Laury Shields: la petite blonde à la pelle rose

CONSTRUCTION. Âgée de 24 ans, Laury Shields de Saint-Jean-Chrysostome pratique un métier non traditionnel, particulièrement pour une jeune fille de son âge. Elle est entrepreneure spécialisée, travaille en excavation et parfois, sur des chantiers d’envergure.

Si peu de femmes œuvrent dans ce corps de métier, d’autres aspects font qu’elle se distingue davantage. Elle possède sa propre entreprise: Excavation Laury Shields, a sa propre pelle mécanique, ses camions et ses propres couleurs. La petite blonde à la pelle rose, c’est elle!

Son intérêt pour la profession vient de son tout jeune âge alors qu’elle accompagnait son père qui se rendait travailler en forêt. «Je ne jouais pas aux Barbies quand j’étais petite, je jouais avec des camions. J’ai toujours aimé la machinerie. J’ai goûté aux manettes et tout et ça m’a fasciné tout de suite. J’ai toujours voulu avoir ma propre compagnie. Je ne voulais pas que des gens fassent de l’argent sur mon dos», dit-elle en riant.

La jeune femme vient de terminer un important contrat pour la Ville de Lévis, soit la réfection de conduites d’aqueduc et autres, et se retrouve actuellement affectée à l’aménagement de la route 173-277 en quatre voies à Saint-Henri. Si elle travaille à l’occasion chez des particuliers pour l’aménagement de leur terrain ou d’un stationnement, elle préfère, pour le moment, œuvrer sur les chantiers. «Je n’ai pas d’équipe, je suis toute seule. Alors je préfère la sous-traitance pour l’instant. J’arrive avec ma pelle et je fais mes choses.»

La fameuse pelle rose

Laury Shields pratique son métier depuis maintenant cinq ans et réussit à faire sa place par elle-même. «Je n’ai personne derrière moi. J’ai travaillé un an à Plessisville où j’ai appris à peu près tout ce que je sais. Comme c’était fatigant de voyager soir et matin de Saint-Jean-Chrysostome, j’ai réussi à décrocher un travail près de chez moi à Charny.»

C’est là qu’elle a pu mettre la main sur sa propre pelle mécanique. «Cette pelle était ma préférée, mais elle ne bougeait pas, car il y en avait trois et nous étions seulement deux opérateurs. J’ai demandé au patron si elle était à vendre. Comme elle ne servait pas, il me l’a vendu. J’ai commencé comme ça. Je vais la garder longtemps. Elle n’a pas beaucoup d’heures d’utilisation et est d’une grosseur qu’on ne retrouve pas sur les chantiers. Pour les petits contrats résidentiels, c’est idéal aussi.»

L’idée d’une pelle rose est venue progressivement. «Quand j’ai créé mon entreprise, mon logo affichait une pelle rose pour me distinguer. Celle que j’ai achetée était jaune, mais avait besoin d’être rafraichie un peu. J’ai essayé la cabine jaune avec la pelle rose, mais ce n’était pas beau. Alors j’ai choisi de faire peinturer la cabine rose. On me dit que beaucoup de personnes s’arrêtent les week-ends pour se faire photographier. C’est incroyable le nombre de personnes qui peuvent me prendre en photo dans une journée. Sur Facebook, j’apparais dans plein d’affaires.»

Dans un milieu d’hommes

Une jolie fille œuvrant dans un milieu presque exclusivement masculin pourrait faire place à certaines situations délicates selon certains. Laury a toutefois le sentiment d’avoir fait ses preuves et de faire partie de l’équipe. «C’est tannant un peu à l’occasion, mais on finit par ne plus entendre ceux qui sont déplaisants. Je me suis toujours fait respecter parce que je respecte les gens et je ne me laisse pas marcher sur les pieds. Maintenant, les travailleurs savent qui je suis, car je travaille souvent avec les mêmes».

Elle avoue côtoyer davantage d’hommes que de femmes dans la vie de tous les jours. «Je suis plus souvent avec des garçons. J’ai deux amies de fille, mais nous n’avons pas les mêmes sujets de conversation alors c’est plus facile avec les garçons.»

Le travail avant la famille

Laury travaille énormément, elle qui consacre près d’une cinquantaine d’heures par semaine à ses fonctions sur les chantiers. «Je fais aussi ma comptabilité et tout le reste moi-même. Les semaines sont exigeantes. Je me donne cinq ans à ce rythme. Je n’ai pas de vie pour le moment, mais c’est voulu comme ça.» Ces raisons font qu’elle n’envisage pas de fonder une famille à court terme, particulièrement en raison de son travail et de son entreprise. «Je ne me vois pas enceinte, assise dans une pelle. Les horaires de garderie ne sont pas vraiment compatibles avec un agenda de travail dans mon domaine non plus. J’ai aussi une petite fermette alors je n’ai pas beaucoup de temps.»

La jeune femme a un plan de match bien précis en tête et espère réussir à faire grandir son entreprise. Elle veut toutefois faire les choses à son rythme. «J’aimerais un jour en venir à avoir d’autres équipements et mes propres employés. Je veux d’abord payer mes choses et après, je pourrai investir. Fille ou garçon je ne sais pas, mais la pelle sera rose c’est certain», lance-t-elle dans un éclat de rire.