justin Trudeau.

«Je pense qu’une des grandes choses va vraiment être de discuter où le parti s’en va, surtout par rapport à la prochaine élection», a résumé en entrevue Mélanie Richer, qui a été directrice des communications pour le chef néo-démocrate Jagmeet Singh.

Pour que le congrès «soit un succès», elle estime dire que les membres devront se montrer unis une fois les débats du week-end terminés.

L’entente avec les libéraux critiquée

Des lignes de fracture ont d’ailleurs semblé transparaître parmi les troupes néo-démocrates, au premier jour de congrès, au sujet de l’entente de soutien et de confiance liant le NPD aux libéraux de Justin Trudeau.

Plusieurs délégués estiment que M. Singh devrait se retirer de l’accord censé permettre au gouvernement libéral minoritaire de rester au pouvoir jusqu’en 2025.

«C’est ce que (l’ex-chef du NPD) Jack Layton a fait plusieurs fois: jouer dur», a dit l’un d’eux, Lukas Oakley, un résidant de Paris, en Ontario.

Ce militant néo-démocrate a affirmé être généralement en faveur d’une collaboration avec le gouvernement. Or, «au Canada, l’accord de soutien et de confiance est un peu comme un mot en F», a-t-il dit en référence au juron en anglais.

D’autres délégués ont, pour leur part, plaidé que l’entente a permis de forcer les libéraux à agir sur plusieurs fronts, comme la mise en place de premières étapes menant à un programme de soins dentaires.

Le congrès qui doit se terminer dimanche est le premier grand rendez-vous du NPD depuis que l’entente avec les libéraux existe. C’est donc la première occasion pour de nombreux délégués de se faire entendre.

Quoi qu’il en soit, dans les hauts rangs du parti, on ne croit pas que le congrès équivaudra à un «référendum sur l’entente».

«Je pense que (…) nous allons entendre les gens dire qu’ils en veulent plus et plus rapidement (…) et je salue cela», a dit une représentante de la formation politique dans une séance d’information destinée aux journalistes.

Parmi les résolutions débattues durant le congrès, on retrouve une proposition visant à ce que le NPD établisse un plan pour la création de 3,5 millions nouveaux logements abordables au cours de la prochaine décennie, ce qui s’alignerait avec un récent rapport de la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL).

Dans les propositions en matière de santé figure celle d’ajouter aux politiques principales du parti la volonté d’«élargir notre système de santé public pour inclure tous les services de santé médicalement nécessaires, y compris les soins dentaires, mentaux, pharmaceutiques, auditifs et visuels».

Soutien au peuple palestinien

Des résolutions d’urgence sur le soutien au peuple palestinien s’ajouteront au menu. La liste complète de ces résolutions n’avait toujours pas été rendue disponible aux médias vendredi.

Selon une liste partielle communiquée par le parti, une résolution visera à ce que «le congrès appelle à une cessation immédiate des hostilités militaires, la libération de tous les civils, la levée de l’embargo sur la nourriture, les médicaments et le carburant pour les personnes se trouvant dans la bande de Gaza ainsi que la fin de l’intensification de l’occupation en territoires palestiniens».

Une autre proposition a pour but d’exhorter le Canada à «demander un cessez-le-feu et une aide humanitaire de première nécessité pour les Gazaouis». Son libellé mentionne aussi que les néo-démocrates devraient «réitérer leur condamnation des attaques terroristes du Hamas».

Le débat sur les résolutions d’urgence devait initialement avoir lieu vendredi, mais l’horaire a été revu pour que cela survienne plutôt samedi. Le parti a justifié ce changement en soutenant qu’un nombre plus important qu’anticipé de résolutions d’urgence ont été reçues. Chacune d’elles doit être révisée par un comité.

«Le problème du contexte actuel, c’est qu’il y a une crise internationale qui n’était pas prévue, qui risque de faire déraper les débats», croit Karl Bélanger, qui a été conseiller politique pour les anciens chefs du NPD Jack Layton et Thomas Mulcair.

À son avis, la façon dont «le leadership va gérer ça» est importante. «Est-ce que ça va monopoliser les débats et est-ce que c’est ce que les gens vont retenir de ce congrès? C’est certain que ce n’était pas ça le plan de match», a-t-il dit.

Karl Bélanger, aujourd’hui président de la firme Traxxion Stratégies, croit que les résolutions de soutien aux Palestiniens ont leur pertinence, de façon générale.

«La réalité, c’est que si la situation en Israël avec la bande de Gaza est importante politiquement pour le NPD, ce n’est pas quelque chose qui est très utile et si le débat dérape là-dessus, ce n’est pas un message qui va intéresser l’ensemble de l’électorat canadien», a ajouté l’ex-stratège.

Mélanie Richer ne s’attend pas à ce que les résolutions d’urgence perturbent les plans du leadership du parti. Il faut dire que le temps alloué pour discuter de l’ensemble des résolutions d’urgence est limité à 30 minutes.

«Je pense que, jusqu’à date, le parti a vraiment été capable d’avoir une position nuancée et humaine, d’humaniser le conflit d’une manière qu’on ne voit pas, je pense, sur les médias sociaux», a soutenu celle qui est désormais consultante chez Earnscliffe Strategies.

Elle a affirmé que «c’est naturel que n’importe quel débat sur cet enjeu-là soit émotif».

Le point de vue palestinien «étouffé»

«Personne n’essaie d’empêcher le débat d’avoir lieu», a dit une représentante du parti, ajoutant que ces discussions devaient être «constructives» et «respectueuses».

Aux yeux de Ken Stone, de la Hamilton Coalition To Stop The War, il est clair que toute résolution en soutien aux Palestiniens qui pourrait être adoptée à l’issue du congrès n’ira pas assez loin.

«J’ai été délégué à plusieurs congrès du NPD et le leadership s’assure que le point de vue palestinien soit étouffé. Il s’agit d’un parti qui est très partisan, dans les hauts rangs», croit celui qui distribuait vendredi des tracts pour publiciser un rassemblement de soutien au peuple palestinien. L’événement doit avoir lieu dimanche après-midi dès la fin du congrès du NPD, à deux pas du centre de congrès où sont réunis les délégués.

M. Singh se soumettra au traditionnel exercice du vote de confiance samedi. Tant Mme Richer que M. Bélanger s’attendent à ce que les membres du NPD accordent un taux d’appui élevé à M. Singh.

– Avec des informations de Mickey Djuric