Un Québécois recommandé pour recteur de l’Université de Genève dans la controverse

MONTRÉAL — Bien que sa nomination au rectorat de l’Université de Genève ne fasse pas l’unanimité au sein de la classe politique suisse, le Québécois Éric Bauce respectera la décision du Conseil d’État, chargé d’approuver ou de rejeter la recommandation de l’Assemblée universitaire.

L’Assemblée de l’Université de Genève a annoncé la sélection de M. Bauce, professeur à l’Université Laval, à Québec, par communiqué mercredi. Elle y a fait état du «projet fédérateur et porteur d’avenir» présenté par le candidat Bauce, «dans la continuité des efforts engagés par le Rectorat actuel, non seulement en matière d’excellence et de rayonnement de l’Université, mais également en faveur d’un progrès social, environnemental et écologique, en collaboration avec les acteurs politiques locaux et internationaux».

L’institution qualifiait aussi l’heureux élu de «personne au profil scientifique excellent», «possédant à la fois d’indiscutables capacités de gestion et de direction à haut niveau dans les institutions de recherche et d’enseignement, une grande capacité à mobiliser un réseau national et international et un engagement fort pour l’excellence académique».

Controverse

Or, rapportent plusieurs médias suisses, certaines voix, gouvernementales entre autres, ont exprimé des réserves quant à cette nomination internationale, indiquant ouvertement qu’un candidat suisse aurait été mieux vu.

«Ce serait la première fois qu’un étranger, qui plus est un Nord-Américain, dirigerait cette prestigieuse université, reconnaît Éric Bauce en entrevue avec La Presse Canadienne. Je peux comprendre les inquiétudes et les appréhensions qui ont été exprimées, mais je respecterai la décision qui sera prise. Je suis néanmoins extrêmement honoré d’avoir été choisi par l’université.»

Le Conseil d’État suisse pourrait donc renverser cette sélection, forçant du même souffle un nouveau processus de candidature, a indiqué La Tribune de Genève. «Une telle décision serait potentiellement de nature à ouvrir une crise institutionnelle, car elle porterait atteinte à l’autonomie de l’Université et à sa légitimité», rapporte-t-on.

Long processus

L’appel de candidatures au poste de recteur de l’Université de Genève avait été lancé en juin 2022 et le processus de désignation s’est échelonné entre septembre et janvier. Deux autres candidats étaient sur les rangs, à savoir le Belge Jean-Michel Rigo, de l’Université de Hasselt, et Jérome Lacour, doyen de la Faculté des sciences et candidat interne à l’Université de Genève, rapporte le site 20 minutes.

Déjà, la possibilité de nommer un étranger faisait controverse. «L’Assemblée déplore les prises de position publiques et les ingérences dans un processus mené selon les dispositions légales, ainsi que la forte pression médiatique exercée durant la procédure. Ces pressions, inacceptables, violent l’autonomie de l’Université telle que prévue par la loi. En dépit de ces pressions, l’Assemblée a poursuivi son travail d’évaluation et a pris sa décision en toute indépendance», a souligné l’Université dans son communiqué.

M. Bauce est professeur titulaire au Département des Sciences du bois et de la forêt depuis 1989 à l’Université Laval, où il oeuvre à la Faculté de foresterie, de géographie et de géomatique. Il a tenté par deux fois d’accéder au rectorat de son alma mater, dont il détient un baccalauréat en génie forestier et une maîtrise en entomologie forestière. Il s’est aussi vu décerner un doctorat honorifique par l’Université de Bordeaux en 2015.

Il a toutefois occupé les fonctions de vice-doyen recherche et études supérieures à sa faculté, de septembre 1998 à juin 2007, en plus d’avoir été vice-recteur exécutif et au développement de l’Université Laval entre juillet 2007 et juillet 2017. M. Bauce a aussi été vice-recteur administration et finance de janvier 2009 à janvier 2010.

C’est par l’entremise d’une publicité publiée dans le quotidien «Le Devoir», que lui a acheminée un collègue, qu’il a pris connaissance de la prestigieuse offre d’emploi. «Le profil recherché était très intéressant et j’ai trouvé qu’on partageait la même philosophie», explique le principal intéressé, qui a formulé une proposition axée sur la transition socioécologique, la gestion collaborative et la science ouverte.

L’actuel recteur de l’Université, Yves Flückiger, quittera ses fonctions à la mi-juillet. Le prochain mandat au rectorat s’étendra sur les années 2023 à 2027.

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Cette dépêche a été rédigée avec l’aide financière de la Bourse de Meta et de La Presse Canadienne pour les nouvelles.